Sur les ruines de l'Europe
de Daniel Fano

critiqué par Débézed, le 1 juillet 2020
(Besançon - 76 ans)


La note:  étoiles
Tétralogie - Opus III
Daniel Fano Tétralogie

En commençant ce troisième opus de sa tétralogie, Daniel Fano pensait peut-être au célèbre poème de François Villon : « La ballade des pendus ». Je n’ai pas pu éluder cette éventualité en lisant cet extrait : « … il s’est arrêté sous la potence, et le bourreau lui a passé la corde au cou … Il s’est appelé Ribbentrop, Rosenberg, Jodl, Keitel, Kalten-brunner, Frick, Frank, Steicher, Sauckel, Seys-Inquart ». Comment introduire plus judicieusement un texte qui s’intitule « Sur les ruines de l’Europe » qu’en rappelant le sort de ceux qui sont parmi les pires fripouilles, les premiers responsables, de l’indicible horreur qui a déchirée l’Europe, les pires horreurs jamais perpétrées au cours des siècles. C’est sur les ruines de cette Europe que Daniel Fano a construit son texte, en évoquant la bataille de Stalingrad, la destruction de Dresde et bien d’autres malheurs qui ont déchiqueté l’Europe et le monde pendant et après la guerre et même au début du nouveau millénaire.

Comme dans ces autres opus Daniel collectionne ces événements en les mêlant avec des fictions, films, romans, des faits divers plus ou moins mémorables, des catastrophes naturelles ou humanitaires plus ou moins dépendantes de la volonté et de la négligence des hommes, des événements politiques ou géopolitiques, tout de ce qui constitue et agite le monde et ses occupants. On rencontre aussi dans son texte, les héros qu’il balade d’un livre à l’autres, ses célèbres héros sadiques, cyniques et sanguinaires. Je ferais bien mienne cette citation que j’ai lu dans la présentation d’un autre ouvrage de Daniel Fano : « non content de passer les clichés du roman d’espionnage à la moulinette, l’auteur entraîne ses personnages vers leur devenir-machine, ils ne vont plus tarder à entrer dans la post-humanité ». Je partage volontiers cette interprétation même si, quelques mois avant sa mort, Daniel me confiait lors d’un échange de courriels qu’il ne se considérait pas comme un destructeur, il voulait simplement exposer, dénoncer, tous les travers véhiculés par les médias diffusant la culture populaire.

Sur fond des airs musicaux qui ont bercé notre jeunesse, même si pour la plupart d’entre eux ils n’étaient pas particulièrement adaptés à ce genre musical, il a écrit un texte qui sonne comme un vieux rock n’roll avec des mots qui swinguent, qui claquent, qui hurlent, qui chantent dans des phrases courtes, percutantes, vibrantes comme les vers des refrains de ces fameux tubes qui ont fait danser notre jeunesses sur un rythme haletant.

Dans ces textes très modernes, gavés de noms propres qui claquent comme des rafales de kalachnikov, pétaradent comme les moteurs des énormes tires américaines, Daniel Fano exprime son inquiétude devant le monde que nous croyons connaître, que nous croyons comprendre. Et pourtant, « Les choses ne sont pas ce qu’elles paraissent : il y a un décalage entre ce qu’elles sont vraiment et comment elles sont perçues ».

Lisons attentivement le message de Daniel, dans les quatre tomes, il comporte certainement des éléments de réponse aux questions soulevées par les diverses crises que nous connaissons actuellement.
- L’année de la dernière chance
- Sur les ruines de l’Europe
- La vie est un cheval mort