Les mystères de Madrid
de Antonio Muñoz Molina

critiqué par Jlc, le 4 septembre 2005
( - 80 ans)


La note:  étoiles
Les étonnements de Lorenzo Queseda
Antonio Munoz Molina est un des plus grands écrivains espagnols qui a écrit plusieurs chefs d'oeuvre dont "Séfarade", "Beatus Ile" ou "Le royaume des voix", tous marqués par l'histoire de l'Espagne moderne ou de l'Europe.

Avec "Les mystères de Madrid", on change totalement de genre, même si l'affaire commence à Magina, petite ville d'Andalousie imaginée par l'auteur et décor, et plus encore, de certains de ses autres romans.

Nous ne sommes plus dans l'évocation historique, les grandes destinées, la recherche des racines ou la quête de la vérité mais dans un univers loufoque qui m'a fait penser à l'ambiance de la Movida des films d'Almodovar.

Lorenzo, dit Lorencito, Queseda, garçon de magasin et correspondant local du journal provincial, est convoqué par le comte don Sebastian, notable de la ville, qu'il a toujours révé interviewer. En fait, le comte est bouleversé par le vol de la statue du Divin Christ à la Tignasse à 18 jours de la procession de la semaine sainte et sans statue, plus de procession mais le deshonneur pour lui et sa famille. Il fait appel à Lorenzo pour retrouver la statue, probablement volée, croit-il, par Mathias Antequera, vedette de la chanson originaire de Magina. Ce qui désarçonne l'innocent, le gentil et un peu terne Lorencito. Direction Madrid.

Une grande partie du charme du livre réside dans les étonnements de notre héros découvrant Madrid et sa faune. Et il va aller de surprise en surprise, et nous avec lui, tant l'auteur s'en donne à coeur joie dans l'imagination la plus débridée.
Lorencito, à peine arrivé à Madrid, est appelé par Mathias qui disparait aussitôt. Puis il va croiser un japonais photographe, des videurs de boite de nuit au doux nom de Gueule de Lotte et Mie de Pain,Pepin Godino, lui aussi de Magina et qui sait (mais comment?) que Lorencito est à Madrid, tous plus cocasses les uns que les autres. Il va connaitre les quartiers interdits, les poursuites en voiture et tout le sel du livre réside dans l'humour de l'antagonisme entre ce naïf provincial et une ville qui bouge, explose, revit. Et il y aura des morts, des aventures, des coups de théatre.

Et puis il y aura Olga, enjôleuse, dangereuse, sensuelle, traîtresse, inattendue, lointaine, décevante.

Sans dévoiler la fin, la procession aura bien lieu mais elle aura un petit goût d'amertume pour notre gentil héros.

Ce livre se lit très agréablement mais, s'il révèle la capacité de Munoz Molina à se renouveller, à ne pas se laisser enfermer dans un genre, à montrer son sens certain de l'humour, ce livre n'a pas la hauteur de vue de ceux que j'ai évoqués au début.

Munoz Molina se renouvellera encore par la suite avec "Carlota Fainberg" ou "en l'absence de Blanca" en abordant le fantastique avec un réel brio.

En somme, un livre agréable à découvrir pour ceux qui ne connaissent pas cet auteur et à lire avec humour pour ceux qui ont lu ses grands livres.

Enfin c'est simplement mon avis.