Terreurs d'été
de Anna Maria Ortese

critiqué par Sahkti, le 28 juillet 2005
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Se sentir exclu
Après-guerre, fin des années cinquante, une jeune femme traverse son pays, son Italie natale. Un pays complètement bouleversé, en ruines, qui se cherche et a mal. Un pays qui voit ses fondements sérieusement ébranlés, qui se trouve "soudain privé d'unité et de mémoire" comme le dit si bien Anna-Maria Ortese en une petite centaine de pages riches et émouvantes. Elle y raconte la peur, le désoeuvrement, la difficulté de vivre. Rien ne semble facile.
Rome est au centre des mots, une cité devenue laide "dans sa tête" qui peut se montrer terriblement cruelle à l'égard des déracinés. La narratrice souffre de l'exclusion, admire des palais dans lesquels elle ne pourra jamais entrer, philosophe sur le pouvoir de l'argent et le désarroi de ceux qui ne peuvent s'acheter une vie parce qu'ils sont désargentés. Des êtres que la pauvreté condamne à l'exil au sein de leurs propres murs, forme d'exclusion perverse et trop souvent discrète.
Il se dégage de ces lignes une certaine lourdeur, celle de l'étouffement et du malaise, celle que l'on ressent quand on parcourt un territoire qui est le sien et qu'on ne reconnait plus, celle que l'on éprouve aussi lorsqu'une partie de soi s'est glissée entre les lignes, comme c'est le cas pour Anna-Maria Ortese qui a elle-même connu la douleur de la pauvreté et de l'exclusion dans son pays.