AmauryWatremez

avatar 14/11/2017 @ 09:58:51
J'ai rencontré Myriam grâce aux réseau dits sociaux. J'étais persuadé à l'époque, il y a cinq ans, que cela n'arriverait jamais. Myriam avait été modèle dans les années 80 et elle avait laissé des photos d'elle sur son profil. C'est il faut bien le dire ce qui me motiva un peu plus quand je lui laissais mon numéro de téléphone. Après tout la vie vaut bien la peine d'être vécue en appréciant chaque moment.

J'entendis au bout du fil une voix chaude, vibrante, d'une extrême sensibilité. Nous avons parlé deux heures et convenu de nous rencontrer un peu plus tard. Elle m'avoua avoir apprécié ce que j'écrivais bien qu'un peu caustique.

Elle habitait une petite ville de province. Tout d'abord je ne la reconnus pas derrière un accoutrement très excentrique et d'énormes lunettes de soleil lui mangeant la moitié du visage. Puis je fus malgré tout instantanément séduit. Malgré ses blessures plus qu'apparentes, malgré sa folie la faisant osciller entre l'enthousiasme extrême et la déprime la plus noire. Elle prit les choses en main pour mon écriture, mon style et ma santé.

Le soir, d'un air autoritaire, elle me fit allonger, me prenant ma tension (je n'avais pas le droit de parler, je prenais un malin plaisir à le faire me faisant interrompre d'un "chut" doux mais ferme). Je me fis enguirlander : " Des phrases trop longues, Amaury, ça ne va pas du tout, trop de qui, que, que, quoi, il faut absolument y remédier". Elle me confia un drame qu'elle avait vécu, une tragédie telle que peu aurait pu y survivre.

Mais à l'écouter, une telle personne, si présente, si ardente, ne pouvait être si marquée.

Quand je la quittais, j'inscrivis dans l'agenda qu'elle m'offrit que c'était le premier jour du reste de ma vie, et c'était vrai.

Nous nous revîmes un peu plus tard à Paris, pique niquant sous une pluie battante dans l'encoignure d'une porte avenue de l'Opéra. Nous étions comme deux enfants. Et je dus partir à Toulouse, mais je savais que je pouvais compter sur elle, sur ses conseils. Je me faisais régulièrement disputer sec mais je ne lui en tenais pas rigueur car c'était Myriam, elle était ainsi. Et puis un jour j'en eus assez et je le lui dis.

Je rompis tout contact.

Je n'entendis plus parler d'elle que de manière lointaine. Et puis un jour on m'envoya une photo d'elle à l'hôpital. La nuit l'avait rattrapée. Elle ouvrit la fenêtre de sa chambre au cinquième étage et un bref instant eût sans doute l'impression de s'envoler...

...La nuit ne me rattrapa pas. Mais souvent, quand j'ai envie de me laisser aller à l'aigreur, à l'acédie, j'entends sa voix me gourmander, j'entends son rire.

Pieronnelle

avatar 14/11/2017 @ 12:36:50
Très beau et touchant Amaury, bouleversant car le style rapide, comme je l'aime, est comme le signe d'une urgence à dire, à se confier, d'une façon pudique aussi, chargée de plein de sentiments encore non avoués et enfouis. Ecrire délivre des moments douloureux tout en les faisant renaître pour quelques instants, ne serait-ce que pour ne pas les oublier. Quand j'ai proposé sur une impulsion non calculée ce théme sur les bons et mauvais souvenirs j'avais conscience cependant qu'il remuerait beaucoup de choses en chacun de nous, des drames, des beaux moments, et que CL ait permis que nous les partagions est un cadeau...
Je trouve que ce texte que tu nous fait partager est encore plus dans le thème proposé et je te remercie de nous faire connaître cet aspect de ta personnalité.

Tistou 15/11/2017 @ 23:21:16
C'est carrément une confession là, Amaury. Tu avais à peine effleuré ce sujet dans un post de ton dernier texte. Là c'est comme si les bondes avaient lâché et que ces propos devaient absolument sortir.
Reçu. 5 sur 5. Je ne sais pas si je saurais être aussi "cash". Probablement pas.

AmauryWatremez

avatar 16/11/2017 @ 09:16:12
J'avais déjà fait une note dans le genre sur mon blog.
Quand j'écris je ne sais jamais faire autrement que m'engager

Lobe
avatar 19/11/2017 @ 12:38:01
Oui Piero, c'est vrai que ce thème que tu as suggéré rendait possible de s'écrire, de façon plus ou moins assumée (ma nostalgique Louise, elle l'est plutôt moins, pourtant...).
Ici assumé,, ça l'est, et c'est vraiment touchant, entre le très solaire et le très sombre. Un bel art de l'ellipse, aussi : "Et puis un jour j'en eus assez et je le lui dis."

Evaetjean
avatar 21/11/2017 @ 17:23:53
Un texte poignant Amaury. Les mots me manquent alors je resterai sur "poignant" et "merci".

AmauryWatremez

avatar 30/11/2017 @ 15:08:26
Je vous en prie...
Comme j'ai dit je ne sais pas faire sans m'engager

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