Le Marin de Dublin
de Hugo Hamilton

critiqué par Sahkti, le 15 novembre 2007
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
En quête de soi-même
Roman autobiographique ou autobiographie romancée... Hugo Hamilton poursuit l'exploration de la mémoire et du passé avec ce "Marin de Dublin". On sent l'auteur partagé entre le besoin de se souvenir et celui d'oublier. Ce qui peut ressembler à un paradoxe devient le leitmotiv d'une quête de soi-même et d'une construction d'une personnalité propre, indépendante de l'Histoire, d'une famille, d'un pays.
Une recherche d'identité qui passe par les petites histoires de la vie, celles qui sont influencées par la grande. La bêtise humaine engendre les pires conflits, Hamilton en sait quelque chose, il n'en a pas fini avec ça.
Une proximité entre l'auteur et son sujet qui permet au lecteur d'entrer en possession de très beaux passages sur la pêche, sur l'enfance, sur l'Irlande, sur le poids des mots. Et de se faire une petite place au milieu d'une certaine cacophonie: le fil conducteur de ce roman est parfois ténu et il progresse par à coups, à l'image certainement des émotions ressenties par Hamilton en écrivant et en se souvenant.
J'ai particulièrement apprécié toutes les contradictions soulevées dans les personnages de Hamilton, leur combat permanent contre cela, cette sensation d'être constamment déchiré. Sans jamais arriver à trouver l'apaisement. La quête sera-t-elle éternelle?
Gagner son innocence 7 étoiles

« Je vais m’enfuir et gagner mon innocence …..Adieu la honte, Adieu le reproche, Adieu le tourment dans la tête »
Telle est la déclaration liminaire du héros qu’il va mettre en œuvre pour progressivement se libérer de l’emprise de son père « Un Irlandais qui refuse de se rendre aux Britanniques » et échapper au poids du passé de sa mère « une Allemande couverte de honte ». D’abord en regimbant, puis en mettant entre ses parents et lui une distance de plus en plus grande, en partant gagner sa vie en Angleterre « un des meilleurs endroits du monde, loin des règles de mon père et de celles de l’école », puis en partant étudier en Allemagne, effectuant ainsi le parcours inverse de celui de sa mère vingt ans plus tôt .
Un des intérêts de ce roman autobiographique d’apprentissage est de montrer comment cet adolescent va trouver des initiateurs qui l’aideront à s’ouvrir à son avenir : en particulier le copain Packer, celui « qui donne aux autres une autre identité », et de trouver des modèles auxquels il va s’identifier : l’Allemand Stefan qui a osé frapper son géniteur et rompre avec sa famille, et surtout son grand-père John Hamilton , » ce marin aux yeux doux »auquel le titre renvoie, embarqué sur un navire britannique, considéré par son fils comme un traître à la cause irlandaise et sur lequel se clôt le roman « J’ai endossé l’identité de mon grand-père . Je lui ai rendu son nom et sa vie »
Si ce 2d volet des souvenirs d’enfance de Hugo Hamilton n’a pas la puissance émotionnelle du 1er : SANG IMPUR , il reste prenant par certaines aventures, tantôt dramatiques, tantôt comiques, alternant tendresse et violence . Les digressions sur la période nazie et sur la cause nationaliste irlandaise, même si elles peuvent paraître un peu longues parfois, s’intègrent toujours au récit et ne mettent jamais en péril son unité .
Un récit émouvant où se croisent avec bonheur vécu familial et histoire collective et ayant pour cadre un pays au fort potentiel romanesque : l’Irlande

Alma - - - ans - 8 mai 2008