Ecce homo / Nietzsche contre Wagner de Friedrich Wilhelm Nietzsche

Ecce homo / Nietzsche contre Wagner de Friedrich Wilhelm Nietzsche

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Philosophie

Critiqué par Pendragon, le 26 avril 2001 (Liernu, Inscrit le 26 janvier 2001, 53 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (2 949ème position).
Visites : 6 195  (depuis Novembre 2007)

... tout ce qui ne le tue pas le rend plus fort

Ce livre est en fait une autobiographie où Nietzsche s'explique; il tente de se présenter (et de présenter ses oeuvres) au travers de sa propre philosophie.
Il en ressort une oeuvre du plus parfait égotisme et du plus parfait encensement de soi. Cependant, il me faut admettre qu'il a souvent raison. Mais bien sûr, à force de crier partout qu'il a tout compris et qu'il est le seul à pouvoir sauver l'homme, il a dû s'attirer beaucoup d'ennemis. Et, comme si ça ne suffisait pas, il s'attaque ouvertement à son pays, ou plutôt aux Allemands, et à la religion. On comprend dès lors que Nietzsche ait été considéré comme un philosophe à part.
Mais ce qui est de toute façon appréciable est le fait qu'il ose crier, il ose bouleverser les valeurs en place, il ose dire que l'homme fait continuellement des erreurs, il ose dire que l'homme est d'une bêtise incommensurable dans son refus de se grandir, dans son refus de voir les choses et dans son éternelle stagnation.
Nietzsche crie et renverse tout sur son passage. Oui, il se jette des fleurs, et quelles fleurs! Oui, il dénigre les autres, et quels autres! Oui, il se dit et se croit supérieur, le seul à avoir compris deux-trois choses, le seul qui voit les erreurs des hommes. Oui, tout cela est vrai, mais il est aussi le seul qui croit en l'Homme. C'est pour toutes ces raisons que Nietzsche peut finalement être aimé.

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...et quelle faculté de jugement!

10 étoiles

Critique de Kinbote (Jumet, Inscrit le 18 mars 2001, 65 ans) - 4 août 2003

Peut-être que seul en effet le génie permet de poser un jugement aussi lucide sur son propre travail... Char ne disait-il pas que "la lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil"? Une excellente critique qui m'incite, non à lire ce livre que j'ai lu et aimé comme les autres de Nietzsche, mais bien à le relire.

Génial!...

10 étoiles

Critique de Saint-Germain-des-Prés (Liernu, Inscrite le 1 avril 2001, 56 ans) - 4 août 2003

Nietzsche apporte-t-il des arguments à son arrogance ?
Les titres des chapitres donnent le ton : Pourquoi je suis si sage, Pourquoi j’en sais si long, Pourquoi j’écris de si bons livres, Pourquoi je suis une fatalité.
Notez bien, pas de points d'interrogation, ce ne sont donc pas des questions mais des affirmations…
Si les démonstrations sont à la hauteur de sa prétention, alors soit.
Dans la préface, Nietzsche se présente et offre un condensé de ce qui fait sa philosophie et qui sera développé sur tous les tons dans ce livre et dans les autres : disciple de Dionysos, il préfère être un satyre qu'un saint.
Il ne cherche pas à créer de nouvelles idoles (par idole, il entend tout idéal) mais à les renverser, car pour lui, tout idéal pervertit l'humanité en ce sens qu’il la détourne de la réalité.
Il n’hésite pas à s'envoyer des fleurs à propos de son Zarathoustra : « J'ai fait en lui à l’humanité le plus grand présent qu’elle ait jamais reçu ».
Et à propos de ses discours : « Ils ne parviendront à se faire entendre que de la fleur des élus ».
Pourquoi est-il si sage ?
Tout d'abord parce que par rapport au problème général de la vie, il se dit neutre car il vit un dualisme : essor et décadence.
Il mentionne ses problèmes de santé, assez sérieux, et on voit que lorsqu'il est malade, son esprit étudie des concepts sains et que quand il va bien, il s'intéresse à la décadence.
Dès lors, « je sais l’art de renverser les perspectives, j'ai le tour de main qu'il demande : première raison pour laquelle je suis peut-être le seul à pouvoir opérer une « Transmutation générale des Valeurs ». » Ensuite, parce que provenant d’origines multiples (beaucoup de villes sont citées), il voit « plus loin que les perspectives purement locales ou nationales ». Il est également sage en ceci qu'« il n’est ours que je n’apprivoise ni guignol que je n'assagisse ».
Les gens qu'il a côtoyés ont donc massivement fait preuve de bon vouloir et de gentillesse à son égard.
Si toutefois on agit mal envers lui, il ne réagit pas par la représaille (sic) ou la protection : à la bêtise, il oppose tout de suite quelque chose d'intelligent.
En ce sens, il prend toujours sa revanche.
Quant à garder simplement le silence, il trouve cela moins honnête qu'une injure : « Le silence est une objection, à force d’avaler on s’aigrit le caractère et on se gâte l’estomac ». Une autre dimension de sa sagesse consiste en ce qu'il appelle « le fatalisme russe ».
La maladie et la faiblesse détruisent l'instinct de guérison .
La maladie est une sorte de ressentiment.
Le seul moyen de s'en sortir, le fatalisme russe, prescrit de « ne plus rien accepter du tout, ne plus rien prendre, ne plus rien absorber, - n’avoir plus aucune réaction. »
La sagesse de ce fatalisme tient en ceci que les échanges du corps sont réduits, ralentis (poussé à l'extrême, on arrive au fakir).
A l’inverse, le ressentiment consume.
« Le dépit, la susceptibilité maladive, l'impuissance à se revancher, l'envie, la soif de la vengeance, autant de toxines, autant de réactions qui sont les pires pour un épuisé ; elles entraînent une usure rapide de la résistance nerveuse et une recrudescence morbide des évacuations nuisibles comme l'épanchement de la bile dans l'estomac. »
Bouddha avait déjà insisté sur la nécessité de supprimer le ressentiment.
Le ressentiment utilisé par un faible finit par lui nuire.
Quant aux forts, ils n'en ont pas besoin. En même temps, il avoue son tempérament guerrier.
L'attaque se situe du côté de la force comme la rancune et la vengeance étaient signes de faiblesse. Enfin, il se purifie régulièrement.
De quoi ?
De l'homme, bien sûr.
L'homme le dégoûte, le côtoyer est pour lui tâche difficile.
Alors, il nage, se baigne régulièrement (ce qui explique que la propreté est essentielle pour lui) et il se retire dans sa solitude.
Il cite son Zarathoustra : « En vérité, je vous le dis, Zarathoustra est un grand vent pour les bas-fonds : et voici le conseil qu’il donne à ceux qui voudraient le combattre, à tout ce qui crache et vomit : Gardez-vous de jamais cracher contre le vent ».
Pas dénué d’humour non plus…
Pourquoi en sait-il si long ? Premièrement, il n'a pas gaspillé son temps ni son cerveau à penser à des questions qui n’en sont pas telles que les difficultés religieuses ou le remord. Ensuite, il accorde une attention particulière à son alimentation (« Tous les préjugés viennent de l’intestin.
Le cul de plomb, je le répète, c’est le vrai péché contre l'Esprit. »), au lieu où il vit (climat sec et ciel pur de préférence) et à ses récréations (la lecture, sauf en période de travail intellectuel intense car il ne veut pas se laisser distraire par une pensée extérieure ; en matière de lyrisme, il cite Wagner). Il préconise de rester le plus éloigné possible de ce qui susciterait notre instinct défensif car nous y perdrions nos forces. S'il en sait si long, c'est également parce qu’il a su répondre à la question : comment devient-on ce qu’on est ?
« Devenir ce qu’on est suppose qu’on n'a pas la moindre idée de ce qu’on est. »
Attention à ne pas se comprendre prématurément : cela tuerait l'instinct.
La conscience ne doit jamais être au courant de ce qui se trame au-dessous.
La bonne manière est de ne rien soupçonner et un jour, ce qui a été élaboré secrètement vient à la surface. Enfin, il affirme qu’en lui, « on n'y trouvera pas un instant la moindre attitude prétentieuse ou emphatique.
La grandeur exclut l'emphase ; qui a besoin d’attitude est faux ; . gare aux hommes pittoresques ! »
Hum, hum, il faut le lire pour le croire !
Ni prétentieux ni emphatique ?.
Gloups !
Il clôture cette section par une idée force : « Il ne faut pas se contenter de supporter ce qui est nécessaire, (…) il faut l’aimer ».
Ne vouloir aucun changement.
Pourquoi écrit-il de si bons livres ? Nietzsche commence par nous dire que son oeuvre a rencontré beaucoup d'ignorance.
Mais une fois qu’on a lu un de ses ouvrages, « on n'en peut tout simplement plus souffrir d'autres, surtout s'ils traitent de philosophie ».
« Je possède l’art du style le plus varié dont ait jamais disposé un humain. » Après ce trait d'humilité, il explique qu’il s'oppose aux idées reçues.
A ce sujet, il nous fait une de ces sorties dont il a le secret à propos des femmes.
Aux côtés de la femme, le christianisme est une de ses cibles privilégiées.
« Prêcher la chasteté c’est exciter publiquement à violer les lois de la nature.
Mépriser la vie sexuelle, la souiller par l’idée de « souillure », c'est le vrai crime de lèse-existence contre le « Saint-Esprit de la Vie ». » S'en suit une revue détaillée de chacun de ses ouvrages, depuis « L'origine de la tragédie » jusqu’au « Cas Wagner ».
Dix résumés, dix études faites par l'auteur lui-même.
Vous comprendrez que je ne peux pas les exposer ici.
La longueur de ma critique en serait doublée…
Pourquoi est-il une fatalité ? En gros, parce que « lorsque la vérité entrera en lutte avec le mensonge millénaire, nous verrons des ébranlements inouïs dans l’histoire du monde, les séismes tordront la terre, les montagnes et les vallées se déplaceront, et on n'aura jamais rien pu imaginer de pareil ». Il se dit le premier immoraliste car le créateur doit d'abord détruire.
« Le mal suprême fait partie du bien suprême, mais le bien suprême c'est le bien créateur. »
L’immoraliste met en œuvre deux négations.
Celle de l'homme bon et celle de la morale de la décadence (le christianisme).
Bonté et bienveillance sont symptômes de faiblesse, résultats de la morale de la décadence.
« Le grand oui suppose d’abord le négation et la destruction. »
L’homme bon refuse de voir la réalité telle qu'elle est.
Son état est donc le mensonge.
Il nie les instincts humains.
En tentant d’éliminer ce qu'elle estime comme mauvais, la morale de la décadence est stupide, ce serait comme vouloir supprimer le mauvais temps par pitié pour les pauvres gens.
« (…) altruisme, ce serait ôter à la vie la grandeur de son caractère, ce serait châtrer l'humanité et réduire l'existence à une misérable chinoiserie. »
Les trois dernières pages sont une anthologie à elles toutes seules.
C'est prodigieusement bien écrit, lapidaire à l'égard du christianisme.
Loin d'être d’accord avec toutes ses thèses, je reconnais, mieux, je souligne le génie de Nietzsche.
Cet homme a des formules et des théories à vous couper le souffle…
Merci aux courageux de m'avoir lue jusqu'ici !

Le bon choix

8 étoiles

Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 79 ans) - 30 avril 2001

je n'ai lu que "Le gai savoir", "Le crépuscule des idoles" et "Ainsi parlait Zarathoustra". Ce dernier, j'ai du le comprendre assez mal... Cela fait plus d'un mois qu'un de mes amis me dit que cest "Ecce homo" qui est, selon lui, le meilleur... Il faudra vraiment m'y mettre !

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