Formications
de Julien Péluchon

critiqué par Lig, le 26 décembre 2006
(Gouesnac'h - 40 ans)


La note:  étoiles
n premier roman novateur et suprenant
"Labies Mondor. Certes, beaucoup l'ont oubliée. Mais John, qui meurt au soleil sur une colline de Normandie, John, lui, s'en souvient. C'était en 1986, au Havre."

Et nous voilà parti pour suivre l'histoire de John, et Labies, de retour en 1986, au lycée. Le jeune garçon acnéique méprisant la société fashion-lycéenne est amoureux de la belle vedette du lycée. Et il veut être le premier à dépuceler "cette poupée dodue". De cette manière, alors peut-être trouvera t-il sa raison d'être.
Mais voilà, nous savons aussi que John va mourir.
Et lui aussi. Il le découvre de manière étrange : un homme sortira des buissons pour lui dire qu'il mourra à 30ans.

Une question intéressante : que feriez-vous dans un pareil cas? Essayer de conjurer le sort en incarnant un autre corps via une carrière de comédien dans une série télévisée bas de gamme, et prier pour que la mort ne vous reconnaisse pas?
Ou Vivre tant bien que mal, au maximum, pendant 10ans?
John tentera ces deux options, l'une après l'autre pour, on le sait tous, finir par mourir, de toute façon.

Dérouté au départ par un style volontairement irrégulier, on se laisse emporter dans cette histoire loin d'être comme les autres, et on se retrouve plongés dans un univers à part entière, étrange car truffé de cynisme, d'ironie, de sérieux et de fatalisme.
On est surpris par des lectures de théories farfelues sur les fourmis, des évènements invraisemblables, des situations cocasses mais à la fois sombres et dures.
On fait face à des réflexions sur la vie et la fatalité d'une pertinence intéressante tout comme on rit pour l'absurdité de la situation ou de la comparaison.

Un extrait qui je le trouve reflète bien l'ensemble du style du bouquin :

"Vous avez deux ans à vivre, et vous ne savez pas quoi faire. Vivre? Il y avait des philosophies publicitaires pour la vie, la promotion de la vie. Embrasser, croquer la vie, à pleines dents. Vivre l'instant présent, émoustillé, le feu aux fesses. Mais c'était chercher l'émotion, chercher le malheur, aller voir ailleurs pour découvrir que tout, le monde entier, est une déception, et que les hommes sont des pourritures ou bien des flaques ou des gourdes vides. Tout ça pour le raconter aux autres, faire l'intéressant et avoir des amis et, parmi ce groupe d'amis, des admiratrices dessillées et, sur la fin, mettre enceinte une femme mûre sans le faire exprès, dire " oh, jm'ai trompé". P171-172

Une originalité d'écriture, pleine de vie et de force.
A lire absolument !