L'invention de la laïcité
de René Rémond

critiqué par TELEMAQUE, le 19 février 2007
( - 76 ans)


La note:  étoiles
Du volontarisme.
René REMOND
L’invention de la laïcité française.

« La question religieuse a longtemps pesé sur la vie politique, modelant les mentalités, façonnant aussi les sensibilités et structurant notre culture politique ». Cette présence est aussi ancienne que la Nation.
Par la Loi de 1905, la République a voulu marquer son indépendance à l’égard du religieux qu’elle a rejeté dans la sphère privée. En mettant fin au Concordat qui organisait les rapports de l’Etat avec les Eglises mais leur assurait une place en son sein et dans la société, la République positiviste tranchait le débat idéologique qui l’opposait à l’Eglise catholique laquelle prétendait toujours à l’époque de la promulgation, régenter la société.

Par cette loi la liberté de conscience reconnue par l’art X de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 Août 1789 se trouve garantie par l’Etat, mais la société est préservée de toute ingérence cléricale. La République garantissant le libre exercice des cultes, alors que la déclaration de 1789 se bornait à réduire la croyance religieuse à une opinion individuelle, reconnaît explicitement la dimension collective de toute religion qui en fait un phénomène social.

En l’absence de définition officielle, y a t’il une définition autorisée de la laïcité ? Le mot est absent de la Loi. Il est introduit dans le débat politique lors de la mise en place de l’instruction laïque. La compréhension de la laïcité, « concept philosophique, idéologie politique, et régime juridique », requiert une pluralité d’approches.

C’est cette pluralité que René Rémond, historien, tente de mettre en lumière dans ce livre. Entre la sécularisation du pouvoir politique défendue par nos rois et qui est à l’origine du gallicanisme, et la liberté de conscience qui est l’objet et la « raison d’être de la laïcité » la matière à débat est riche de contradictions.
Dans un premier temps la Loi a aggravé la querelle qu’elle prétendait éteindre lors de la délicate mise en application du transfert des biens ecclésiastiques –notamment des congrégations- mal vécue par les catholiques.
Elle prête à controverses lorsqu’il s’agit d’établir un équilibre entre l’exclusion de toute manifestation du fait religieux dans l’espace social qu’elle défend et le caractère collectif et la dimension sociale du fait religieux. L’affaire du voile islamique est un exemple des controverses possibles : le problème à été réglé par la référence au trouble à l’ordre public, dont le maintien incombe à l’Etat.
L’Islam pose donc un nouveau problème au concept philosophique de laïcité : « est-elle la tolérance de toute coutume au nom du relativisme, ou n’est-elle pas liée à une certaine morale et à un système de valeurs ? »
Au nom du postulat selon lequel « toute religion porte en germe l’intolérance et le fanatisme » faut-il revenir à la politique de défense contre le cléricalisme ? C’est une des questions, mais pas la seule, que pose René Rémond dans ce livre qu’il faut avoir lu pour comprendre toute la complexité d’un débat actuel.