Les coquillages de M Charbe
de Émile Zola

critiqué par Numanuma, le 4 juin 2020
(Tours - 50 ans)


La note:  étoiles
Un Zola plus léger qu'à l'accoutumée
Je l’avais déjà repéré ce bouquin, il y a quelques mois, pour deux raisons : d’abord grâce à sa couverture rayée violet et blanc qui rappelle les cabines sur les plages de Normandie au début du siècle, et puis parce que Zola ! Oui, il s’agit d’un court récit de Zola, une sorte de repos au bord de la mer entre deux chapitres de L’Assommoir.
Zola est alors à Piriac, en Bretagne, sur les conseils d’Alphonse Daudet. Il profite de son séjour, de la mi-juillet à septembre 1876, pour pêcher et se délecter de coquillages, nourritures qui restent pour moi un insondable mystère.
Cette nouvelle est parfaite pour ceux qui, les pauvres, n’aiment pas Zola. La taille de l’ouvrage permet au lecteur d’échapper aux habituelles descriptions qui hantent les cauchemars des lycéens et des amateurs d’action. Pour faire simple, Zola n’y fait pas du Zola.
On pense plutôt aux contes de Maupassant, grivois ou non, se déroulant sur les bras de la Marne. On y retrouve également des moments flaubertiens, notamment dans cette description du héros, M. Chabre : « Sa face blême, usée par les soucis de l’argent, était plate et banale comme un trottoir ». Il y a du Flaubert dans cette description féroce, dans cette économie de mot, dans cette comparaison qui tient de la condamnation ferme et définitive. M. Chabre n’a pas d’épaisseur. Il y a du Charles Bovary dans son amour immodéré et aveugle pour son épouse, la belle M. Chabre, qu’il honore régulièrement mais qui lui refuse pourtant toujours un héritier : (…) « depuis quatre ans, il attendait anxieux, consterné, blessé de l’inutilité de ses efforts ».
Oui, M. Chabre est stérile et il le seul à ne pas le comprendre. Son médecin lui conseille une consommation de fruits de mer. Le voila donc parti en bord de mer, avec son épouse.
Je ne dévoile pas plus l’intrigue qui lorgne plus du côté de Maupassant que de Flaubert je pense. Zola s’est fait un petit plaisir non naturaliste pendant ses vacances qui ne restera pas dans ses œuvres majeures mais qui dévoile une facette méconnue du romancier. Un sorte de plateau de fruits de mers arrosé d’un petit blanc sec agréable mais pas inoubliable.