Figures du transfert - épisodes cliniques
de Thomas Gunzig

critiqué par Sahkti, le 1 septembre 2004
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Pilules noires et jaunes
Petit récit étonnant et intriguant. Nous sommes dans une clinique psychiatrique, deux malades parlent sous la surveillance de micros et de l’oeil curieux du directeur de l’établissement, un homme usé et aigri. Gavés de pilules, ils ne sont plus supposés se souvenir de quoi que ce soit, c’est interdit. On ne doit se souvenir de rien quand on est internés dans une clinique psychiatrique qui vous nourrit presque exclusivement de pilules jaunes et noires. Même la femme du directeur en prend. Pour cela, il doit trafiquer les bons de livraison, alors il a peur, c’est qu’il n’aimerait pas qu’on le prenne en faute et qu’il se fasse virer. Alors deux types qui déjouent le règlement et passent leur temps à bavarder dans le but de se souvenir, c’est dangereux ! Surtout quand on découvre, dans les dernières lignes, que l’un est un ancien Ministre de l’Intérieur, victime de l’opération "Débouchage" (un bon nettoyage de politiciens qui ne conviennent plus), et que l’autre est un ancien médecin, un de ceux qui ont gavé les victimes de l’opération susmentionnée de pilules de toutes les couleurs et qui, un jour, n’a plus convenu à son tour.
Drôle et féroce, un récit qui tient bien sur soixante pages, car Thomas Gunzig manie (comme toujours) la plume avec parcimonie, laissant libre court à notre imagination et aux scénarios les plus fous et conservant à la fin la part de mystère nécessaire pour ne pas tuer le charme lorsque l’intrigue touche à son but.