La ligne blanche de Alexandre Millon

La ligne blanche de Alexandre Millon

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Lucien, le 15 mars 2001 (Inscrit le 13 mars 2001, 68 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 12 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (1 031ème position).
Visites : 4 638  (depuis Novembre 2007)

Faut-il franchir la ligne blanche?

La Ligne blanche, cette ligne qu'il ne faut pas franchir et qui conduirait où ? À la Vie, à l'épuisement d'un fantasme, à la pire des trahisons ?
L'argument, le prétexte, est résumé - lui aussi - sur la " quatrième " : "Chiara et moi nous vivons à la campagne. Elle travaille dans le restaurant de sa meilleure amie. Moi, je suis chômeur ; entre jardin, châtaigniers et nichoirs, j'ai la dignité en bandoulière. A cette époque-là, ma vie c'était ce road-movie dans un mouchoir. J'étais de plus en plus déambulé dans mes fantasmes, insomniaque et boutiquier de moi-même, je me vendais des images pas très pieuses, des jouissances hors concours, avec la meilleure amie de Chiara..."
Tout est là, et rien n'est là. On oublie vite la campagne, le restaurant, la " dignité en bandoulière " du chômeur de fond. On oublie vite tout ça, car on entre dans une narration rapide, faite de chapitres très courts aux titres évocateurs - La banquette de bois roux, L'angle de vue, Maria-Pia della Cantara, J'aurais pu... - qui s'enchaînent en rafale sans nous laisser le temps de nous retourner.
On oublie vite le réel de cette existence banale pour plonger à corps perdu dans les fantasmes d'Alexandre, dont la meilleure amie de sa femme Chiara - une " rousse pectorale " - forme le noyau dur (parfois très dur...).
Et puis, on trouve à travers ces pages quelques occasions de se distraire (tel est le voeu de Millon, c'est sa façon à lui de respecter le lecteur) voire d'exercer ses zygomatiques. Pour témoignage, cet extrait d'un entretien d'embauche (n'oublions pas, Alexandre est chômeur) :
" C'est une femme aux multiples sourires, très précisément espacés, comme les accords d'une guitare. Une blonde savamment décoiffée, myope à lunettes, elle ressemble à une Carole Bouquet légèrement sous acide.
- On s'est déjà rencontré, non ? interroge-t-elle, en confirmant ma première impression, d'une voix lisse, qui se voudrait neutre, presque impersonnelle, ni agressivité ni douceur particulière. - À Charleroi, je vous reconnais, vous étiez la madame pipi du cinéma Marignan, n'est-ce pas ? Elle a un sursaut dans l'oeil. Elle m'examine de la tête au buste (de la tête aux pieds ce serait difficile, je suis assis, d'où elle est, elle ne peut pas voir mes pompes). Elle m'examine, disais-je, et je décèle de la pitié dans son regard. - Non, dis-je, sans attendre, je crois plutôt que c'était à Anvers, au défilé du couturier Van Rybe..."
Beaucoup d'éclats de rire, donc. D'autres éclats aussi. éclats de mots : " Le soleil se couche comme chaque jour sur les chagrins d'amour les crises de joie, de foie, de folie, sur la couche d'ozone et sur la porte d'entrée de la roussette. "
Ou, tout simplement, parfois, éclats de quels obus, de quels coups de poing envoyés par la vie pour que le narrateur tout à coup se regarde lui-même comme un mort, une sorte de faux vivant égaré dans un restaurant et qui " rate sa vie de peu " au point que des croque-morts investissent la salle pour organiser sa " mise en bière "...
Marxiste - tendance Groucho... - cet Alexandre Millon à découvrir d'urgence. Franchissez la ligne blanche de la page de garde, et prenez place sur la banquette de bois roux...

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8 étoiles

Critique de Tophiv (Reignier (Fr), Inscrit le 13 juillet 2001, 48 ans) - 10 juillet 2003

Eh bien non, Pendragon, tu ne sera pas le dernier à critiquer ce roman ! Me voici, bien après tous les autres ! mais c'est vrai qu'ici, en Suisse, on est toujours un peu plus lent ...
J'ai découvert A.Millon grâce à vous tous et dans le désordre ! J'ai commencé par son 3ème puis je suis revenu à son 1er puis enfin à son 2ème roman !
Et comme vous tous, j'ai ri à son humour, apprécié ses mots, et dévoré ses pages.
J'ai l'impression que "mer calme à peu agité" est un peu la fusion de ses deux premiers livres. Dans le 1er, le style était un peu moins maîtrisé, tout en ayant un fil conducteur solide, une histoire. Dans le 2eme, le style se précise et l'histoire passe au second plan, sans réél fil conducteur, comme le souligne Bolcho.

et dans le 3eme, les éléments forts des 2 précédents sont regroupés et je souscris à l'analyse de Lucien à propos de "mer calme ..." :
"Nous savions déjà qu’Alexandre Millon était un écrivain. Avec "Mer calme à peu agitée", il est en train de devenir un romancier."

Vivement le 4ème !

Où l'on se rend compte que le blanc est une somme de couleurs !

8 étoiles

Critique de Pendragon (Liernu, Inscrit le 26 janvier 2001, 53 ans) - 2 novembre 2002

Bon ! Me voilà une fois de plus bon dernier pour critiquer cette fameuse Ligne Blanche qu'il faut ou ne faut pas traverser. Et pourtant, elles ne sont pas blanches, ces lignes, elles sont couvertes d'encre, de cette encre si noire qu'on en vient à y voir de toutes les couleurs à mesure que les lignes se lisent, que les pages se tournent et que les paragraphes s'envolent. Ben oui, de toutes les couleurs ! Un peu de rose pour l'histoire d’amour entre Alexandre et Chiara, du rouge pour les colères de celle-ci, du noir pour le broyage d’Alexandre, du vert pour la tenue de Valéria, du bleu pour ce coin de ciel qui transparaît sans cesse derrière les nuages du noir précité (et je ne parle pas du facteur), du jaune pour ce cocufiage qui se dessine, le marron, c’est pour ceux qu'Alex donne dans ses rêves, le gris est bien sûr pour le ciel de Bruxelles, et nous finissons évidemment avec un peu d'orange pour les cheveux d'Ingrid…
Ecriture fraîche, simple, rêveuse. Histoire de tous les jours, pensées qui voltigent et qui pourtant sont si proches de nous. Laissez-vous séduire par cette ligne blanche qui délimite si bien les deux côtés de la route. à suivre ou ne pas suivre !

Carte blanche à l'esprit

8 étoiles

Critique de Bluewitch (Charleroi, Inscrite le 20 février 2001, 44 ans) - 25 octobre 2002

On se promène, on pérégrine, on écoute les mots, on lit les sons. On se laisse conduire, on se laisse convaincre d'être à un endroit alors qu'on est ailleurs, qu'on vit alors qu'on rêve. Images, pauses, liberté, poésie. C'est subtil, comme une répartie chuchotée à l'oreille avec un sourire au coin des lèvres. C'est un discours, un coup de bouche (plus joli!), drôle ou moins drôle, un haussement d'épaule, clin d'oeil sur clin d'oeil. Et des vérités vraies parsemées dans les fantasmes... "Suis-je rédibitoirement pessimiste, est-ce de la redite ancestrale, du rabâchage séculaire?" Je tire la phrase hors de son contexte et je réponds: NON!

Vertige de l'amour

9 étoiles

Critique de Patman (Paris, Inscrit le 5 septembre 2001, 61 ans) - 14 octobre 2002

C'est drôle ça, Persée voit Satie dans le livre de Millon, moi, j'avais l'impression d'écouter un album de Bashung ! Faut dire que les références à Bashung ne manquent pas dans ce bouquin ! Le titre déjà est celui d'une chanson d'un album des années 80 (je sais plus lequel, mais je me souviens de la chanson).

La dernière conquête d'Alexandre

8 étoiles

Critique de Persée (La Louvière, Inscrit le 29 juin 2001, 73 ans) - 13 octobre 2002

Rien à voir avec l'ascenceur de Strépy-Thieu : Millon n'a pas besoin d'en faire des tonnes pour convaincre. Après les romans américains dont je sors un peu groggy par leur côté investigation exhaustive du réel, voilà un bol d'air qui rassérène. De l'humour, de la légèreté. Aaaah, ça fait du bien ! Pas question ici de nous expliquer le péché originel comme si on venait de le découvrir. Ici on suppose qu'on sait. Merci.
De la légèreté donc. Non pas un détachement confinant à l'indifférence mais un décalage, tantôt joyeux, tantôt déjanté, qui illumine de sa verdeur un récit volontairement minimaliste. Preuve moustachue (et nietszchéenne, mais bon!) qu'en littérature la légèreté peut n'être pas superficielle. La crème du lait n'est-elle pas meilleure que le lait ? Millon ne cherche pas à bien écrire : il écrit juste. Enfin... "juste" dans son registre à lui : petite musique pour piano légèrement désaccordé. Satie griffonnant une sonate sur un formulaire de l'Onem. L'homme observe et s'observe, mais en retrait, avec un sourire qui fait bing! Les illusions, la révolte, la véhémence des réquisitoires : perdus en route (souvent). Le rêve, la tendresse, non.
On reste dans ces territoires de l'entre-deux, dans l'inaccompli. Bascule, bascule pas ? Mais on se soigne. Ou la réalité s'en charge. Et cela donne le "ragtime" pas possible d'un mec revenu de tout mais fin prêt à repartir. Surtout n'appelle pas l'accordeur de piano, Al! Déjà que le facteur avait un air bizarre... Laisse ces garces de notes se poser avec leur grâce d'oiseau.

D'une traite, oui.

8 étoiles

Critique de Lucien (, Inscrit le 13 mars 2001, 68 ans) - 11 octobre 2002

Oui, Patman, cette ligne blanche, faut se la sniffer d'une traite. C'est comme ça qu'elle en jette le plus. Elle dilate, elle extasie, elle tirlipote les portes de la perception. Millon, c'est de la bonne!

D'une traite !

9 étoiles

Critique de Patman (Paris, Inscrit le 5 septembre 2001, 61 ans) - 11 octobre 2002

J'ai lu ce livre hier, comme ça, d'une traite, sans prendre le temps de souffler...magnifique ! Je suis encore sous le charme ! Bravo monsieur Millon !

Femmes

8 étoiles

Critique de Bolcho (Bruxelles, Inscrit le 20 octobre 2001, 75 ans) - 17 avril 2002

Moi, j’ai mis un peu de temps à apprivoiser la « Ligne blanche ». Le temps de m’adapter à cette sorte de désordre un peu las qui fait se succéder des saynètes poétiques ou cruelles, farceuses ou mélancoliques, innocentes ou perverses, tout ce que l'on veut, mais qui semblent manquer de ligne directrice, ce qui, avec un titre pareil, est tout de même un comble n’est-ce pas. Puis –lorsqu'on a enfin décidé de la suivre sans plus poser de questions oiseuses-, cette ligne non directrice mais blanche nous promène avec une désinvolture ricaneuse et elle nous fait découvrir. surtout des femmes. Par exemple celle qui a un visage poupin et qui « est grande, elle me dépasse de plusieurs tétines de biberon ». Alors on se dit que le narrateur est un marrant. Mais il nous parle aussi des femmes sans en rire du tout : « Mince ou grosse (.) ce n’est que la même chair misérable, le même essaim d’organes programmés pour dépérir, les mêmes yeux apeurés ». Les critiqueurs précédents ont dit plein de choses sensées et intelligentes. J’ai choisi, pour changer un peu, de mettre en exergue une des lectures, celle qui, précisément, passe par les femmes, dont, parfois, le narrateur nous dit le plus intime : « Il y a une sorte de validité permanente dans ce petit V renversé, avec cet émouvant feston froissé de lèvres, épinglé en haut par un petit pic rose (.) ». Ah, si tous les mecs pouvaient faire cette simple description, quel progrès ! Le site n’est pas interdit aux moins de 18 ans ? Tant pis, je ne résiste pas à l'envie de citer ce petit chef d’oeuvre sur une femme bavarde: «(…) je crois savoir qu' [elle] cultive, même au plus rose de son bas-ventre, cette attirance pour la langue ». Le narrateur serait-il un « revanchard social » ou un « alchimiste convertissant le plomb en plomb » ? Peut-être un peu des deux et c'est tout à son honneur. Mais c’est surtout quelqu'un qui a bien dû admettre l'évidence : il n'y a que les femmes qui soient absolument intéressantes…

réelle ou virtuelle, la ligne?

8 étoiles

Critique de Zoom (Bruxelles, Inscrite le 18 juillet 2001, 69 ans) - 18 mars 2002

Sur l'histoire tout est dit : la tranche de vie qu'Alexandre nous conte n’a pas pour but de faire suer le lecteur par un suspens haletant ou une aventure rondement ficelée. Non, c’est autre chose que ce livre : Alexandre fait de la musique avec les mots ou avec ses pensées qu'il laisse volontairement musarder à gauche, à droite. C'est plutôt un " cliché " qu'un roman, ou alors un zoom, tiens, oui. Mais pas au sens cliché, comme " déjà vu ", non non. La preuve ? la page 100, au hasard : " c'est décidément une très belle Flamande, constatai-je, en lorgnant derrière le rideau. J'imagine bien des générations de rousses cloîtrées, dans des donjons de Flandre ou d'Irlande, enfermées pour préserver la pureté de la souche, le pedigree incendiaire " . D'ailleurs en parlant d'aventure, c'est bien de cela qu'il s’agit : tout est fait pour la repousser jusqu'à la dernière page. Même une séance photo où Alexandre caresse sans toucher... C’est le livre de la non aventure ! C’est une prouesse, voire un exercice de style, de ne pas avoir d' " aventure " pour cet homme, dont une errance nonchalante débride les fantasmes , qui prend des trains à travers la plaine et qui a dans les bottes des montagnes de questions... L'aventure d’Alexandre , donc, est de ne pas avoir d’aventure... Cèdera, cèdera pas ?
D’ailleurs, en fin de compte, décide-t-il quoi que ce soit ? Chiara veille, lointaine mais tellement présente, compagne courant d'air mais dont un seul regard emplit l’espace. Bref, Alexandre Millon nous offre un livre peu banal, riche en arrêts sur images , où un héros dépasse une ligne virtuelle sans faire un pas, (est-ce cela la dignité en bandoulière ?) de façon bien plus jolie sans doute que si la ligne avait été vraiment franchie...

Le road-movie dans un mouchoir

8 étoiles

Critique de Mariou (Strepy, Inscrite le 20 mars 2001, 61 ans) - 28 mars 2001

ATTENTION HUMOUR à gogo !
L'auteur nous décrit avec une verve et des pitreries extraordinaires l'histoire d'un chômeur pas triste, d'une distinguée désespérance d'élite.
Alexandre a une jolie compagne, Chiara. Il vit dans le Brabant Wallon. C'est un grand fantasmeur. Il fantasme à tout va et en particulier sur la meilleure amie de sa compagne : une rousse pectorale.
Derrière cette trame simple, il y a au moins deux aspects : 1° Quand le personnage part dans ses fantasmes, l'écriture part dans tous les sens. On pense à Woody Allen, à Vautrin. 2¡ L'auteur utilise le fantasme comme un interlocuteur, comme une base de données qui aide ce personnage-là à grandir.
"Insomniaque et boutiquier de lui-même il se vend des images pas très pieuses, des jouissances hors concours".
Extrait : "Va-t-elle enfin connaître les plaisirs de l'apesanteur, les enchères clitoridiennes, l'humiliation de la ligotée, la fessée de l'attachée de presse, la syncope anale, la frénésie collective, les chevauchées phalliques, les spasmes... le chant des sirènes, le retour au liquide amniotique, un premier rôle avec Leonardo di Caprio."
Et des phrases comme " Face à une vraie lueur d'espoir, on est peu de chose".
La fin est très touchante !!!

La meilleure amie de Chiara

8 étoiles

Critique de Kinbote (Jumet, Inscrit le 18 mars 2001, 65 ans) - 28 mars 2001

"Nous sommes dans le genre d’hiver pas très rude, mais interminable, avec des prolongations et des tirs au but, pour départager les saisons. Sur la vieille banquette de bois roux, située dans le hall de ma gare attitrée, je pose mon arrière-train."
Chômeur, volontiers bricoleur (il construit des nichoirs pour les oiseaux), Alexandre le narrateur a « une seule urgence : écrire » et il sait que « l'imagination connaît la force des mots », ce qui nous vaudra quelques délires mémorables. Il a le goût des gares ; c’est dans l'une d'elles qu’il rencontre, voici moins de dix ans, Chiara. Depuis, il vit avec elle dans un coin de campagne situé « à quelques nuages acides » de la capitale.
Ceci ne donnerait pas encore matière à récit si Alexandre n’était pas tombé amoureux de la meilleure amie de Chiara à un moment où son couple franchit un cap difficile et où Chiara rejoint, plus que de raison, sa mère à Ostende.
" La meilleure amie de Chiara a un prénom, comme tout le monde, mais cette manière presque impersonnelle de l’appeler correspond mieux, pour moi », confie Alexandre, « à cette oscillation permanente, à ce flou dans lequel je ne peux la situer. En clair, plus cette amie m’impose une certaine camaraderie, plus j’ai envie de la palper…"
En fait d'oscillation permanente, entre Chiara et sa meilleure amie, notre narrateur « Thalys à tout va ». Le tour de force de l'auteur, son élégance, sera de ne pas faire se confronter, au risque de verser dans le vaudeville, Chiara et son amie, de ne pas noircir l'une pour mettre toute la lumière sur l’autre.
Alexandre a aussi le goût de la photographie. Il propose à des inconnues des séances photo où l’image dope alors l'écriture, où les mots, trempés dans l'encre du regard, relèvent toutes les tendresses du corps offert à sa vue. La meilleure amie de Chiara viendra poser devant l’objectif de son soupirant secret, et ce sera un enchantement de plus, tant pour Alexandre que pour le lecteur, car Millon n’est jamais aussi virtuose que lorsqu'il caresse les formes émouvantes de sa plume-pinceau.
On l'aura compris, ce livre vaut aussi pour sa plume que Pascal Vrébos, lors de l’attribution du prix « La plume et la souris » emporté pour son premier roman (voir le Jeudi de monsieur Alexandre) qualifiait d’"ondoyante, soyeuse, râpeuse qui, entre neige et soleils, parfums et nuits d'été, morts et germinations enjôle. "
" On est soi-même l'arrangeur de sa vie " nous dit le narrateur. A l’image de ce constat, l'auteur arrange son texte, ménageant les ruptures de ton, alternant séquences franchement poilantes et plans poignants, faisant des raccords sur les mots, distribuant de joyeuses rafales de vocables aux sonorités amies ou le ponctuant de notations subtiles sur les êtres et les choses, qui sont autant de mots d’esprit (« le problème avec la modestie, c’est que sa profondeur de champ est insondable, on ne sait jamais quand on va l'atteindre, y sombrer ou passer outre »), se permettant aussi le luxe d’infiltrer sa matière de bouffées de poésie pure (« sereine comme du riz, elle sourit au soleil » ou « des hanches amples de négresses blanches »).
La Ligne blanche est cette ligne qui sépare, le long du chemin de fer, la voie du quai, celle qui fait le partage entre les échappées vers l’imaginaire depuis l’embarcadère et le voyage à travers les vallées des sensations et les reliefs colorés.
" Faut-il franchir la ligne blanche ? " questionne Alexandre au moment de déposer son bagage de mots en laissant le soin à chaque lecteur, pour répondre en connaissance de cause, de repartir en boucle au début du roman, qui possède en exergue ces paroles tirées d’une chanson de Bashung : " La nuit, je mens, je prends des trains à travers la plaine. "

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