L'origine du temps
de Thomas Hertog

critiqué par Colen8, le 14 août 2023
( - 82 ans)


La note:  étoiles
Au cœur du Big Bang
Waouh, ce récit est fantastique ! Destiné aux profanes il retrace avec rigueur et clarté l’essentiel de la physique mathématique théorique et expérimentale entre 1900 et 2022. Pour lui rendre hommage, pour exaucer un ultime souhait du physicien britannique Stephen Hawking (1942-2018) chercheur-enseignant à Cambridge sont détaillées ses découvertes fondamentales(1). Et celles-ci après encore 20 ans de collaboration avec Thomas Hertog tous deux assistés de leurs élèves, doctorants et autres chercheurs ont conduit à une révolution inouïe de la question des origines dont les répercussions pourraient bien ouvrir des voies puissantes de réflexion métaphysique, de développement humaniste et de pratiques scientifiques.
Le concept d’univers en expansion du chanoine Lemaître (1931) confirmé par la suite a donc balayé l’univers stationnaire d’Einstein en suggérant d’y introduire le hasard inhérent à la théorie quantique sans en exclure par conséquent une sorte d’évolution darwinienne de la cosmologie. Les cinq à six théories de grande unification (TGU) dédiées aux implications de la cosmologie quantique ont buté sur bien des paradoxes jusqu’en 1998(2). Entretemps essayait de s’affirmer la théorie de l’inflation du Big Bang, celle d’une énorme bouffée primitive d’énergie issue de fluctuations quantiques minuscules dont la trace apparaissait sur le fond diffus cosmologique (FDC) rendu avec précision par le satellite COBE de la NASA (1989).
A ce stade plusieurs détours s’étaient invités dans les raisonnements sans apporter de réponse suffisamment crédible : la flèche du temps, signe de l’entropie, du désordre croissant couplé à l’information, les effets antigravitationnels liés à la matière noire et à l’énergie noire(3). Entre 2006 et 2012 Stephen Hawking jamais à court d’idées avait branché ses équipes(4) sur une hypothèse de renversement complet : stipulant une cosmologie dite descendante qui fait remonter le temps au lieu de l’inverse à partir du Big Bang, il avait anticipé par l’acte d’observation aux points de bifurcation des possibles un processus émergent avec ses lois physiques propres dont aucun n’était préalablement défini, pas même la notion de temps global.
L’étape suivante de ce cheminement scientifique commun a combiné plusieurs inspirations fructueuses. Il faut parler des propriétés holographiques de certains univers théoriques conçus comme espaces anti-de Sitter (AdS) multidimensionnels. Parallèlement des calculs de dualités holographiques ont montré une équivalence entre d’une part les théories des cordes complémentaires au sein de la théorie M pour la gravitation quantique, d’autre part les théories quantiques des champs (TQC) pour les particules présentes à la limite de surface de l’AdS. Enfin si l’intrication permet un jour ou l’autre d’expérimenter l’évasion de l’information accumulée par un trou noir durant son rayonnement, ne serait-ce pas à envisager par le canal d’un trou de ver ?
Les bases largement mises à l’épreuve par les applications spectaculaires de la physique du XXe siècle sont ébranlées pour laisser la place à une approche encore plus profonde et fondamentale qu’il reste à démontrer d’abord, à consolider ensuite. Loin de s’inquiéter des avancées technologiques de l’IA, des OGM, de la recherche de traces de vie dans les exoplanètes, des angoissantes menaces aggravées par des crises sanitaires, nucléaires, climatiques, post humanistes et autres Thomas Hertog conclut avec un message d’espoir. Il ne cache pas son enthousiasme sur ce qui peut nous rendre meilleurs en choyant plus efficacement notre maison planétaire grâce au partage de nos connaissances et de notre éthique dans les sciences.
(1) En cosmologie classique ses théorèmes sur les singularités du Big Bang (dès 1964), en cosmologie semi-classique la découverte du rayonnement des trous noirs (1974) ; vient ensuite son hypothèse d’un univers sans bord à l’origine (1981) conforme elle aussi à la méga poussée inflationniste d’un commencement comme inexistant…
(2) Théorie des cordes vibrantes sous différentes approches, super-symétrie, théorie M, théorie du multivers.
(3) Constituant à elles deux 95% du contenu énergétique de l’univers.
(4) Incluant bien évidemment Jim Hartle et Thomas Hertog.