Quatrains de bouquiniste
de Christophe Gilot

critiqué par Débézed, le 30 novembre 2023
(Besançon - 76 ans)


La note:  étoiles
Tout est dans le titre
Christophe Gilot est bouquiniste à Liège dans une échoppe « A l’enseigne du commissaire Maigret » et toute la journée ses yeux caressent ses chers livres dont il lit, sans même le vouloir, les titres. Un beau jour, l’idée lui est venue d’assembler les titres quatre par quatre pour faire des quatrains. « Il crée des quatrains insolites avec ce qu’il a sous la main … des titres de livres », comme l’écrit Nathalie Racelle sur la quatrième de couverture de ce recueil. Ces quatrains n’ont rien à voir avec des haïkus et cependant, j’ai eu parfois l’impression qu’ils étaient construits dans le même esprit : exposer les choses vues et ensuite en tirer une morale ou un idée ou autre chose encore.

Pour tenter de conforter cette idée, je propose ci-dessous trois de ces presque trois cents quatrains, avec en-dessous, comme dans le recueil, le nom des auteurs de chacun des vers. Le premier quatrain évoque, pour moi, la satire matière chère aux aphoristes que je lis très régulièrement. J’ai trouvé dans ce quatrain une satire affutée de la démocratie en Amérique.

« L’ombre des armes
Parabole,
Fictions
De la démocratie en Amérique ».
Sok-Yong Wang – William Faulkner – Jorge-Luis Borges - Alexis de Tocqueville.

Dans ce deuxième quatrain, j’ai voulu mettre en évidence le côté poétique de ce recueil :
« Au lit un soir,
Une étoile m’a dit :
Voyage dans la lune
En attendant l’apocalypse ».
Robert Coover – Fredric Brown – Savinien Cyrano de Bergerac – Paul Kirchner

Et dans ce dernier exemple, je ne pouvais passer à côté des surréalistes que Christophe semblent bien connaître eux aussi :
« L’éléphant blanc,
Le cheval impossible,
La licorne à cinq pattes :
Un bestiaires de bouquinistes ».
Achille Chavé – Saki – Marcel Marien – Aaron Comethus

Satire, poésie, surréalisme et aussi drôlerie, humour, causticité, …, Christophe Gilot connait bien tous ces aspects de la littérature courte et surtout ultra courte, il en use avec agilité et adresse. Et pour conclure, je lui emprunterai les mots de Jean Paulhan qu’il a placés en exergue à ce recueil :

« Tout a été dit, sans doute. Si les mots n’avaient changé de sens ; et les sens, de mots ».