Le fleuve qui nous emporte
de José Luis Sampedro

critiqué par Jfp, le 3 août 2023
(La Selle en Hermoy (Loiret) - 75 ans)


La note:  étoiles
les caprices d'un fleuve
Le flottage de bois, entre les montagnes du Haut-Tage, peu habitées et pourvues de sombres forêts, et les basses terres, densément peuplées, où cultures et pâtures ont détruit depuis des siècles la ressource en bois, était encore une pratique courante jusque dans les quelques années ayant suivi la fin de la Seconde Guerre Mondiale, où se situe le récit. Chaque année, mais peut-être sera-t-elle la dernière (?), des hommes se rassemblent et entreprennent cette difficile expédition depuis les contreforts pyrénéens, sous la conduite d’un chef d’équipe expérimenté. Des hommes rudes, au courage exceptionnel, mais peu regardants sur la morale et la bonne conduite, notamment avec les femmes. L’arrivée de Laura, jeune fille en errance qui va se joindre au groupe par besoin de protection, puis celle de Shannon, jeune irlandais revenu traumatisé de la libération de l’Italie par les troupes alliées, va bousculer le fragile équilibre qui s’est établi vaille que vaille au sein de la petite communauté, dirigée d’une main ferme par l’Americano, surnom qui lui a été donné à la suite d’un séjour en Amérique. Le fleuve qui nous emporte, c’est le Tage bien sûr, mais également l’amour et c’est aussi la vie, la vie ayant marqué durement tous ces personnages. Cette équipée va servir de révélateur de leurs passions, de leurs limites aussi, qu’ils apprendront à dépasser pour certains d’entre eux. Une fresque magnifique, exaltant ce qu’il y a de meilleur dans l’humanité sans pour autant cacher le pire : la trahison, la lâcheté, le crime parfois.