Totem
de David Morrell

critiqué par Mr Blue, le 9 octobre 2000
(Lasne - 50 ans)


La note:  étoiles
Un roman raté qui aurait pu être un excellent thriller
Potter’s Field, c'est une petite ville perdue dans les montagnes Rocheuses.
L’élevage y est leur première richesse. C’est là que Slaughter dirige la police. Ancien flic de Detroit, il a fui la ville et s’est enterré dans ce bled, poursuivi par les fantômes de sa vie passée qu'il essaye d'exorciser. Il y a aussi Dunlap, journaliste à la dérive, ravagé par l'alcool, en quête d’un moyen de se débarrasser de son vice. Et puis, il y a une étrange épidémie qui touche bétail, animaux sauvages et bientôt la population même de cette ville calme. De cette épidémie, on ne sait rien, mais on se souvient d'une communauté hippie qui, vingt ans auparavant, a créé un drame dansl a région. Y aurait-il un rapport entre les deux affaires ?
David Morrell est sans conteste un bon écrivain et un maître du suspense. Ancien professeur de littérature américaine, créateur dans son roman First blood du personnage de Rambo, il n'est certes pas un débutant. Il est l’auteur de plusieurs best-sellers et d’une belle série de romans dont une dizaine ont été traduits en français.
Son talent d'écrivain est mis en lumière dès les premières pages. L’écriture est limpide. Le suspense habite chacune des pages et l’on perçoit une grande précision dans la construction du récit. Les personnages sont très bien décrits. L'alcoolique au bord du delirium tremens, le flic couard, le médecin légiste à la limite de la nécrophilie. L'univers est sensiblement glauque, mais Morrell nous y fait entrer avec aisance, tellement ses descriptions sont précises. Et plus les pages se tournent, plus les questions habitent notre tête et l’on se surprend à tenter par nous-même de reconstituer les pièces d'un immense puzzle.
Mais c’est là précisément que le bât blesse dans ce roman qui perd sensiblement de sa valeur dans les trente dernières pages. L'auteur nous force à nous poser deux questions essentielles : comment et pourquoi… Mais il ne donne jamais la réponse à ces questions. Or, paradoxalement, c'est une des pierres d'achoppement de son récit. Imaginez que l’on vous fait apprendre un code, sans jamais vous donner la clef permettant de le traduire. On peut se demander pourquoi Morrell a omis une partie tellement substantielle de son récit. A-t-il été pris par le temps et par la pression de ses éditeurs ? Probablement. Ce ne serait pas le premier auteur qui bâcle un récit pour respecter les sacro-saintes dates de parutions. Mais dans ce cas, le coup de force commercial se solde par un non-sens : pourquoi se plonger dans un récit de presque 500 pages si l’auteur ne va pas au bout de son récit ?