La France romane
de Collectif, Danielle Gaborit-Chopin (Edition)

critiqué par Radetsky, le 18 août 2021
( - 81 ans)


La note:  étoiles
La première Renaissance

Préambule : l'Auteur (rang imposé par l'informatique) est en réalité Commissaire Générale d'exposition, dépendant du Musée du Louvre, lequel est coéditeur du livre avec Hazan.
Et je renonce à citer le nombre des auteurs impliqués : c'est donc une Oeuvre Collective, rédigée à l'occasiion d'une exposition.

Or une exposition, même parcourue scrupuleusement et avec toute l'attention qu'elle requiert, ne laisse qu'une impression visuelle et ne donnera qu'une idée imparfaite du contexte général qui a vu se créer l'ensemble exposé.
C'est comme si on avait effectué les travaux pratiques avant d'avoir étudié l'histoire, les outils et la théorie qui en sous-tendent l'organisation.

Ainsi, l'ouvrage qui nous occupe se propose de composer un tableau aussi fidèle que possible d'une société avec son monde, ayant vu apparaître et s'épanouir un mode d'être, un style de vie, une pensée, dans notre "cher et vieux pays"....comme aimait le qualifier un certain général.

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Lorsqu'on parle de Renaissance l'esprit s'oriente spontanément vers le XVIe siècle, tandis qu'implicitement tout ce qui a précédé est souvent relégué dans les "âges barbares"...et on assimile tout le Moyen-Âge à un monde où s'affrontent des types en pull à mailles d'acier, habitant des oppida en bois juchés sur de petites buttes lesquelles se tiennent derrière un fossé bordé de pieux. Et tout ce beau monde mange avec ses doigts, boit sec, couche sur des peaux de bêtes et prend des vacances en Palestine par l'agence "Croisades Ltd".
Autrement dit, entre la chute de l'Empire Romain et la Réforme, il n 'y a quasiment...rien !

C'est aller un peu vite en besogne et il faut s'arrêter sur ce qui aurait pu être le développement d'une autre Histoire tout aussi riche que celle que nous connaissons...sinon plus.
Les bornes temporelles qu'on s'est proposé d'étudier se tiennent grosso modo entre la fin du Xe siècle et la fin du XIIe. Sachant que plus tard la Grande Peste de 1348 portera un coup fatal à la civilisation médiévale et à ses promesses.

On va donc reprendre la construction d'édifices en pierre, se remettre à sculpter, peindre, illustrer tous les matériaux disponibles, travailler d'autres métaux que le fer et l'acier et produire une floraison d'oeuvres d'art de toute nature et qui se distingueront par des harmonies régionales toujours visibles aujourd'hui.
Mais dans un monde dont le style et les buts de vie auront dépassé un stade archaïque pour se lancer dans le perfectionnement ininterrompu. Témoins notamment de ces évolutions, la circulation monétaire, l'essor de l'artisanat, en parallèle avec la croissance des villes et des grandes abbayes.

Il s'agit donc bien de "La France", avec tout ce qui s'y trouve, où que ce soit. On n' a donc pas un catalogue exclusif de chapiteaux, modillons ou enluminures liés à un seul lieu, mais aussi d'ouvrages écrits, de monnaies, d'ivoires, etc. aussi bien attachés à un édifice particulier que répartis dans divers musées ; tout comme l’étude des évolutions dans les modes de vie.
Et si la religion et l’Église se taillent la part du lion, le monde extérieur à la foi se développe et a recours à des méthodes comparables.
Les influences ou interactions mutuelles de telles et telles régions font l'objet tout aussi bien de regroupements que de divergences.

De cette mise en miroir des mondes religieux et profane résulte un portrait assez complet du monde roman au travers de ses manifestations matérielles et artistiques, bien qu'on aurait souhaité que fût illustrée plus abondamment telle ou telle "province" romane.
Mais le bilan est largement positif et l'indication des sources très complète.

Une première partie (p.12 à 48) passe en revue :

- Le monde roman
- L’architecture religieuse en France au XIe siècle
- La sculpture romane jusqu’au milieu du XIIe siècle
- Les pavements en mosaïque
- La peinture murale
- Le vitrail (milieu XIIe siècle)
- Les manuscrits
- Les arts précieux du Xe eu XIIe siècle

Une seconde partie (Catalogue) passe en revue les particularités régionales, tout comme les lignes directrices de la société romane. (p.48 à 358) :

- De l’art carolingien à l’art roman
- Féodalités et mutations sociales
- L’Église
- Le renouveau culturel
- Les grands centres de création
- Les régions du Nord et la Normandie
- L’Île de France
- Les grands thèmes du XIIe siècle

La troisième partie (P.388 à 408) regroupe les cartes (en nombre restreint), tables et index ainsi que la bibliographie.

Vu la taille et le poids de l'ouvrage, on le casera difficilement dans une sacoche de voyage... ce sera une référence par contre lorsqu'on rentrera chez soi, ou encore une incitation à se déplacer in situ !