La patience des traces
de Jeanne Benameur

critiqué par CHALOT, le 25 juin 2022
(Vaux le Pénil - 76 ans)


La note:  étoiles
un livre philosophique qui se lit avec délice
« La patience des traces »
roman de Jeanne Benameur
196 pages
janvier 2022
éditions Acte Sud

Poésie et philosophie liées

Il n'y a ni action, ni suspense dans ce livre, mais une histoire vraie, humaine qui nous parle de la philosophie de la vie.
C'est de la prose mais l'enchaînement et la musicalité du texte nous rappellent la poésie.
Simon est un psychanalyste qui a passé sa carrière -qui n'est pas terminée- à écouter le plus sérieusement les autres. C'est son métier et même sa passion.
Que fait-il là ? Qui va l'écouter ?
Il veut faire le point, réfléchir à son existence, au sens qu'il peut lui donner.
La femme qu'il aime avec qui il n'a pas eu d'enfants est partie, son meilleur ami est mort noyée et une patiente n'est pas revenue après qu'il se soit permis une remarque....
Tout se bouscule en lui.
A-t-il commis des erreurs ?
Comme jamais il n'est parti en vacances, il décide, non de fuir, mais de se ressourcer en allant au Japon dans un endroit isolé.
Durant le voyage, il croise de loin cette femme qui, écoutée par lui, n'est pas revenue.
Elle semble calme, reposée, sereine.... peut-être qu'il n'a pas fauté....
Pour le reste, la richesse des relations apaisées qu'il a avec ses hôtes va lui permettre de repenser à sa vie, à son histoire.
« Il n'est pas seulement le joueur d'échecs réfléchi, le nageur, le psychanalyste à l 'écoute patiente, l'homme à la vie sage. Il a été un amant fougueux à la jouissance intense. Et sa vie, c'est tout ça. »

Ce livre m'a fait du bien à un moment où je me questionne sur l'altérité des uns et les ambitions des autres et de la difficulté d'être fidèle à des valeurs de solidarité dans cette société.

Jean-François Chalot
Un petit bijou ! 10 étoiles

Simon Lhumain, psychanalyste, a décidé de larguer les amarres, de partir sans but précis, de faire une pause indéterminée. Il part comme en « retraite », en se laissant guider par la vie, lui qui s’est toujours réfugié dans son cabinet pour se protéger. Pour éviter de se poser les bonnes questions, il s'est concentré sur les problèmes des autres en recueillant « la profondeur tue de toute une existence sur un divan ». Sur une île japonaise, dans une maison d’hôte, il commence par se reposer, ce qu’il ne s’était jamais autorisé et petit-à-petit se laisse « désencombrer » le cœur en « laissant le temps prendre sa place ». Simon peut ainsi revenir sur ses blessures : son divorce d’avec Louise, le suicide de son meilleur ami Mathieu, l’interruption abrupte d’une analyse par une de ses patientes. Simon démêle les fils de son histoire.
Ce récit est empli de poésie et se lit avec tous nos sens. Les hôtes discrets de Simon l’initient à l’art du kintsugi (recoller les morceaux cassés avec de l’or), du tissage et de la teinture. Le style original est épuré, avec des phrases courtes, beaucoup de magnifiques réflexions et des mots qui semblent avoir été chacun pesés méticuleusement. Un beau voyage intérieur tout en psychologie subtile ! Un petit bijou !

Pascale Ew. - - 56 ans - 8 mai 2024