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Décor de jardin à la campagne. Au premier plan, une piscine autoportée ronde, un peu dégonflée. Derrière, une maison étroite en brique rouge, une porte en bois, une fenêtre au rez-de-chaussée, l’autre à l’étage. De rares fleurs fanées sur les plates-bandes devant la maison. A droite de la maison, une haie de thuyas taillés à 1m40 de hauteur.
Un homme sort par la porte de la maison. Il est vêtu d’un maillot de bain bleu marine en nylon, a une serviette colorée sur l’épaule et une bière décapsulée à la main. Il pose la serviette sur le rebord de la piscine, rentre précautionneusement dans l’eau peu profonde et s’allonge en s’agrippant d’un bras au boudin du bord, son autre main tenant la bière.
L’HOMME : Ah qu’on est bien. Ah qu’elle est bonne. Ah si y savait ! Toute l’après-midi je lui dis de sortir, et y bouge pas. Huit semaines qu’il a pas mis le pied dans la piscine qu’on lui avait acheté. Toujours collé à son ordi, et vas-y que ça accumule des ressources, que ça construit des châteaux, que ça enrôle des peuples pour la guerre. Moi jui rabâche que l’eau elle stagne, qu’y a que les corneilles qu’en profitent pour se baigner, que bientôt les boudins seront foutus, mais y m’écoute pas. Y jette jamais un œil dehors, ce môme, jamais. Dans trois ans, son champ de vision, ce sera 30 centimètres : rien que son écran, et pis après tout flou. Y pourrait y avoir des dinosaures qui viendraient brouter les fleurs, y saurait même pas.
Il jette un œil aux fleurs fanées derrière lui.
L’HOMME : En même temps je vois pas ce qu’y boufferaient les dinos. Plus de potager. Trois pôv fleurs crevées. Ah ça ! Ca va vite, hein. On est quoi là ? Fin juillet. Ca fait quoi, deux mois alors.
Il boit quatre longues goulées de bière.
L’HOMME : Deux mois, c’est rien, rien de rien. A l’échelle d’une vie, pfff, c’est un quoi, un centième ? Si on prend la maison, par exemple, si on regarde ce que c’est deux mois à l’échelle de la vie d’cette maison, c’est pire ! Elle date de 1923 la maison, alors les deux mois, là, elle doit bien rire ! Pour elle c’est même pas un clin d’œil ! 1923 ! El’va avoir un siècle avant même que le gosse y voit plus les dinos dans le jardin ! Deux mois… et tout ça pour un vaccin ! Si encore elle était partie pour une bonne raison, j’pourrais comprendre. Mais partir pour un truc qui s’voit pas, qui s’sent pas, non ça je peux pas lui pardonner.
Une femme passe rapidement derrière la haie, on voit le haut de son buste, sa tête, et le carton d’une pancarte.
L’HOMME : Et voilà, quand on parle du loup. Ca pour se manifester, elle se manifeste. Tous les jours une pancarte plus grande. Chuis sûr que de l’autre main elle trimballe son porte-voix, ça va y aller sur la place. Ah les beaux discours. Et la liberté de choix, et la libre détermination, avec les violons dans la voix. Et ma liberté de choix à moi, hein ! Rien à secouer, du jour que je lui ai dit bon chérie je suis allé prendre le vaccin pour continuer à visiter maman le dimanche, fini, plus rien voulu entendre. La liberté c’est toujours quand ça arrange qu’on la brandit. Et maintenant le petit futé là-haut devant son ordi il a plus que ce mot là à la bouche lui aussi ! Liberté, liberté chérie. Ben chérie elle est partie, depuis le mioche constamment il est rivé à son ordi, et moi si ça dure deux mois de plus, j’vais couler, complet. T’façon, si j’me noyais ici, même de suite, personne remarquerait. Elle, elle gueule contre le vax’ à sa manif’, et lui plus ça empire, plus il pense qu’à son empire.
La fenêtre du haut s’ouvre. Une tête d’enfant apparait. Le jeune garçon tient à la main une sarbacane, qu’il porte ensuite à sa bouche. Concentré, il la dirige vers la piscine où l’homme est allongé, la tête bien hors de l’eau, en train de finir sa bière.
Un homme sort par la porte de la maison. Il est vêtu d’un maillot de bain bleu marine en nylon, a une serviette colorée sur l’épaule et une bière décapsulée à la main. Il pose la serviette sur le rebord de la piscine, rentre précautionneusement dans l’eau peu profonde et s’allonge en s’agrippant d’un bras au boudin du bord, son autre main tenant la bière.
L’HOMME : Ah qu’on est bien. Ah qu’elle est bonne. Ah si y savait ! Toute l’après-midi je lui dis de sortir, et y bouge pas. Huit semaines qu’il a pas mis le pied dans la piscine qu’on lui avait acheté. Toujours collé à son ordi, et vas-y que ça accumule des ressources, que ça construit des châteaux, que ça enrôle des peuples pour la guerre. Moi jui rabâche que l’eau elle stagne, qu’y a que les corneilles qu’en profitent pour se baigner, que bientôt les boudins seront foutus, mais y m’écoute pas. Y jette jamais un œil dehors, ce môme, jamais. Dans trois ans, son champ de vision, ce sera 30 centimètres : rien que son écran, et pis après tout flou. Y pourrait y avoir des dinosaures qui viendraient brouter les fleurs, y saurait même pas.
Il jette un œil aux fleurs fanées derrière lui.
L’HOMME : En même temps je vois pas ce qu’y boufferaient les dinos. Plus de potager. Trois pôv fleurs crevées. Ah ça ! Ca va vite, hein. On est quoi là ? Fin juillet. Ca fait quoi, deux mois alors.
Il boit quatre longues goulées de bière.
L’HOMME : Deux mois, c’est rien, rien de rien. A l’échelle d’une vie, pfff, c’est un quoi, un centième ? Si on prend la maison, par exemple, si on regarde ce que c’est deux mois à l’échelle de la vie d’cette maison, c’est pire ! Elle date de 1923 la maison, alors les deux mois, là, elle doit bien rire ! Pour elle c’est même pas un clin d’œil ! 1923 ! El’va avoir un siècle avant même que le gosse y voit plus les dinos dans le jardin ! Deux mois… et tout ça pour un vaccin ! Si encore elle était partie pour une bonne raison, j’pourrais comprendre. Mais partir pour un truc qui s’voit pas, qui s’sent pas, non ça je peux pas lui pardonner.
Une femme passe rapidement derrière la haie, on voit le haut de son buste, sa tête, et le carton d’une pancarte.
L’HOMME : Et voilà, quand on parle du loup. Ca pour se manifester, elle se manifeste. Tous les jours une pancarte plus grande. Chuis sûr que de l’autre main elle trimballe son porte-voix, ça va y aller sur la place. Ah les beaux discours. Et la liberté de choix, et la libre détermination, avec les violons dans la voix. Et ma liberté de choix à moi, hein ! Rien à secouer, du jour que je lui ai dit bon chérie je suis allé prendre le vaccin pour continuer à visiter maman le dimanche, fini, plus rien voulu entendre. La liberté c’est toujours quand ça arrange qu’on la brandit. Et maintenant le petit futé là-haut devant son ordi il a plus que ce mot là à la bouche lui aussi ! Liberté, liberté chérie. Ben chérie elle est partie, depuis le mioche constamment il est rivé à son ordi, et moi si ça dure deux mois de plus, j’vais couler, complet. T’façon, si j’me noyais ici, même de suite, personne remarquerait. Elle, elle gueule contre le vax’ à sa manif’, et lui plus ça empire, plus il pense qu’à son empire.
La fenêtre du haut s’ouvre. Une tête d’enfant apparait. Le jeune garçon tient à la main une sarbacane, qu’il porte ensuite à sa bouche. Concentré, il la dirige vers la piscine où l’homme est allongé, la tête bien hors de l’eau, en train de finir sa bière.
Ben, du théâtre, maintenant ! Bien, cette idée de donner 1923 comme date de la maison, alors que l'action se passe de nos jours. Et l’actualité refait surface, finalement ! l'ensemble tient debout !
Aïe aïe aïe ... Ca va mal finir cette affaire. Ce n'est pas un dino qu'il va se taper le fondu de l'écran mais la tête à Papa.
Des envies de théâtre, Lobe ? C'est bien réalisé en tout cas, c'est visuel et parlant.
Il y a bien, bien longtemps on avait fait un appel à textes (donc pas en direct) mode théâtre. C'avait été amusant. On pourrait y penser une fois ...
Alors il va renverser sa bière dans la piscine, c'est dégoutant. Moi je n'aime pas la bière et je ne vais sûrement pas aller me baigner dans sa piscine. Non, non, inutile d'insister ...
Cette idée de sarbacane fait des ravages. En fait c'est ce titre qu'aurait dû porter notre exo ; "Sarbacane".
Des envies de théâtre, Lobe ? C'est bien réalisé en tout cas, c'est visuel et parlant.
Il y a bien, bien longtemps on avait fait un appel à textes (donc pas en direct) mode théâtre. C'avait été amusant. On pourrait y penser une fois ...
Alors il va renverser sa bière dans la piscine, c'est dégoutant. Moi je n'aime pas la bière et je ne vais sûrement pas aller me baigner dans sa piscine. Non, non, inutile d'insister ...
Cette idée de sarbacane fait des ravages. En fait c'est ce titre qu'aurait dû porter notre exo ; "Sarbacane".
Visuel, bien exposé. J'aurai jamais pensé que tu aurais choisi ce thème ! -:)
C'est un côté grinçant qui n'est pas habituel chez toi, ainsi que ce côté théâtre...al. C'est rudement bien fait, ça m'a fait penser à un Chabrol surtout par son final :-). Surprenant donc, et la sarbacane là ,va faire de vrais dégâts...Salutaires ? Aïe
C'est un côté grinçant qui n'est pas habituel chez toi, ainsi que ce côté théâtre...al. C'est rudement bien fait, ça m'a fait penser à un Chabrol surtout par son final :-). Surprenant donc, et la sarbacane là ,va faire de vrais dégâts...Salutaires ? Aïe
En quelques lignes on est plongé dans le concret, je veut dire qu’il y a cet effet réaliste avec plein de détails comme si quelqu’un nous racontait sa journée de façon détaillée.
Ensuite pour le sujet j’ai été un peu perdu.
En me penchant plus il y a cet enfant enfermé devant l’écran de son monde virtuel, un daron(?) qui traînasse dans un piscine en maugréant jusqu’au dinosaure qui broute les fleurs et une activiste qui ne fait que passer façon ombre dans le fond et s’intéresse plus au reste du monde qu’à ses proches.
Ce qui me plaît le plus c’est la fin ouverte, le mouvement donc le changement, amorcé mais pas conclus.
L’HOMME regrettera t’il que l’enfant ai quitté son écran pour la fenêtre, la prophétie va t’elle se réaliser: « si ça dure deux mois de plus, j’vais couler », l’ombre à la pancarte reviendra t’elle sauver le baigneur en péril...ou pas?
Comme au théâtre façon farce bouffonne donc, chacun le beauf et/ou l’incompris de l’autre et l'acte suivant sera révélateur.
Mine de rien une sorte d’instantané de nos jours?
Ensuite pour le sujet j’ai été un peu perdu.
En me penchant plus il y a cet enfant enfermé devant l’écran de son monde virtuel, un daron(?) qui traînasse dans un piscine en maugréant jusqu’au dinosaure qui broute les fleurs et une activiste qui ne fait que passer façon ombre dans le fond et s’intéresse plus au reste du monde qu’à ses proches.
Ce qui me plaît le plus c’est la fin ouverte, le mouvement donc le changement, amorcé mais pas conclus.
L’HOMME regrettera t’il que l’enfant ai quitté son écran pour la fenêtre, la prophétie va t’elle se réaliser: « si ça dure deux mois de plus, j’vais couler », l’ombre à la pancarte reviendra t’elle sauver le baigneur en péril...ou pas?
Comme au théâtre façon farce bouffonne donc, chacun le beauf et/ou l’incompris de l’autre et l'acte suivant sera révélateur.
Mine de rien une sorte d’instantané de nos jours?
oups... j'ai dû relire à deux fois pour savoir qui était qui et qui faisait quoi et qui pensait quoi... et j'ai trouvé : le père croit au vaccin, enfin pour pouvoir visiter sa mère.. et sa femme manifeste contre.. et son fils aussi mais de manière virtuelle collé contre son écran
et pendant ce temps là, la nature dégringole dans la maison.. plus personne ne s'en occupe..
Oups, vilaine époque que celle-ci où on ne s'occupe plus de l'essentiel, la nature..
Bien enlevé Lobe, mais peu d'espoir pour les jeunes ? Ou bien c'est une goutte d'eau dans l'océan de la vie ?comme tu dis , une maison d'un siècle toujours debout et un centième de temps qui passe..
et pendant ce temps là, la nature dégringole dans la maison.. plus personne ne s'en occupe..
Oups, vilaine époque que celle-ci où on ne s'occupe plus de l'essentiel, la nature..
Bien enlevé Lobe, mais peu d'espoir pour les jeunes ? Ou bien c'est une goutte d'eau dans l'océan de la vie ?comme tu dis , une maison d'un siècle toujours debout et un centième de temps qui passe..
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