L'immense solitude, avec Friedrich Nietzsche et Cesare Pavese, orphelins sous le ciel de Turin
de Frédéric Pajak

critiqué par Sahkti, le 3 août 2006
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Les silences de l'âme
On pourrait penser que Pavese et Nietzsche on peu de points communs. Il en existe pourtant quelques-uns, notamment une ville et pas n'importe laquelle: Turin. Une ville arpentée par les deux hommes profondément ancrés dans leur détresse et leur solitude.
Pajak explore la face sombre de ces balades mélancoliques tout en se gardant bien de rédiger une quelconque biographie ou un guide géographique ou littéraire. Il manie la plume pour laisser libre cours à son imagination et dessiner sur papier ce que lui inspire la vie des deux hommes et leurs nombreuses pérégrinations solitaires. Basés sur le travail et les écrits de Nietzsche et de Pavese, les légendes accompagnant ses dessins se rapportent tantôt aux hommes tantôt aux monde qui les entoure ou aux événements qui font le monde à un moment précis, comme par exemple le lobe coupé de Van Gogh, autre illustration d'une immense solitude.
La noirceur de certains dessins (due en partie à l'épaisseur du trait dans certains cas) illustre bien, à mes yeux, la désillusion qui s'est emparée tant de Nietzsche que de Pavese à une époque de leur vie. Désillusion, résignation, tristesse, profond abattement, autant d'éléments qui peuvent conduire à l'irréversible, que ce soit la folie ou le suicide. Pajak semble s'être glissé dans chacun d'eux et avoir perçu leurs tourments les plus profonds. De quoi rendre Nietzsche et Pavese encore plus humains et attachants. Un beau livre, assurément, esthétiquement et humainement.