Fuir les forêts
de Fabrice Gabriel

critiqué par Feint, le 26 mars 2006
( - 60 ans)


La note:  étoiles
Les ombres du passé
Je viens de terminer le livre de Fabrice Gabriel, sur la couverture duquel l’éditeur a éprouvé le besoin de mentionner « roman ». Comme beaucoup d’autres, ce livre se passerait facilement de cette fausse précision. Il s’agit plutôt d’un « récit » allusif et fragmentaire, résolument non linéaire, dont la composition (et parfois le contenu) évoque davantage la peinture qu’un genre narratif. L’approche est plutôt mystérieuse, le narrateur semble ne pas vraiment vouloir (ne pas vraiment oser) dire les choses – c’est là quelque chose qui, personnellement, me touche. C’est qu’il y a une fuite en effet, désirée et redoutée, loin des origines. L’arrachement du personnage à sa région d’autrefois, frontalière de l’Allemagne omniprésente, son voyage vers l’« ouest » (Paris) apparaît comme une perte de l’identité, une identité ancrée dans un paysage familial aux figures aujourd’hui défuntes – parmi lesquelles émerge de manière récurrente celle du frère disparu, ombre du protagoniste discrètement persistante. Un arrachement géographique qui est aussi un autre moyen de figurer le temps qui passe.