La lune éclaboussée, meurtres à Maubeuge
de Carine-Laure Desguin

critiqué par Kinbote, le 23 mai 2020
(Jumet - 65 ans)


La note:  étoiles
Sang d'encre
Le roman débute alors que Jenny Dalooz se rend chez Olivier Garnier, le fils d’un écrivain réputé, Michel Garnier, auteur de polars, mort d’une crise cardiaque, pour faire l’acquisition d’un lot de livres lui ayant appartenu.

Jenny Dalooz, personnage central du roman, est une jeune enseignante en sciences, attachante à plus d’un égard, qui se pique d’écrire et qui, pour l’anecdote, suce sans cesse des bêtises à la pomme verte. Un ticket de caisse trouvé dans un des livres de l’auteur à succès la persuade que l’écrivain, au charme duquel elle n’était pas insensible, n’est pas décédé d’une mort naturelle. Elle entreprend de mener l’enquête…

L’enquête à peine commencée, avec l’aide de ses tontons, mais à l’écart de sa cousine commissaire en chef, se corse quand on apprend que deux meurtres ont été commis à Maubeuge et que les deux hommes assassinés ont eu partie liée avec Michel Garnier dont la vie sexuelle était tourmentée.

Le décor est planté, à Maubeuge donc, qui, rendu par Carine-Laure Desquin et clair de lune oblige, participe à la fois du mystère propre au roman noir mais confère aussi à l’histoire narrée et ses rebondissements sa part de merveilleux.

Car l’un des charmes de ce roman réside dans le fait qu’il joue sur les genres littéraires.

Le sordide y voisine avec le cocasse et les esprits les plus vils s’opposent aux coeurs purs, le noir se teinte ainsi du bleu de la romance et du rose parme de la sensualité en passant par un large palette de sensations.

Le mobile des crimes est ce qui va faire verser le livre d’un genre dans l’autre, du polar au conte. Mais fallait-il s’attendre à autre chose dès le moment où, très tôt, il apparaît que le roman a pour objet le meurtre d’un auteur de polar et que le sang d’encre, plusieurs fois évoqué dans ses lignes, coule dans les veines des protagonistes de l’intrigue.

Cette mise en abyme initiale va tout du long donner le tournis au lecteur jusqu’à la fin du roman prodigieuse, au sens littéraire du terme.
Maubeuge dans la tourmente 9 étoiles

Jenny, jeune femme pétillante, professeur de sciences donnant des cours particuliers en attente d'un nouveau poste, se trouve mêlée bien malgré elle à une enquête policière des plus surprenantes. Elle rêve aussi d'écrire des romans, policiers, justement, et trouve en cette histoire un booster d'inspiration.

Carine-Laure Desguin nous offre dans ce livre une enquête menée tambour battant. Au rythme de Jenny, autour de laquelle toute cette histoire se dénoue. Assistée de ses tontons de coeur, détectives à leurs heures, elle essaiera de comprendre pourquoi son auteur préféré, Michel Garnier, enfant de Maubeuge et auteur de polars à succès, est mort subitement. En se plongeant dans son intimité, elle avait tissé des liens, des échanges de mails lui faisaient espérer une rencontre prochaine, et puis... Le malheur est arrivé, et comme il n'arrive jamais seul...

"La lune éclaboussée, meurtres à Maubeuge", c'est frénétique, l'auteure ose et va très loin dans la noirceur, le crime, les complots.
C'est aussi un défilé de personnages hauts en couleur, caricaturaux souvent, mais qui sont tellement vrais. On les croise chaque jour, ces protagonistes, si bien dessinés et analysés par la plume. Au-delà de l'intrigue policière, les thèmes d'origines, de violences, d'enfances difficiles, et bien d'autres encore, sont évoqués. Chacun des personnages présente une ou des blessures, qu'ils ont dû surmonter et qui les ont forgés.
C'est encore un air de folie, de légèreté, des notes d'humour, des clins d'oeil, on ressent le plaisir certain à cette écriture, les personnages virevoltent , les décors se succèdent, et la Sambre, rivière locale, apaise tout ce petit monde et recueille les confidences.
C'est enfin la ville de Maubeuge, remarquablement mise à l'honneur dans ce livre, avec moult détails. Tout est précis, et on imagine l'implication et le travail autour de cet ouvrage, très documenté et plein de véracité.

Nathafi - SAINT-SOUPLET - 57 ans - 26 décembre 2020


Affaire pas claire à Maubeuge 8 étoiles

« Les derniers livres de la bibliothèque personnelle de Michel Garnier attendent un acquéreur. Invitation à tous. Olivier Garnier ». Jenny, une fan de cet auteur à succès de romans policiers, vedette de Maubeuge, principale célébrité vivante jusqu’à que son corps soit trouvé sans vie dans sa cuisine. Jenny, jeune africaine professeur de physique chimie, veut acheter ces livres, elle veut sentir dans ses mains les ouvrages touchés par l’auteur qu’elle admire et qu’elle aime. Comme elle n’est pas arrivée assez tôt elle n’a pu acheter que trois cartons de livres, elle trouve à sa grande surprise dans l’un des livres qu’elle a sorti, un ticket de caisse sur lequel est écrit : « Ma vie est en danger. On veut ma mort. Tout mon sang est d’encre ».

Jenny est convaincue que Michel Garnier n’est pas décédé de mort naturelle mais qu’il a été assassiné et elle veut savoir par qui et comment ? Pour cela, elle appelle ses deux protecteurs, Tonton et Tontaine, les deux amis de son père qui veillent sur elle, avec vigilance et bienveillance, depuis que ses deux parents sont décédés dans un accident de la circulation routière. Ils croient qu’elle se fait un film que son amour secret pour l’écrivain l’aveugle mais ils finissent par accepter de mener l’enquête. Ils la croient d’autant plus que de nouveaux meurtres endeuillent la ville mettent la police sur les dents, notamment la chère cousine de Jenny qui l’a violée alors qu’elle n’était encore qu’une enfant.

La situation ce tend e plus en plus et Jenny est impliquée dans l’affaire, les mails qu’elle a échangés avec l’écrivain intriguent la police et pas que la police. Le fameux ticket de caisse est aussi un indice très recherché par d’autres personnes impliquées de près dans l’affaire. Carine-Laure noue une intrigue bien ficelée où les héros ne sont pas tous stéréotypés, la policière n’est claire, les petits jeunes ne sont peut-être pas des voyous, les drogués ne le sont pas forcément, certains personnages sont fort mystérieux. Jenny elle-même n’est pas une oie blanche ni même, considérant ses origines, une oie noire. Elle se laisse porter par les événements pour, au bon moment, porter l’estocade en laissant les autres avec leurs convictions.

En bonne Carolorégienne, l’auteure connait bien Maubeuge, « là où la plupart des gens ne voient qu’une ville du Nord pleine de grisaille et de poussières, désertées de ses sidérurgies et autres industries ». Comme Simenon a planté de nombreuses intrigues dans des petites villes de province : Concarneau, La Rochelle, …, Carine-Laure, elle aussi, a choisi de d’installer son intrigue dans une petite ville un peu endormie où tout le monde se connaît et s’observe.

Un bon polar qui pourrait éventuellement appeler une suite, la matière est suffisante et le dénouement laisse quelques portes entrouvertes pour y glisser des événements ou des indices qui pourraient éventuellement faire rebondir l’enquête et provoquer la naissance d’un nouveau polar. Alors, Carine-Laure, vite un petit paquet de « bêtises à la pomme verte » et en route pour la suite des aventures de jenny.

Débézed - Besançon - 76 ans - 27 mai 2020