Le livre de Judas
de Nicolas Grimaldi

critiqué par Sahkti, le 12 juin 2006
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Entre méchanceté et trahison
"D'où vient la méchanceté dans l'homme? D'où vient qu'on puisse désirer comme un bien le mal qu'on fait subir aux autres indépendamment même de tout intérêt qu'on en puisse retirer?"

Pourquoi Judas a-t-il trahi Jésus? Voici sans doute une des questions les plus fréquemment posées. On a invoqué toutes sortes de raisons pour tenter d'ébaucher ne serait ce que l'esquisse d'une réponse satisfaisante. Nicolas Grimaldi a tout passé en revue mais rien ne le convainc. Pour lui, aucune justification ne peut lui enlever de l'esprit qu'il existe fondamentalement en l'Homme une notion de méchanceté, indépendante de toute motivation ou de tout intérêt. Et on a beau tenter de justifier, expliquer, argumenter tout ce que l'on veut, la méchanceté à l'état pur dénuée de tout intérêt, elle existe et existera toujours et c'est à elle qu'on doit pas mal de drames et d'horreurs de l'Histoire.

Au-delà de cette thèse universelle, Grimaldi se penche sur le personnage de Judas, à travers les textes et l'Histoire. Tout est passé au crible, des motivations aux conséquences, avec ce que Judas savait, pensait, ressentait, craignait ou imaginait. De quoi se rendre compte que rien n'est simple ni limpide, beaucoup d'éléments s'entrecroisent et l'Evangile de Judas récemment traduit n'arrange pas vraiment les choses. (à ce propos, des fragments de cet Evangile sont exposés à la Fondation Bodmer à Genève, c'est à voir!)

L'étude de Nicolas Grimaldi est on ne peut plus intéressante et a le mérite de faire le tour de la question de manière accessible et complète, en utilisant la plupart des documents existants et en ébauchant diverses hypothèses qui se valent toutes. Le but de Grimaldi n'est pas de fournir LA réponse mais de démontrer à quel point, en chacun de nous, sommeille un petit Judas qui se réveille selon les circonstances. Une étude que j'ai aimé parcourir pour les nombreuses questions qu'elle suscite et cette remise en question qu'elle provoque. Parce que dans la tête de Judas, personne n'y était et il faut pouvoir comprendre avant de se permettre de juger.