L’eau de rose
de Christophe Carlier

critiqué par Alma, le 11 janvier 2021
( - - ans)


La note:  étoiles
Un pastiche du roman rose
Sur le présentoir de la médiathèque la couverture du roman m'a attirée .
Sobre, sur fond blanc, elle présentait les contours d'une silhouette féminine, de dos, entièrement vêtue de rose, chapeautée, qui rappelait celle des élégantes des années 50. Le titre évoquant un parfum avait un petit air rétro. Bien sûr, il renvoyait à un genre littéraire populaire, inhabituel dans cette bibliothèque, mais la 4e de couverture me semblait rassurante, elle annonçait que son personnage principal Sigrid, était une écrivaine spécialiste des romans roses « un genre mineur, décrié mais indispensable à notre époque où le rêve est rare » en vacances en Grèce . Il ne devait donc pas s'agir à proprement parler d'un roman à l'eau de rose …..

Je me suis donc embarquée dans sa lecture. L'écrivaine arrive à l'hôtel Manolis, sur une île de la Mer Egée « un de ces palaces endormis dans leur splendeur ancienne, qui perdent chaque année un peu de leur superbe ». C'est la fin de l'été, les clients sont moins nombreux . Elle pourra y écrire en toute tranquillité son prochain roman. Dès son arrivée, elle remarque une jeune fille nommée Gertrude étrangement vêtue dont le regard « semble lui adresser une invitation silencieuse »...........
La suite, comme on peut s'y attendre, va proposer la relation du séjour dans cet hôtel, les menus événements qui le ponctuent, l'avancée du travail de rédaction du roman, son processus créatif .

La caractéristique de L'EAU DE ROSE c'est que qu'il est construit par l'alternance de deux récits. Celui du séjour à l'hôtel est régulièrement entrecoupé par les scènes du roman sentimental que Sigrid est en train de rédiger et qui relate les épisodes d'une relation amoureuse entre deux héros : Priscilla et Robert, deux membres de la bonne société américaine de Boston .
Les deux genres littéraires vont peu à peu se contaminer. Sigrid, tout en observant le fonctionnement de « la cohorte étrange » de vacanciers dans cet hôtel « anachronique, lesté d'irréalité, de déraison », se comporte comme une héroïne de ses propres romans, elle en adopte les regards, les fantasmes. La fiction colorant le réel, le récit adopte lui aussi la prose maniérée, ampoulée et et les clichés des romans roses .

Le principe de construction de deux récits qui s 'enchâssent et se croisent donne à l'ouvrage un aspect décousu. J'y vois à la fois la mise en abyme d'un type littéraire :le roman sentimental et un pastiche de son style codifié , pleinement assumé avec un certain humour par Christophe Carlier