Signe de terre
de Yves Hughes

critiqué par Débézed, le 4 mars 2022
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Rififi chez les paysans
Yann, son fils, et Valentine la femme qui partage, jusqu’à la limite qu’elle a fixée, sa vie, reviennent de l’aéroport où ils ont accueilli la mère de sa presque concubine de retour d’un long périple en Amérique latine. Pendant ce temps, alors qu’ils longent les larges halls de la Porte de Versailles abritant le Salon de l’agriculture qui vient d’ouvrir ses portes, un truie chinoise de trois-cent-trente kilos déchiquettent un quidam arrivé Dieu sait comment dans son box. Au petit matin, Yann est appelé pour résoudre cette énigme tout aussi ténébreuse qu’incongrue.

Il mène son enquête à la mode Maigret, de toute façon les technologies les plus pointues s’avèrent peu efficaces car la truie n’a laissé que des lambeaux du cadavre qui n’avait rien dans ses poches. Dans ces conditions, son identification s’avère déjà bien problématique, Yann décide alors de s’immerger dans les coulisses du salon en interrogeant les vigiles de garde la nuit et les exposants dormant sur place dans l’espace qui leur est réservé. La victime est bientôt identifiée mais sa présence dans le salon intrigue les enquêteurs : c’est un Auvergnat monté à la capitale non pas, comme beaucoup de ses compatriotes, pour travailler dans une brasserie mais pour monter sur les planches comme saltimbanque dans des cabarets minables qui ont presque tous disparu. Des cabarets comme Maigret en visitait souvent pour prendre la température du milieu .

En apprenant que la victime est originaire d’Auvergne Yann, comme aurait fait Maigret, se rend dans sa campagne natale pour essayer de comprendre pourquoi ce brave fils de la terre est monté à Paris et comment il a pu rencontrer au Salon de l’agriculture des concitoyens qui auraient pu avoir, dans un temps lointain, des problèmes avec lui. L’affaire pourrait impliquer des exposants avec, éventuellement, certaines complicités….

Avec cette histoire de paysans montés à la capitale, Yves Hughes renoue avec le bon polar à la Simenon dans lequel le commissaire passe beaucoup de temps à renifler les lieux pour s’imprégner de la mentalité des protagonistes et découvrir leur histoire réciproque. Moi-même enfant de la terre, je me suis senti très à l’aise au milieu du cheptel rassemblé Porte de Versailles ou dans les fermes du Cantal. Je me souviens que ma première visite à Paris fut pour visiter de la famille rue de Dantzig, là où Yann a garé sa voiture avant de rejoindre le salon.
Ce polar bucolique m’a soufflé un grand courant de nostalgie et a fait remonter à ma mémoire une belle grosse vague de souvenirs personnels…