Le sabre et le turban - Jusqu'où ira la Turquie ?
de Jean-François Colosimo

critiqué par CHALOT, le 5 décembre 2020
(Vaux le Pénil - 76 ans)


La note:  étoiles
analyse exceptionnelle
«  Le sabre et le turban »
Jusqu'où ira la Turquie ?
Livre de Jean-François Colosimo
Les éditions du cerf
207 pages
novembre 2020

Ce qui relie Atatürk à Erdogan

Erdoğan et Atatürk ne sont pas si différents que cela.
Tout semble les séparer, l'un présenté comme laïque et moderniste, voire universaliste et l'autre comme islamiste et particulièrement rétrograde.
L'auteur dans un document fouillé, documenté et très bien écrit rapproche ces deux hommes et montre leur ressemblance.
« Le même processus qui, hier, était conduit par le régime militaire, progressiste et laïc est reconduit aujourd'hui par le régime islamiste, conservateur et fondamentaliste. »
Il revient sur la fameuse « laïcité » de Mustafa Kémal qui n'est que la soumission du fait religieux au pouvoir étatique.
On est loin de la séparation de l'Etat et des religions.
Il existe sous Atatürk une religion officielle, l'islam sunnite.
Le lecteur, très vite passionné est entraîné dans un va et vient constant mais ordonné entre la période kémaliste et celle sous domination d'Erdogan.
Les deux dictateurs n'ont eu cesse , chacun dans son répertoire, d'éliminer et d'asservir les minorités que sont les arméniens, les grecs, les alévis et les kurdes.
Le sabre et le turban sont convoqués, parfois ensemble, parfois séparément pour permettre au régime nationaliste turc d'asseoir sa domination à l'intérieur des frontières et à l'extérieur.
Erdoğan étrangle la démocratie et n'hésite pas à utiliser le double langage et la traîtrise pour opprimer le peuple kurde.
Toutes les promesses faites aux kurdes par Erdoğan n'ont pas été tenues et non content de ne pas respecter sa parole, le dictateur a réprimé le mouvement kurde à l'intérieur des frontières et au-delà, en Syrie notamment.
Les puissances occidentales laissent faire....
Elles protestent, communiquent mais sont obnubilées par le chantage auquel elles sont soumises, en ce qui concerne les réfugiés.
La situation est noire, très noire pour le peuple turc, pour ses minorités, pour la démocratie mais comme le montre l'auteur, rien n'est joué :
Il essuie des revers électoraux...Le chômage augmente, « les prisonniers ne plient pas »....la « reconquête » piétine malgré tout.
Jean-François Chalot