Vies minuscules
de Pierre Michon

critiqué par Balamento, le 16 août 2004
( - 59 ans)


La note:  étoiles
Echec de lecture.
Une critique se veut-elle forcément "positive" ? J'ai ouvert ce livre de Pierre Michon sans a priori et n'ai pu le lire. Au delà d'un certain nombre de pages, je me suis demandé ce que ce type voulait me dire. Oui, que peut bien vouloir me dire Pierre Michon, en usant d'une langue si travaillée et dans cette débauche de mots peu usités placés ici et là comme pour laisser transparaître que oui, bien sûr, il s'agit là de belle et noble littérature. Oui, je n'ai pu aller très loin à la lecture de ce roman, et pourtant, j'ai insisté, j'ai ouvert ailleurs, d'autres pages, sans m'attacher à la séquence, puisque de toute façon à l'évidence il ne s'agissait pas d'une histoire à suspense (détendons nous un peu les zygomatiques!). J'y suis revenu, plusieurs fois, intrigué, agacé, de ne rien comprendre à ce que Michon cherchait à exprimer, à dire, à faire. Quel était le sens de tout ça? Ou voulait-il en venir? Et je n'ai guère plus compris en d'autres pages. Certes, c'est écrit, très écrit, on pourrait même se dire que c'est fabriqué pour n'être lu que par un public très étroit, un public qui saurait peut-être par avance ce que Michon veut raconter, un public qui n'aurait nul besoin d'une touche d'humour ici ou là en respiration de 250 pages transpirant l'ambition littéraire, un public qui reconnaîtrait en Michon un proche, une filiation littéraire majeure ou je ne sais quoi.

Michon dans ces 250 pages, quelque part, bien caché, parle pourtant de lui, avec ambition et démesure, il en parle si fort et de façon tellement torturée, tellement acharnée en chaque mot, tellement dans cette criante envie-nécessité de n'écrire comme personne avant lui, qu'il en atteint ce qui pourrait-être vu comme une réussite, venir figurer illico au panthéon de la littérature, celle qui ne peut être l'oeuvre que des écrivain, des grands écrivains, reconnus par leurs pairs, de ceux qui résistent au temps et résistent malheureusement à la lecture de ce monsieur tout le monde, en qui je me reconnais fort bien.

Un extrait :
Les docteurs se débandèrent comme un vol de moineaux entrés par erreur ou bêtise sous les voûtes, et qu'eût dispersés la monodie; petit chantre du bas-côté, je n'osais lever les yeux sur le maître de chapelle inflexible, méconnaissant et méconnu, dont l'ignorance des neumes faisait le chant plus pur. Les tilleuls bourdonnaient; à l'ombre de leurs colonnes étoffées, entre deux brancardiers hilares, un macchabée sous son dais roulait vers le maître-autel de la morgue.
Essentiel 10 étoiles

J'ai découvert et lu ce livre il y a une vingtaine d'années - merci Jean-Baptiste Harang. Sa lecture a déclenché en moi une grande admiration et un profond respect pour Pierre Michon. Et je m'aperçois que je n'en n'ai livré aucune critique. Je l'ai donc relu - plutôt une sorte de promenade attentive parmi ces huit "vies" (récits). Je me suis également penché précisément sur les critiques déjà postées sur ce site. J'y trouve, comme pour les autres livres de Michon, rejets et admirations, mélangés et, à chaque fois, justifiés, dans un sens comme dans l'autre. Dans "Le roi vient quand il veut", l'auteur, d'un texte à l'autre, dévoile ses intentions et ses manières de faire. Et il m'apparaît que les critiques ont bien rendu compte des unes comme des autres.Je pourrais donc me passer de donner la mienne, mais je sens comme une nécessité de le faire.
Pierre Michon avait 37 ans quand il a écrit ce livre après, sans doute, des essais jugés ratés et une vie désordonnée et chaotique. Il a découvert à cette occasion sa capacité d'écriture et la joie de la coucher sur le papier. Cet éblouissement est probablement à la racine du thème choisi pour ce premier livre, déterminé ou dicté, on ne sait.Son intention, déjà bien décrite sur ce site, est de donner à de petites gens - les paysans de son enfance - le lustre d'une haute littérature. En conséquence il use de ces tournures de phrase complexes qui construisent son style, rendent sa lecture un peu ardue et repoussent de nombreux lecteurs. Par contre je ne trouve pas qu'il utilise le vocabulaire précieux qui jalonne ses ouvrages ultérieurs. Il offre ainsi un écrin magnifique à la vie humble de ces gens humbles, dont on parle peu, comme l'a formulé Tistou dans son équivalence de "Maupassant aux pieds crottés". Formule parlante mais un peu inexacte, concernant Maupassant, qui ne craint pas de se crotter aussi. J'y ai donc trouvé les petits faits de la vie de ces petites gens, des riens, des détails sans importance auxquels Michon procure une étonnante résonance.Ainsi les cadeaux que Clara et Eugène offrent à chacune de leurs visites, à leur petit-fils. Ainsi la relique d'Antoine Péluchet. Ainsi les coups de faux d'André Dufourneau. Ainsi... Ainsi...Dans d'autres passages, il est, lui Michon, plus en scène dans ses déchéances comme dans la "Vie de Georges Bandy", dans ses exaltations comme dans la "Vie de la petite morte" qui clôt le recueil et montre une étonnante sensibilité (Il est le seul auteur que je connaisse à évoquer le croup et je me souviens du père désespéré, saoul de douleur et d'alcool, suivant malaisément le petit cercueil blanc sur les marches de l'église de Sambin à la fin des années 1950). Quel dommage que des lecteurs ne puissent entrer dans ces textes qui disent si bien comment la résignation d'alors s'est transformée - problème de génération? - en colère.

Falgo - Lentilly - 84 ans - 1 janvier 2019


Vie minuscule d'un lecteur oublié.... 4 étoiles

Ecrivain français (1945- ), Pierre Michon est l'auteur de "Vies minuscules" (Prix France Culture 1984) et "Les Onze" (Grand prix du roman de l'Académie française 2009)
"Vies minuscules" est un récit sous la forme d'un recueil de 8 courtes nouvelles qui en font un roman autobiographique.
Pierre Michon y évoque ses souvenirs d'enfance et de jeunesse.

Autant j'avais pris beaucoup de plaisir à la lecture de "Les Onze", autant je me suis rapidement lassé de "Vies minuscules" .
Certes, une fois encore, l'extrême érudition est au rendez-vous mais gâchée par un trop-plein de pédanterie grammaticale.
Une succession de phrases toutes plus splendides les unes que les autres mais qui rendent la lecture rébarbative.
Michon magnifie la langue mais oublie le principal: son lecteur...

Je veux bien rejoindre les aficionados mais j'y ai perdu le plaisir de lire.

Frunny - PARIS - 58 ans - 11 novembre 2017


Magnifique 10 étoiles

Si "La grande beune"m'avait profondément déplu, ce livre-ci narrant ces quelques vies mêlées à celle de l'auteur est profondément bouleversant.

Une écriture qui sublime, transforme ces "vies minuscules' en lettres majuscules et qui, en outre, nous offre une poésie intense.

Provisette1 - - 11 ans - 19 septembre 2014


Huit vies. Minuscules, dit-il. 6 étoiles

C’est sur la recommandation expresse de quelqu’une dont l’avis m’est cher que je me suis lancé à l’assaut de « Vies minuscules ». Sachant qu’elle lira ceci, je n’ai pas trop intérêt à écrire de c…. !
Je l’ai lu en fait en deux temps. Dans un premier temps, j’ai trouvé malin de l’écouter en version audio, puisque je l’avais trouvé en version audio. Raté, ce n’était pas une version intégrale, il n’y avait en fait que trois vies sur les huit du recueil. Je me souviens qu’un commentaire s’était de suite imposé à moi : Pierre Michon = Maupassant aux pieds crottés ! Commentaire qui scandalisât, je crois, la quelqu’une dont il est question plus haut. Reprendrais-je, maintenant que j’ai lu les huit vies, ce commentaire ? Peut-être pas. N’empêche c’est dit ! Pourquoi Maupassant aux pieds crottés, me direz-vous ? J’y avais trouvé un intérêt similaire pour de petites gens – bon, pas en Normandie, là c’est en Creuse – des paysans pour le coup, mais là où Maupassant savait trouver un biais pour s’élever, se sortir de la boue, je trouvais que Pierre Michon y restait collé, englué … Les pieds crottés quoi !
Et puis j’ai lu le recueil itself, dans son intégralité et là, c’est plutôt la difficulté de la langue qui m’a sauté aux yeux. Entre temps, ayant lu « Les onze » j’avais eu le temps de me roder ! Pierre Michon donne l’impression de rechercher constamment la difficulté, pire peut-être, de fuir parfois la simplicité. Quand on sort de chez Mingarelli et de son ascétisme, rentrer chez Michon c’est … un peu étouffant. Un peu comme rentrer chez Thomas Bernhard. Sauf que, d’après moi, Pierre Michon a davantage de choses à dire que Thomas Bernhard. Et la comparaison des deux ne me parait pas vaine, même en creux puisque si l’un ne fonctionne que par détestations, Pierre Michon pas.
Alors « minuscules » ? Ben oui, ces gens ne sont pas de grandes gens, mais … d’après ce que dit Michon, l’adjectif « minuscules » n’est là que pour signifier que ces vies, individuellement, ne sont pas devenues, à l’inverse, majuscules, de notoriété publique.
Chacune de ces vies a son intérêt. Toutefois, ce qui fait certainement le plus débat, et ce sur quoi se focalisent ceux qui débattent sur « Vies minuscules » et Pierre Michon, c’est bien sa langue, ce langage qui serait né en même temps que « Vies minuscules ». Dont voici un extrait :

"Je ne m'échappais de Mourioux que pour courir dans diverses villes des bordées qui décuplaient mon absence au monde, mais complaisamment la dramatisaient: sorti de la gare, je me jetais dans le premier café et buvais avec application, de bar en bar progressant jusqu'au centre; je ne me dérobais à ce devoir que pour acheter des livres ou empoigner des femmes consentantes. Chaque biture m'était une répétition générale, un radotage des formes déchues de la Grâce: car l'Ecrit, pensais-je, viendrait à son heure de la sorte, exogène et prodigieux, indubitable et trans-substantiel, changeant mon corps en mots comme l'ivresse le changeait en pur amour de soi, sans que tenir la plume me coutât plus que lever le coude; le plaisir de la première page me serait comme le frisson léger du premier verre; l'ampleur symphonique de l'oeuvre achevée résonnerait comme les cuivres et les cymbales de l'ivresse massive, quand verres et pages sont innombrables."
Quoiqu’il en soit, la lecture de « Vies minuscules » reste une expérience littéraire. On en ressort vaincu et contempteur ou vaincu et accusateur. Dans tous les cas de figures, pas d’indifférence.

Tistou - - 67 ans - 17 novembre 2010


Sublimation des modestes 7 étoiles

Pierre Michon veut rendre hommage aux petites gens qui ont marqué son enfance creusoise. Pour maquiller leur misère ou l'ordinaire tristounet de leur existence, il enrobe les menus détails qui composent leur vie par un style riche et maniéré, déconcertant, mais dont on finit à s'accommoder à la musicalité.
Mettre en lumière ces belles âmes de la France rurale relève d'une bonne idée : il veut rendre compte de ce qui ne peut l'être qu'avec difficulté. L'emphase ne se loge peut-être pas exactement là où je l'aurais souhaitée : je l'aurais préférée un peu plus au fond, fatalement marquée par la quotidienneté, plutôt que dans des effets de style parfois faciles, voire gratuits, défaut qui peut m'être personnel, je le reconnais.

C'est un livre intéressant, même si, je l'avoue avec un peu de rouge aux joues, ce n'est pas forcément le genre de choses que je préfère lire.

Veneziano - Paris - 46 ans - 26 février 2010


Un ami dans ma bibliothèque 10 étoiles

Oser « critiquer » Michon...impossible. Dire combien j'ai vécu des moments forts à la lecture des "Vies minuscules", seulement.

Il y a quelques années j'avais commencé à le lire. Mais, vite, très vite, je l'avais refermé ! Avec, sans doute, un haussement d'épaules en me disant que vraiment certains auteurs n'étaient pas pour moi (et à qui s'adressait-il d'ailleurs celui-ci, je l'ignorais). Sous la poussière qui s'accumulait, il a fait la marmotte pendant des années. Il aura fallu CL pour qu'à nouveau j'ose entrouvrir ce livre.
Et que j'ai été heureuse de pouvoir me dire combien j'avais eu tort !

Pour répondre à Fuku-San, dans un des forums sur Michon, j'écrivais « Si j'ai encore, je l'espère des dizaines d'années pour lire tous les classiques jamais lus qui commencent à remplir mes étagères -peu de recul donc et une critique à prendre avec de la distance- "Vies minuscules" est la lecture que j'aime par dessus-tout, celle qui fait que le livre reste des semaines près de moi, que tous les jours j'en lis un peu, que je relis d'ailleurs les passages lus la veille et qu'ainsi ma lecture n'avance pas d'un iota mais que cette écriture devient comme un indispensable, et que je crains déjà le moment où le livre sera fini, car même s'il existe la re-lecture des années plus tard, la magie de la rencontre, c'est en ce moment qu'elle fait. Te dire pourquoi, sans recul du temps cette fois, cette écriture me touche : il y a là d'abord, pour le thème abordé, un sujet qui me parle beaucoup : la littérature si elle remplit sa vie n'a pas été le bonheur de ces "minuscules" qui en étaient bien éloignés. Mais par-dessus tout, l'écriture. Ces associations osées, introuvables ailleurs, imaginatives et tellement bien placées que l'on peut se demander comment personne n'y avait pensé auparavant !! Et puis cette langue d'une richesse incroyable !! D'ailleurs pourrait-il être traduit ? L'est-il ? »...Je n'ai toujours pas la réponse...

Garance62 - - 61 ans - 25 janvier 2010


Je capitule 3 étoiles

Un livre trop lourd, trop érudit, aux phrases trop ampoulées. C'est une lecture désagréable, fatigante et stérile. Même si le style est très profond et très poétique, il faut se concentrer sur chaque phrase pour en saisir le sens. Je me suis arrêté à un tiers du livre. Je n'en peux plus.

Soldatdeplomb4 - Nancy - 34 ans - 6 juillet 2009


Roman prescindible 6 étoiles

En premier, je voudrais demander pardon pour mon mauvais français. Je suis espagnol et essayerai d'écrire compréhensiblement:
Sincèrement, je ne crois pas que cet livre mérite la réputation qu'il a. En Espagne on peut lire "Michon le meilleur écrivain français en exercice"...... et je ne connais pas beaucoup la littérature française actuelle mais par exemple Gracq, je le crois très supérieur à Michon. Vies minuscules est très bien écrit mais je ne rencontre le sens à tout ça. Qu'est ce que Michon veut dire avec son roman? Je n'ai rien appris de cet roman. Michon cherche la complication gratuite, sans aucune finalité. Quelquefois, M. est très sentimental mais avec le mauvais sens du mot. En espagnol "sentimentalismo fácil" "sentimentalisme facile" mais je crois que je ne peut pas faire la traduction littérale. (le chapitre de la "Vie de Foucault" par exemple est très indicatif de ça). C´est un bon livre mais NON une oeuvre perpétuel. Un roman PRESCINDIBLE


Sinceramente, no creo que este libro merezca la fama que tiene. Reconozco que está muy bien escrito, un estilo impecable, pero considero que Michon busca la complicación gratuita y el enrevesamiento sin ninguna finalidad. Es un libro que se lee gracias al buen estilo con el que está escrito, pero no le acabas de encontrar el mensaje, el sentido. En ocasiones (el capítulo de Vida del tío Foucault) me pareció bastante CURSI, abusa del sentimentalismo fácil. Lo considero un buen libro, pero en ningún caso una obra maestra. Prescindible.

L´espagnol - Oviedo - 37 ans - 15 juillet 2005


Dans le vrai 9 étoiles

A la lecture de ce livre, qui était pourtant imposé par mes études, je me suis trouvée en face de quelque chose qui m'a touché dès la première page (ou la deuxième, peut-être). On y sent la difficulté de dire l'autre, la volonté de raconter non pas des personnages imaginaires, lisses et prévisibles mais des hommes et femmes comme on peut en croiser, ceux qui font ou ont fait partie de la vraie vie et qui comme la plupart d'entre nous n'ont comme moyen de trouver un reste de vie après la mort que par la plume des auteurs comme Pierre Michon.
Le style est parfois difficile à suivre, il est vrai, et les phrases sont souvent longues. Mais il ne s'agit pas là d'un roman policier à dévorer, c'est une histoire de l'homme, qu'il soit médiocre ou pas, mais en tout cas de l'homme qui se trouve dans un monde où ses rêves, ses envies sont mis à mal par la réalité de ses origines.
Cette façon de décrire la vie sans être hypocrite et passer sous silence la mort et les douleurs, les incapacités m'a totalement troublée.
Pour ceux qui n'auraient vu là qu'une littérature hermétique, je leur conseille de reprendre ce livre pour y voir la vie... et si certaines phrases ne passent pas de continuer, l'émotion vaut parfois plus que la compréhension de chaque figure de style!

Titemy - Lyon - 37 ans - 13 février 2005


Michon en majuscules 9 étoiles

Pierre Michon est né en 1945 dans les profonds de la Creuse ; il est fils et petit-fils de paysans pauvres, on dit maintenant d’agriculteurs. Il a toujours préféré son art et sa campagne aux salons littéraires.
Ce livre est sorti en 1984, il consiste en huit courtes biographies de parents ou de proches. C'est à la fois le portrait d'un siècle et d'un milieu, celui de la petite paysannerie limousine.
Il y est question de destins ordinaires, petits, minuscules, d'hommes et de femmes que rien ne distingue de milliers d'autres.
Ce livre est séduisant, il faut le savourer sans précipitation, en prenant tout son temps. L'écriture est poétique et précise, les mots sont choisis et assemblés avec recherche.
A mon gré, Michon se lit le soir quand le bois crépite dans la cheminée, quand les bruits viennent de loin et qu’ombres et lumières dansent. A savourer après les châtaignes, la liqueur de cassis pas trop loin de la main.
Un écrivain intimiste ?

Léonce_laplanche - Périgueux - 87 ans - 2 décembre 2004


Vies minuscules 9 étoiles

Une critique ne doit pas être nécessairement positive, ce serait la fin de l' "esprit critique". C'est même très intéressant d'avoir des avis très divergents sur un même livre.

"Vies minuscules" m'est tombé entre les mains, par hasard. Je n'avais jamais entendu parler de Pierre Michon. J'en aimais le titre, c'est tout. Il m'intriguait aussi : des vies, pourquoi "minuscules" ? Lorsque j'en ai commencé la lecture, j'ai eu l'impression de me trouver face à un mur d'incommunicabilité, l'impression d'avoir sous les yeux un langage codé, destiné à certains intellectuels pétris de références et à la culture vaste comme le monde. Il m'intriguait cependant et c'est un peu par défi que j'ai persévéré. Parce que j'attends d'un auteur que je découvre qu'il me surprenne et Michon me surprenait vraiment. Au fil des pages, j'ai trouvé un fil. C'était comme si les pans d'une toile rugueuse s'écartaient et m'ouvraient à des émotions de lecture insoupçonnées. Par petites touches ciselées, Pierre Michon reconstruit le fil de sa vie déchirée lorsqu'il était tout petit enfant par le départ de son père, disparu, volatilisé. Il sculpte les phrases comme un orfèvre et peint au pinceau fin les miniatures de ces vies minuscules, de ces vies qui ont l'air si peu importantes et qui le rapprochent un peu de ce père à l'image évanescente.

Je crois que Pierre Michon est vraiment un très grand écrivain.

Maria-rosa - Liège - 68 ans - 2 novembre 2004


"Vie de la petite morte" 10 étoiles

Ouvrir ce livre et se familiariser avec la langue, le style de Pierre Michon. S'arrêter un instant, revenir, reprendre, goûter à ses tournures, sa poésie. Si ce livre n'est pas facile d'accès, je le concède, c'est qu'il faut le lire avec patience, sans hâte. L'auteur se dévoile à travers ses souvenirs d'enfance, à travers les vies des autres dont on n'est pas sûr qu'elles furent réellement, ou alors si peu...
Les différents textes sont graves, font parfois mal, mais laissent entrevoir derrière une réalité abrupte des sentiments simples, bruts et rares.
Le texte atteint son paroxysme dans "Vie de la petite morte", en hommage à une soeur défunte. Le style est magnifique, rare. Et sous ce que certains peuvent croire être de l'emphase, de l'esbrouffe, il réussit à rendre compte de ces "gens né plus près de la terre et plus prompts à y retourner derechef".

Fuku-san - Lille - 44 ans - 22 octobre 2004