Puisque mon coeur est mort
de Maïssa Bey

critiqué par Pucksimberg, le 4 octobre 2020
(Toulon - 44 ans)


La note:  étoiles
La dialogue douloureux entre une mère et son fils mort
Dans ce roman, une mère s’adresse à son fils mort dans de courts chapitres. Elle crie sa souffrance, les aberrations des rites du deuil qui impliquent parfois des choix qu’elle ne partage pas et souhaite vengeance aussi. « Puis que mon cœur est mort » est un roman sur le deuil et sur les années 90 en Algérie.

Ce roman est sombre et confronte le lecteur à l’absence d’un être cher, situation connue malheureusement par le plus grand nombre … Evidemment, dans ce roman, le motif de cette disparition est moins ordinaire. Les chapitres sont touchants sans pour autant tomber dans le pathétique. Cette figure maternelle trouve les mots pour nommer ses maux. Cet échange avec son fils permet de garder le lien avec cet être précieux. Le dialogue est vif, portant à la fois sur des sujets importants et sur le quotidien. Cette discussion avec un mort ne peut que marquer l’esprit du lecteur.

La langue de Maïssa Bey est poétique. On sent que l’écrivaine cherche le mot juste pour dire la douleur de son personnage. J’avoue que certains mots plus recherchés détonnent parfois dans ces phrases qui reposent essentiellement sur un vocabulaire très accessible. Cette alternance de registre de langue m’a quelque peu gêné. J’avais presque l’impression qu’il y avait quelque chose d’un peu artificiel dans certaines phrases, comme s’il y avait des inégalités dans le style … C’est sans doute totalement subjectif, mais il n’empêche que j’ai eu cette gêne.

Le roman reste touchant et se lit rapidement car la brièveté des chapitres invite à une lecture soutenue. La situation de cette mère doit rappeler de nombreuses figures maternelles en Algérie, ce qui souligne que cette situation n’est pas rare et significative pour de nombreuses personnes. Ce qui est beau dans ce roman est la relation entre une mère et son fils avec sa part de non-dits et de secrets propres peut-être à une majorité de fils. En cela, le roman a une portée universelle. La fin de ce roman est marquante, mais je n’en dirai pas plus pour ne rien divulguer.

Ce texte est douloureux par son sujet, mais il porte la marque de situations réelles qui peuvent broyer des individus.