Septularisen

avatar 03/04/2020 @ 23:05:47
Et pourtant ce jour-là, les choses allaient changer, et beaucoup plus vite que Jean-René pouvait se l’imaginer, et plus rien n’allait être comme avant... Il le comprit tout de suite quand il vit arriver de très loin la longue, très longue suite de véhicules aux vitres fumées, escortées par des véhicules blindés de l’armée. On se serait cru dans un film américain, sauf que là on n’était pas en Amérique et ce n’était pas un film…

Le temps que Jean-René finisse sa réflexion, ils investissaient déjà la petite place centrale du village. Crissement de pneus, débarquement, mise en place de matériel… Bougre, ils ne perdaient pas de temps ceux-là !

Jean-René descendit les quelques marches qui le séparaient de la placette. Voilà d’ailleurs que Germaine et Fernand arrivaient aussi, attirés sans doute par tout ce vacarme. Les personnes qui étaient descendues des véhicules, étaient presque tous des hommes et tous avaient une drôle de blouse blanche, on aurait dit des scientifiques, tout droit sortis de leur laboratoire. Mais il y avait aussi les autres, les militaires, facilement reconnaissables à leur treillis et à leurs armes…

Ils ne prêtaient aucune attention aux habitants du village, Tiens d’ailleurs Jean-René remarque du coin de l’œil que même Jean-Pierre et Aline étaient là aussi maintenant, tous avec des regards interloqués, tous se demandaient ce qu’il se passait ? Jean-René entendit un des hommes en blouse blanche dire à un de ses collègues : «Pas de doute à avoir, c’est bien l’expérience 626 qui est dans cette forêt, juste à côté de nous ».

Finalement, un militaire se dirigea vers eux. Jean-René ne put s’empêcher de remarquer que c’était une femme… Une très belle femme d’ailleurs, si l’on s’en remettait à ses goûts, blonde aux yeux bleus, la quarantaine. Elle se présenta :
- « Lieutenant Baloine, ceci est une opération militaire. Il n’y a aucun danger, mais pour votre propre sécurité, il vaut mieux que vous rentriez tout de suite chez vous !».

Jean-René voulut lui répondre, mais déjà un haut-parleur, sorti d’on ne sais où, diffusait le message suivant : Ceci est une opération militaire, tous les civils sont priés de rester chez eux ! Restez chez vous !».

Déjà Germaine et Fernand faisaient demi-tour, se dirigeant vers leur petite maison en pierre. Jean Pierre et Aline avaient eux déjà disparu de la circulation ! Bougre, il n’allait pas se laisser faire quand même ! Pas lui ! Il protesta vigoureusement !
- Écoutez Madame, vous allez me dire ce qu’ils se passe, ici…
- Non ! L’interrompit-elle. Encore une fois, rentrez et restez chez vous, ou bien je vous fais raccompagner par deux hommes armés !

Diantre se dit-il, voilà bien des années, qu’aucune femme ne lui avait parlé comme cela !
Non de non ! Quelle femme, quel panache ! Maugréât-il entre se dents… Ah ! S’il avait eu quarante ans de moins ! Tiens, il aurait commencé par lui demander son 06… Mais, se dit-il ça n’existait pas les 06 il y a quarante ans !

Pendant ce temps sur la placette les choses allaient bon train, il y avait même maintenant une petite tente blanche, juste au milieu, là ou d’habitude la seule chose visible était la petite fontaine, de couleur rose, mangée depuis des années par des longues algues vertes. Les hommes en blouse blanche courraient et s’affairaient dans tous les sens, et Jean-René dont la curiosité ne faisait que croître exponentiellement et qui ne pouvait rien faire…

Mais si ! Il suffisait d’ouvrir la fenêtre de sa cuisine pour entendre et voir sans aucun problème tout ce qui se disait juste en dessous, sur la petite placette. Aussitôt dit, aussitôt fait ! Un des scientifiques s’affairait autour de ce qui semblait être une sorte d’antenne parabolique comme celles pour capter les programmes de la télévision.

- Vite, dit-il dans un peu moins de 12 minutes ils auront fini leur travail et ils repartiront, on doit réussir à capter leur fréquence et à les attirer…

Mais de quoi diable étaient-ils en train de parler, ces bougres ? Mais qu’est-ce qui se passait ici, enfin ?

- Oui dit un autre, ne t’inquiète pas, on va y arriver ! Heureusement que l’on nous a prévenu qu’ils étaient ici.

Donc, malgré les bonnes résolutions prises à l’apéro, quelqu’un du village avait cafté ! On n’y reprendrais pas de sitôt le Jean-René à faire confiance au gens !

- Ça y est, ça y est cria une voix ! On les tient ! Et cette fois pas question qu’ils nous échappent encore une fois, eihn !

N’y tenant plus, Jean-René faillit ressortir de chez lui et revenir à la charge auprès du Lieutenant, mais sa curiosité l’emporta. Il continua à regarder. L’équipement des scientifiques, une sorte de grosse radio de campagne, émettait maintenant une sorte de sifflement, une sorte de musique, un son très doux, un peu comme celui du vent qui passe dans l’entrebâillement d’une fenêtre. Elle se répercutait dans les environs au moyen du même haut-parleur qu’avant et était douce et apaisante…
Par contre le bruit des pics contre les troncs d’arbre lui avait mystérieusement disparu…
Bizarre pensa-t-il.

Et quelle ne fût pas sa surprise quand il vit les pics venir un a un en volant tout doucement, vers le centre du village et se poser tranquillement sur le rebord de la petite fontaine. Incroyable ! C’était comme si les pics obéissaient à des ordres. Incroyable vous dis-je !
Ils étaient tous là, sagement alignés, comme de braves petits soldats…

Mais attends, d’ailleurs, il n’y en avait pas dix comme tout le monde le croyais ! Jean-René en compta bien douze !

Puis tout alla très vite ! Ils mirent chacun des douze pics, un a un, dans une sorte de petit sarcophage de verre transparent et ensuite dans le coffre d’une voiture. Puis soulevant un petit nuage de poussière ils repartirent du petit village, par la même route par laquelle ils étaient arrivés moins d’une heure plus tôt! Ni vu, ni connu ! Comme il ne s’était jamais rien passé !

Jean-René ne compris jamais ce qui s’était réellement passé ce jour-là dans leur petit village. Peu à peu les choses s’estompèrent et finalement toute l’histoire n’était plus qu’un vague souvenir que les habitants du village ressassaient sans fin lors de leurs apéros, et racontaient le soir à leurs petits-enfants pour les endormir …

Même Jean-René, l’âge venant sérieusement, commençait à se demander si la jeune et jolie Lieutenant Baloine, qui lui avait fait si forte impression à l’époque, n’était pas le fruit de son imagination…
Mais, quel ne fût pas sa surprise un matin, - alors qu’il s’était assis sur le bord de la petite fontaine au centre du petit village pour se reposer -, en ouvrant le quotidien qu’il lisait depuis maintenant tant d’années, de lire que selon des sources non autorisées et voulant rester très discrètes, l’armée française développait des robots munis d’une intelligence artificielle, ayant l’aspect et le comportement d’oiseaux tout à fait normaux, comme des merles ou des pics, pouvant se déplacer en volant sur des centaines de kilomètres et pouvant tout à fait passer pour des vrais oiseaux… Tout cela pour suivre ou espionner un éventuel ennemi…

Bougre souffla Jean-René !

Germaine ! Fernand ! cria-t-il… Venez un peu voir ça !...

Nathafi
avatar 04/04/2020 @ 10:30:09
Énigme scientifique et militaire ! Façon drone déguisé, c'est une belle idée ! Là on se dit que, pourquoi pas ? Ton texte est très bien développé Septu, bravo et merci d'avoir participé !

Martin1

avatar 04/04/2020 @ 10:37:20
Ainsi c'était bien l'armée qui préparait de nouveaux drones de surveillance d'un genre nouveau.
Texte sympathique, aéré et qui fait appel à ce sentiment étrange qu'est l'incertitude de la réalité de nos souvenirs.
J'ai apprécié l'idée de la fréquence des coups de bec qui est en fait un moyen de les contrôler et de les attirer!
Original, merci Septu !

Evaetjean
avatar 04/04/2020 @ 12:40:46
"Diantre se dit-il, voilà bien des années, qu’aucune femme ne lui avait parlé comme cela !
Non de non ! Quelle femme, quel panache ! Maugréât-il entre se dents… Ah ! S’il avait eu quarante ans de moins ! Tiens, il aurait commencé par lui demander son 06… Mais, se dit-il ça n’existait pas les 06 il y a quarante ans !" Excellent !! Un peu filou le Jean-René ;)

Il eut été dommage que tu ne participes pas ! Super idée que celle ci. J'ai tout lu d'une traite trop curieuse de savoir sur quoi aller bien pouvoir débouché cette arrivée de l'armée. Tout en douceur au final ! J'ai eu un peu peur pour ces oiseaux au contact avec l'armée mais me voilà rassurée surtout qu'ils sont donc des petits robots de surveillance !

Merci Septularisen

Darius
avatar 04/04/2020 @ 14:31:10
Invcroyable ton texte... en plein dans la science fiction, celle qui est à nos portes avec une technologie qu'on utilise déjà...
Bravo en tout cas, et ce suspense.. qu'est ce que je suis contente que ces oiseaux étaient en fait des faux... j'ai crains un moment qu'on n'enlève des animaux vivants pour les faire disparaitre..

Pour moi, le meilleur texte.. mais je serai bien incapble d'en faire autant n'étant pas née avec cette nouvelle technologie..

Cyclo
avatar 04/04/2020 @ 14:42:49
Et voilà, on est dans les expérimentations scientifiques dignes ,d'un HG Wells et autres auteurs de SF. En tout cas, c'est bien enlevé et on y croit. Pauvre Jean-René, il aura pas eu la touche avec la lieutenante : trop tard pour lui, il est né trop tôt !

Tistou 07/04/2020 @ 16:45:41
Brillante idée très bien développée. Ainsi c'était l'armée qui était dans le coup ? Je m'en doutais ! Je ne voulais rien dire mais ...
Nous sommes aux portes de la S.F., la branche "pic-vert" de la S.F.. Pas la plus connue !
Toi aussi tu m'as paru inspiré, camarade Septu. Et c'est une bonne surprise que tu te sois joint à nous in fine !
Bon mais, bien sûr, c'est une version alternative. Pas la vraie de vraie ...

Magicite
avatar 07/04/2020 @ 18:57:43
Super thème et super idées. J'y avait pensé à des oiseaux robots(plusieurs fois, et des oiseaux extra-terrestres aussi) mais en mal de savoir comment je pourrais les tourner
L'ambiance est bien rendue sans que c soit pesant à lire.
Cela pourrais même être une conclusion, sauf que non et tant mieux si quelqu'un à ouvert la cage aux oiseaux artificiels.

Pieronnelle

avatar 12/04/2020 @ 12:38:02
Oh j'ai failli t'oublier Septu, excuse moi ! Et cela aurait eté bien dommage ! Une vraie version alternative du début à la fin , vraiment bien trouvée et qui se lit d'une traite. L'arrivée au centre du village est trés bien décrite , on ressent le même étonnement de Jean René , on le voit à sa fenêtre. On est persuadé qu'on va savoir et non paf va falloir attendre. On ne s'y attend pas c'est super ! Tu racontes bien...Merci de nous avoir rejoints !

Garance62
avatar 13/04/2020 @ 21:10:11
Eh bien, si je m'y attendais... ainsi l'armée a le contrôle... brrr ça fait froid dans le dos au début mais tout finit par rentrer dans l'ordre. Ouf... Belle imagination Septularisen ! J'ai lu ton texte d'un trait, j'avais hâte de savoir ahah et ça c'est bon signe pour moi !

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