La pierre, la feuille et les ciseaux
de Henri Troyat

critiqué par Dirlandaise, le 11 décembre 2005
(Québec - 68 ans)


La note:  étoiles
Un étrange trio
André est un peintre de trente-cinq ans, résidant à Paris. Lors d'un voyage pour remplacer un ami malade, il fait la connaissance d'un jeune homme mystérieux, Frédéric. De retour à Paris, André voit Frédéric débarquer dans son appartement et s'installer avec arrogance et sans-gène, comme si tout lui était du. André ne tarde pas à tomber amoureux de ce jeune homme cynique et d'une beauté à couper le souffle. Mais bientôt, Frédéric rencontre Sabine, la meilleure amie d' André, et fait d'elle sa maîtresse. Dès lors, le trio cohabite dans le logement d'André et s'accommode tant bien que mal de l'étroitesse des lieux. Sabine ne tarde pas à tomber enceinte de Frédéric, rebaptisé Aurélio par André car ce prénom lui va à merveille. À la naissance de Léon, Aurélio se révèle un père distant et indifférent. Il accepte un emploi aux États-Unis et part en voyage pour plusieurs mois. Sabine ne peut compter que sur André pour l'aider avec le petit Léon. André est attentionné et responsable. Il s'occupe du bébé comme si c'était le sien. Il est tendre et affectueux. Sabine, laissée seule par Aurélio, s'éprend de William, un homme d'affaires bien nanti. Le mariage est prévu dans une semaine lorsque Aurélio, de retour de New York, refait surface et reprend Sabine. Le mariage est annulé. Sabine accepte de suivre son ancien amant jusqu'à New York, laissant le petit Léon au soin d'André. Mais, le bonheur pour elle sera de courte durée...
Je n'en dit pas plus mais je recommande la lecture de ce court roman à ceux qui aiment les situations ambigues et les personnages complexes. Troyat est d'ailleurs passé maître dans ce domaine. Son écriture est claire et sobre. Je ne suis jamais déçue quand je lis un de ses livres. Certains passages sont absolument magnifiques :
" À quoi tenait cette impression d'être à la fois sans voisins immédiats et au même niveau que la terre ? Peut-être à la présence des quatre chattes. Elles vinrent vers André, en procession silencieuse."
"André et Constantin se coincèrent de biais contre le bastion du bar. Des visages de connaissance passaient dans leurs eaux avec des lenteurs de méduses."
"La cendre de sa cigarette se détacha et tomba sur le drap. Il chassa d'un souffle le petit rouleau de poudre grise."
Ah Troyat ! Quel grand écrivain. C'est une vrai drogue pour moi que de le lire. Chacun de ses livres est un véritable enchantement. Quel belle écriture et quelle finesse d'analyse. Et les petits détails qu'il nous livre comme la procession des chattes et le petit rouleau de cendre grise. Je les vois aussi nettement que s'ils étaient réels. C'est ça, un grand écrivain !
Ce n'est pas le meilleur Troyat que j'ai lu mais j'ai bien apprécié cette histoire.