Lettres à Anne: (1962-1995)
de François Mitterrand

critiqué par JPGP, le 22 décembre 2022
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Les raisins verdâtres
La France aime ses monarques et s’entiche de leurs frasques. Pour preuve l’accueil laudatif de ses gazetiers (toutes tendances confondues) qui saluent les kilos de papier propres à envelopper les lettres d’amour du Président à sa donzelle. Au début de leur relation elle avait 20 ans, lui 46 : de quoi redonner de la verdeur au roucouleur charentais. Si l’on en croît ses missives il rêvait de glisser en elle comme dans ses pantoufles. Que l’amoureuse laisse descendre cul sec dans son cœur ces brouets sirupeux est pardonnable Que la critique chante la pompe du corpus compassé dans le plus pur style XIXème siècle victorien laisse interdit. Le prince y surjoue les Pierrot d’amour avant d’aller pousser plus loin son bouchon.


Virtuose de la viole de gambettes, il cultive du bis repetita placet. Compter fleurette est un moyen de tailler le bout de gras pour celui qui s’ennuie en conseil des ministres ou entre deux élections présidentielles. L’émoi du conformiste amant au surmoi pondéral reste d’un ennui crasse. Pas la moindre originalité; rien que du « Mignonne allons voir si la rose » sans la moindre épine. Manière pour le susdit de poursuivre d’assiduités surannées son Emmanuelle scolaire. Et il est étonnant qu’Anne Pingeot - aussi brillante aujourd’hui - ait donné son aval à la publication d'un tel marivaudage conformiste où seules la morgue et la hauteur du commandeur n’ont rien d’artificielles. Quant à la littérature elle demeure lit (au ciel pudiquement évoqué) et ratures (sur la moindre malséance). C’est du prêchi-prêcha de bobonne compagnie, un cake étouffe-chrétien mâtiné aux raisins adultérins.

Jean-Paul Gavard-Perret