1969, année fatidique
de Brice Couturier

critiqué par Colen8, le 4 septembre 2020
( - 82 ans)


La note:  étoiles
Sous le voile irénique des Trente Glorieuses
Le coup de projecteur sur cette année que rien ne semble distinguer entre deux décennies interpelle. Que les jeunes ne s’y laissent pas prendre, que les anciens n’en soient pas nostalgiques, 1969 masquée par l’échec de 68 à lancer la révolution mondiale concentre déjà ce que le monde entier peut redouter de la période actuelle. D’étranges parallèles de situations se dessinent à partir de l’ambitieuse archéologie(1) géopolitique, sociologique et culturelle entreprise par Brice Couturier entre les deux rives de l’Atlantique jusques et y compris dans des républiques populaires de l’ex-URSS.
La Nouvelle Gauche américaine investie un temps dans la lutte sans violence pour les droits civiques de Martin Luther King s’est vite désagrégée. Des formations concurrentes présentes un peu partout, très actives au sein des universités se sont laissé gagner par l’escalade des provocations sur fond de guerre au Vietnam. En marge de la libération sexuelle, un terrorisme d’attentats intérieurs, des actes de barbarie, principalement aux Etats-Unis, en Italie, en Allemagne de l’Ouest n’ayant rien à envier à ceux d’aujourd’hui ont fait la une des médias.
Le confort, la prospérité à des niveaux jamais atteints dans les pays occidentaux, le progrès technologique et l’informatique naissante matérialisés par la réussite du premier vol habité sur la Lune, n’ont suscité que désenchantement chez les baby-boomers. Des mouvements radicaux et violents au fil des ans sont apparus, à l’origine des dérives identitaires de plus en plus fragmentées menaçant non seulement le consensus largement admis antérieurement mais aussi l’idée de progrès héritée des Lumières. Les productions philosophiques, littéraires ou musicales de cette période en témoignent abondamment.
Par un curieux basculement le retour en force des idées de la fin des sixties prônées par les intellectuels de gauche a gagné les esprits des classes dirigeantes. « A chacun sa vérité », ce slogan brandi en toutes circonstances par le président américain à la face du monde n’est autre que la traduction d’un relativisme politique et culturel contre lequel aucun argument rationnel n’a de prise. Témoin de premier ordre quand étudiant en lettres à l’université « expérimentale » de Vincennes Brice Couturier reconnait s’être fourvoyé de bonne foi avec tant d’intellectuels d’alors dans la mouvance maoïste, il propose les clés pour réfléchir sur ses analyses inédites.
(1) Au sens où l’entendait Foucault dans « L’archéologie du savoir (1969) ».