Rue Barbare de David Goodis

Rue Barbare de David Goodis
( Street of the lost)

Catégorie(s) : Littérature => Policiers et thrillers

Critiqué par Sibylline, le 15 janvier 2005 (Normandie, Inscrite le 31 mai 2004, 73 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (14 682ème position).
Visites : 4 850  (depuis Novembre 2007)

Polar noir

Je ne sais pas pourquoi, j’ai longtemps cru que David Goodis était noir. Peut-être était-ce dû à cette sorte de tragique inéluctable ou presque, que l’on retrouve souvent dans ses livres et qui évoque les négro spirituals ou Harlem, cette mentalité adaptée à la misère et aux conditions de vie plus que difficiles que les Noirs, plus que d’autres, avaient à subir aux Etats-Unis. Mais il est blanc, et la misère touche aussi les Blancs, bien sûr.
Goodis est né à Philadelphie en 1917. J’ai lu quelque part sur le net, qui n’est pas toujours bien informé, qu’il était mort jeune, mais il avait tout de même 50 ans. Je suis bien placée pour dire que c’est jeune pour mourir, mais ce n’est tout de même plus ce qu’on appelle « mourir jeune ». L’alcool l’a bouffé, lui comme tant d’autres. Avant cela, il avait été journaliste, écrivain, scénariste. On a adapté plusieurs de ses romans pour le cinéma, comme « Les passagers de la nuit » ou «tirez sur le pianiste », et même ce « Rue barbare », mais je ne sais pas sous quel titre. Peut-être le même…

Ce roman raconte la vie, ou plutôt un épisode de la vie, d’un homme, un ouvrier qui est né et a toujours vécu dans une des plus mauvaises rues d’un quartier de misère noire. Il a appris depuis toujours que c’est « chacun pour soi » et que la seule façon de survivre dans cette jungle peuplée de pauvres et de truands, c’est de respecter la loi des trois singes : ne rien voir, ne rien entendre, ne rien dire. Ce qu’il fait. Il aurait pu, lui aussi, être truand ou alcoolique, mais il ne l’a pas voulu. Il vit ici, sans se compromettre à rien d’illégal, mais également sans regarder autour de lui., sans jamais se voir en redresseur de torts, allant même jusqu’à détourner le regard quand il risquerait d’être témoin de quelque chose. Il a bien assez à faire avec son travail éreintant et sa famille. Pourtant un jour, il aide quelqu’un qui gît sur le trottoir à se relever, rien de plus…
Ce roman raconte aussi l’histoire de cette rue sans espoir et de toute une partie de ses habitants. Avec une précision d’anthropologue, sans condamner personne, en étant capable de voir à la fois, chez chacun, le meilleur et le pire, Goodis nous y emmène et nous montre ce qu’y est la vie. Ce qu’est la vie, peut-être.

Goodis est un très bon écrivain. Son style est parfait et son art du récit est sans faille. Il sait également trouver exactement les mots qu’il faut pour nous permettre de sentir jusqu’au détail la psychologie et l’état d’esprit de ses personnages. Tout a un air de réalité, de vérité et de raison qui nous emporte dans son récit, sans longueurs, sans temps mort. Il nous explique tout sans qu’on ait jamais l’impression de lire des explications.

Un excellent polar noir.

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polar noir plus ou moins abouti

7 étoiles

Critique de Clubber14 (Paris, Inscrit le 1 janvier 2010, 44 ans) - 6 mai 2011

j'ai vraiment adoré ce bouquin qui est a la fois court (inutile d'écrire 500 pages pour faire un bon roman) et très noir. Nous sommes plongés véritablement dans le sordide, tout le monde, dans cette petite ville industrielle, est au chômage, alcoolique, sans un sou, violent, etc.... Tout le monde sauf notre héros bien sûr. Lui est sympa, travailleur, etc.... et il va vouloir sauver une pauvre femme en péril, au risque de mettre sa propre vie en danger.

Dans ce polar j'ai retrouvé un peu de 'Rafael, derniers jours', mais quand même en moins noir et un peu moins abouti.

La conclusion de ce livre est que chacun doit chercher en soi la petite part de lumière qui va faire de lui quelqu'un de bien. Comment, même en plein centre d'une ville infâme et crapuleuse, l'on peut faire preuve d'humanité. Certains passages étaient parfois un peu gros et plusieurs personnages très caricaturaux mais de manière générale ça passe bien.

Voila, si ce livre n'est pas un chef d'oeuvre, j'ai passé un moment sympa (si je puis dire par rapport à la noirceur du thème).

Un roman noir, comme un tison

10 étoiles

Critique de Vda (, Inscrite le 11 janvier 2006, 48 ans) - 25 septembre 2007

Un roman écrit dans les années 50, tableau de la violence et de la misère dans laquelle toute une partie de la population urbaine des Etats-Unis vivait alors. Un roman d'une violence insoutenable soutenue par une écriture au cordeau et des personnages sans concession.
Ruxton Street c’est l’enfer. Pourtant y vivent Sam, le vieux noir qui tient un petit snack, Bertha dont la demeure accueille chaque soir poivrots et joueurs, Chet qui chaque jour travaille à redresser les rails de la gare de marchandises, et Hagen, cette brute qui trafique et brutalise. Tous ont grandit dans le cloaque qu’est la Rue, tous en portent les stigmates.
L’enfer car y règne violence et dégradation. Le plus faible est apte à la violence, à la manipulation, le plus fort est tributaire de ces faibles qui l’admirent, le craignent et le haïssent. Seulement, il arrive parfois que la corde, à force d’être tendue se rompe, qu’un habitant de la Rue, qui n’avait jamais fait de vagues, qui avait toujours été régulier, fermant les yeux sur trafics, viols et meurtres, soit tiré hors de son quotidien d’aveuglement par un fond d’humanité.
Les habitants de la Rue en sont prisonniers, ils ne peuvent s’en échapper, elle est leur univers. Même une promenade au parc, à un quart d’heure de tramway, est un rêve quasi inaccessible. Comme un espace de verdure, de paix inatteignable. Fuir à des kilomètres, Chet y a pensé, y songe encore parfois.
Il y a de la tragédie dans ce court mais dense roman.

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