Nouvelles (édition complète)
de Vladimir Nabokov

critiqué par Cameleona, le 18 mars 2001
(Bruxelles - - ans)


La note:  étoiles
Le monde tel que vous ne l’avez jamais vu
Il aime : l'écriture et la chasse aux papillons. Il déteste : la stupidité et la musique douce.
Qui est-ce ? Vladimir Nabokov, bien sûr. Son nom est presque toujours associé à « Lolita », qui fit scandale lors de sa publication, en 1959 : pourtant, il est aussi l'auteur de nombreux autres romans et de soixante-six nouvelles, écrites entre les années vingt et cinquante.
Rassemblées et parfois traduites du russe par son propre fils, Dmitri Nabokov, elles sont éditées dans leur intégralité pour la première fois. Ces nouvelles sont de véritables petites perles de raffinement et de justesse, où en l'espace de quelques pages seulement, le grand écrivain atteint la perfection dans la description d'un sentiment ou d'une situation, qu'elle soit émouvante, drôle ou carrément surréaliste.
Ma préférée est « Bonté » : elle ne fait que six pages, mais c'est suffisant, et son texte est tellement prenant qu’une fois entamée la lecture on ne peut plus en détacher les yeux. Non pas qu'il s’y passe grand-chose, loin de là, mais le portrait qu'y fait Nabokov est si touchant qu'on en a le coeur serré, peut-être même plus que si l’on apercevait son objet dans la rue, et c’est bien là que réside son génie.
Ce maître de l'écriture nous décrit en quelques traits légers une petite vieille telle qu’il doit y en avoir des milliers, avec sa bonté, ses espoirs, et cette innocence qui la rapproche de l’enfance.
Mais il y a de tout dans ce recueil : on y croise des lutins, des anges meurtriers, des vengeances, des histoires d’amour,. Beaucoup de nouvelles tirent sur le fantastique, en laissant la frontière entre réel et imaginaire volontairement floue : un homme peut-il pénétrer dans un tableau pour ne plus jamais en ressortir, condamné à y figurer dans une immobilité éternelle ?
Le lien entre tous ces textes, parfois exercices de style précurseurs d’un roman, est la magnifique qualité d’écriture de Vladimir Nabokov, son incroyable sensibilité, sa manière de synthétiser les essences du monde pour nous les retransmettre transcendées via le support du papier.