A l'ombre des tours mortes
de Art Spiegelman

critiqué par Leura, le 6 septembre 2004
(-- - 73 ans)


La note:  étoiles
Autant effrayé par son gouvernement que par Al Qaida
Spiegelman est un génie, et il peut se permettre ce qui passerait venant d'un autre, pour une arnaque: plus de 25 € pour quelques pages cartonnées. Oui, mais... quelles pages ! Tour à tour angoissé par le monde où il vit, ironique, désespéré, plongé dans les souvenirs transgénérationnels de la Shoah, il avoue avoir écrit ce livre parce qu'il "continue à penser que ce monde est proche de sa fin", mais il reconnaît qu'il semble finir plus lentement qu'il ne l'avait cru. Il est hanté par l'odeur des tours mortes, amiante, PCB, plomb, dioxine et débris humains, comme son père l'était par celle d'Auschwitz, au point de dire qu'auprès de Manhattan, Tchernobyl ferait figure de station thermale. Il fume, plus que jamais, certain de ne pas vivre assez longtemps pour que la cigarette le tue. Les "architectes de l'apocalypse", Bush, Cheney, et Rumsfeld le font hurler de colère, et le seul bénéfice qu'il trouve à vivre aux Etats Unis, c'est qu'à moins d'être arabe, on y a tout de même le droit de penser que le pays n'est pas si formidable que ça. Considéré comme un extrémiste par l'ultra droite américaine, il continue d'affirmer que le déplacement est la dernière folie en Amérique, puiqu'on a "bousillé l'Irak au lieu d'Al Qaïda". Les idées évoquées sont comparables à celles de Michael Moore, mais en plus sombre, plus pessimiste, et nettement moins humoristique. A chacun son style...
Intéressant 8 étoiles

A l'ombre des tours mortes. Des pages cartonnées. Que l'on peut manipuler dans tous les sens pour apercevoir, scruter, analyser le moindre détail dissimulé ici ou là. Des détails au niveau des dessins et des textes. Desquels émanent des bribes de souvenirs de l'auteur lors des attentats. Une sorte de catharsis en somme. Une sorte de coup de gueule aussi contre la politique de Bush.
Assez remarquable. Etonnant même. Mais pas toujours compréhensible à mon sens. Notamment les dernières planches qui datent du début du XIXe siècle.
Cela vaut tout de même le coup de jeter un oeil. De s'arrêter aux petits détails et de les apprécier. Quant aux autres bédés d'Art Spiegelman, je ne les connais pas encore (même si les critiques de Maus sont élogieuses), donc je ne sais pas ce que vaut A l'ombre des tours mortes.

Nomade - - 12 ans - 8 janvier 2008


Légère déception 5 étoiles

Je partage les impressions de Gabriele.
Egalement fan de Spiegelman, j'ai parcouru cet album avec curiosité et plaisir, me régalant de ce trait perfectionniste. On sent que Spiegelman est attentif au travail de quelques-uns de ses pairs comme Chris Ware et qu'il conçoit un album bédé comme un objet à part entière dont chaque détail est important.
D'où certainement ce magnifique objet qui a de la gueule, c'est indiscutable.
Mais je n'y ai pas trouvé mon compte. C'est beau, c'est bien mais c'est insuffisant, il manque un certain souffle. Le 11 septembre, revu et corrigé 1001 fois par tout le monde, j'aurais aimé qu'il soit traité autrement, avec plus de pêche et de verve, avec la même violence que dans l'excellentissime "Maus".

Sahkti - Genève - 49 ans - 29 octobre 2004


Deception... 3 étoiles

Tellement enthousiaste à l'idée que Art Spiegelmann sorte une nouvelle BD, je n'en ai été que plus déçue qu'en j'ai vu l'objet.
"A l'ombres de Tours Mortes" est un document de plus pour montrer l'impact du 11 Septembre sur la population américaine...
Mais si vous souhaitez en savori un peu plus sur le sujet, je vous engages à lire l'ouvrage d'Eric Laurent "La Face cachée du 11 septembre"
Sinon le livre est beau mais il est inclassable, on ne peut pas vraiment parler de BD...
Bref, vu le prix, je préfères m'orienter vers un autre livre

Gabriele - - 50 ans - 29 octobre 2004


Et pourtant... 8 étoiles

... il faut bien dire ce qui est: pour une lecteur français, à moins d'être fan de vieux comics américains, 50% de ces belles pages cartonnés n'ont que peu d'intérêt.

On peut comprend les éditeurs (casterman et l'éditeur américain) d'avoir choisi ce format court et ce "remplissage", vu le rythme auquel écrit Spiegelmann, n'ayant pas voulu attendre 17 ans de plus. Et certes, la première partie est trés bonne. C'est un grand de la BD, il peut "se le permettre",soit, mais il ne faudrait pas que çà devienne une habitude ;).

Soit dit en passant, "A l'ombres des Tours Mortes" ne tient pas la comparaison avec Maus. Ni, à mes yeux, avec "Putain c'est la guerre !" de David Rees sur le même sujet.

Au final, on regrette la rareté de Spiegelmann. Ce type ne peut écrire que sous l'inspiration des pires catastrophes humaines. On en viendrait à souhaiter une bonne troisième guerre mondiale pour, enfin, 17 ans aprés Maus, lire une vrai bonne et grosse BD de Spiegelmann...


(NB: avouons que l'objet en lui-même est assez décoratif au passage)

Ebene - - 42 ans - 9 septembre 2004