Mignonne, allons voir...
de Marc Lambron

critiqué par Menon, le 20 février 2007
( - 46 ans)


La note:  étoiles
Le charme discret des vendeuses de Séphora
Quel plaisir de lire ce Mignonne, allons voir… de Marc Lambron : à mi chemin entre le pamphlet et l’essai, ce petit livre plein de légèreté et d’intelligence entend nous faire découvrir Ségolène Royal en discutant la portée de son accession à la course aux présidentielles.

Mais toutefois, attention : Marc Lambron ne livre pas ici une biographie de la candidate au sourire perpétuel. Les recherches de l’auteur portent paradoxalement moins sur la madone de la république que sur ses prédécesseurs. Car, selon Lambron, pour comprendre la singularité de Ségolène, il faut décrypter dans quel climat elle se révèle. Ainsi, nous voilà partis pour un voyage dans le monde de la Gauche et de ses idées politiques : la rouerie de François Mitterrand, son passé de Vichyste, son assurance de Droite ne sont pas tant analysés que resitués dans un récit confinant parfois à l’anecdote sur la forme mais dont le fond ne reste pas moins vrai. Idem pour Lionel Jospin, son trotskysme honteux, son bilan narcissique et son suicide politique de 2002 sont eux aussi appelés à la rescousse.

C’est que Ségolène est un animal politique prenant place dans une Gauche en plein désarroi. A la différence des deux précédent candidats au pouvoir suprême, elle arrive vierge de tout compromis : trop jeune, elle n’a pas eu à rougir de son attitude durant la période de la collaboration, elle n’a pas non plus connu les tourments du communisme, du trotskysme ou du maoïsme. Sa pureté sacerdotale est à l’image de la blancheur de ses dents. Ce qui n’exclut pas un fond trouble de sa personne : cette fille d’officier semble incarner une posture de droite, mais exprimée à gauche. Son attitude de mère cache un comportement autoritaire. Ses sourires de vendeuse de Sephora cachent une attitude virile sans laquelle elle n'aurait pu prendre le pouvoir dans un PS squatté par les Eléphants.

Alors bien sûr, le livre (quelque peu machiste) de Marc Lambron ne résout pas le mystère du personnage, mais en souligne plusieurs points. Il ne permet pas de découvrir mais d’imaginer la nature de Ségolène Royale. Cette lecture fraîche et délicieuse s’adresse néanmoins aux amateurs de la chose politique qui, s’ils ne connaissent pas les tribulations politiques de l’après seconde guerre mondiale et la personnalité de ses dirigeants, risquent de se retrouver face à un jeu de piste bien tortueux : Marc Lambron s’adresse en effet à ceux qui, comme lui, pratiquent le jeu politique avec le double regard du journaliste et du penseur.