Mes chemins
de Charles Juliet, Francesca Piolot (Autre)

critiqué par Jules, le 25 juillet 2001
(Bruxelles - 79 ans)


La note:  étoiles
L'univers d'un poète
Francesca Piolot mène un assez long entretien avec Charles Juliet. Il est très révélateur de la personnalité de l'écrivain.
Juliet nous parle de son enfance, de la mère qu’il n'a pas connue et aussi de celle qu'il a connue, qui l’a élevé. L'enfant enlevé à sa mère est dans une détresse terrible, dit-il, et il ne peut pas s'en protéger. « Une détresse qui, ne pouvant être pensée, ne peut être maîtrisée » dit-il.
Il aborde aussi la période de l’école à Aix, celle pour « les pupilles de la nation » qui ressemble davantage à une caserne qu'à une école. Pour lui,
les désirs y atteignent une terrible violence « Peut-être ne vit-on jamais autant que lorsqu’on se heurte à des murs »

Juliet nous révèle également que son premier contact avec la littérature s’est fait avec « L’Etranger » Une amie le lui avait prêté : il a été bouleversé ! Il nous dit à quel point il aime Camus, parce qu’il est humain et généreux, et ajoute que son dernier livre « Le premier homme » l’a vraiment retourné ! Il aime aussi beaucoup les « Lettres à un ami allemand »
De Christian Bobin il dit : « J’aime surtout ses premiers livres.
« Souveraineté du vide »,
« L’homme du désastre », « Eloge du rien ». Il nous parle aussi de son amour pour Nikos Kazantzaki et Virginia Woolf. Juliet avait une grande amitié pour l’artiste Bram Van Velde, alors qu'il n’était pas féru de peinture. Il s'était un peu limité à Van Gogh…

Il nous raconte ses doutes sur ses capacités à écrire, la joie que l'écriture lui apporte et nous fait part de ses espoirs d'en apporter aussi aux autres. Ce plaisir d’écrire est toujours mélangé chez lui avec de l'angoisse, beaucoup d’efforts et de travail.
Je terminerai cette critique en le citant quand il parle des jeunes, cela pourrait parfois nous aider à mieux les comprendre : « Je crois que, lorsqu’on est jeune, on est aux prises avec beaucoup de problèmes, de conflits, de blessures, d'impuissances… On est là, à étouffer, on ne peut pas s'exprimer & on ne le saurait pas, d’ailleurs – et personne autour de vous n’est assez attentif pour recevoir ce que vous pourriez dire. Alors on porte tout ça, qui vous étouffe. »
La grande affaire de l'écriture 10 étoiles

Il est parfois bon de se replonger dans certaines lectures. Ces lectures qui vont rassénèrent, celles qui donnent le goût d'explorer, de se chercher. Ce recueil d'entretien en fait partie. A sa façon si simple et humble (ici ce n'est pas une posture, mais bien l'essence de cet être), Charles Juliet nous parle de ses chemins, son histoire, son rapport à l'art, à l'écriture, aux autres.

Alors que le cynisme, l'humour distanciée, la parodie nous encerclent de toute part, cet écrivain, lui, trace une toute autre route. Celle de l'authenticité, du dévoilement, sans chercher à choquer ou s'exhiber, c'est si rare de nos jours...

"Il est certain que tout ce que j'écris, tout ce que je vis est porté par cette aspiration à vivre l'immuable, à vivre l'intemporel, à vivre quelque chose d'infini".

Hieronimus - - 47 ans - 6 octobre 2006