Hiver africain
de Evelyn Waugh

critiqué par CCRIDER, le 17 février 2005
(OTHIS - 76 ans)


La note:  étoiles
Le voyageur desabusé
Evelyn Waugh, jeune reporter du Times s'embarque en octobre 1940 pour l'Abyssinie pour assister au couronnement du Négus, Hailé Sélassié. Il considère les cérémonies d'un oeil amusé . Tout ce décorum ne l'impressionne pas. Il remarque surtout le retard du pays, son côté médiéval et arriéré et les illusions que les Occidentaux se font sur lui. L'avenir proche lui donnera raison.
Il poursuit son voyage sur Aden, Zanzibar, le Tanganyika, le Kenya et l'Ouganda .
Bloqué au Congo Belge par manque de transports vers l'Ouest, il doit bifurquer par la Rhodésie et l'Afrique du Sud pour pouvoir regagner Londres par mer.

L'intérêt de ce livre réside surtout dans le regard désabusé du voyageur sur une Afrique somme toute bonne enfant à l'époque. Les Blancs y sont partout respectés. Durant tout son périple, Waugh n'est jamais inquiété. Une sorte de "Pax occidentalis " règne sur tout le continent. Mais Waugh est un visionnaire, il prévoit que l'homme blanc n'est pas destiné à rester encore longtemps, que bientôt il lui faudra partir .

Beaucoup d'humour, surtout vers la fin, où il montre qu'à Londres la sauvagerie n'a rien à envier à celle de l'Afrique !
Le plus drôle des récits de voyage 8 étoiles

Evelyn Waugh possède une ironie, un sens de la dérision et de l'observation, et un humour tout à fait excellent : lorsqu'il raconte un périple de plusieurs mois à travers l'Afrique, on s'amuse donc énormément. Son voyage a eu lieu en 1930 : il embarquait pour l'Abyssinie (maintenant Ethiopie), afin d'assister au couronnement du nouvel empereur. Les cérémonies, les différents officiels et différentes délégations sont croqués avec un humour savoureux. Après l'Abyssinie, Waugh poursuivra son périple pendant quelques mois : il ira à Aden, puis à Zanzibar, ensuite au Kenya, puis le Congo belge et l'Ouganda avant de rentrer depuis la Rhodésie.

Je n'ai jamais lu un récit de voyage aussi amusant. Les personnages rencontrés sont admirablement croqués : que ce soit des bureaucrates locaux, des commerçants, des aventuriers de toute sorte ou des aristocrates qui tentent leur chance sous les tropiques. L'auteur parle des nuisances de la bureaucratie, du climat (il y a quelques pages sur la chaleur absolument géniales !), des aléas du transport sous les tropiques avec les horaires assez approximatifs,.. et c'est chaque fois très drôle. J'aime beaucoup aussi quand il croque le caractère des différentes nationalités, les Arméniens, les meilleurs de tous, les Indiens dont il apprécie peu le sens commercial,..

Les informations politiques et les réflexions sociales sur l'Afrique sont bien entendu un peu datées. Ses réflexions sur l'empire colonial britannique sont cependant un témoignage intéressant de la vision de cette époque. Même si parfois, avec le recul, sa vision du colonialisme semble un peu paternaliste : en particulier quand Waugh défend les colons anglais qui s'établissaient dans des grandes propriétés au Kenya et reproduisait le mode de vie des "gentlemen farmers" aristocratiques.

Une lecture très rafraichissante.

Saule - Bruxelles - 58 ans - 25 octobre 2010