Ça, c'est un baiser
de Philippe Djian

critiqué par Sibylline, le 26 juillet 2004
(Normandie - 73 ans)


La note:  étoiles
Ca, c'est un roman!
Alors voilà comment ça s’est passé. C’était mon premier Djian et je n’avais aucun a priori. Je ne savais pas du tout à quoi m’attendre. J’ignorais même si j’avais en main un polar, une « tranche de vie » ou un roman d’amour. J’y allais, justement, pour voir. Et j’ai vu ! J’ai d’abord surtout vu que j’avais du mal.
Depuis le début, je lisais une histoire que je ne comprenais pas du tout. J’assistais à des scènes incompréhensibles, totalement en référence à des évènements dont j’ignorais tout et qui ne m’étaient révélés que quelques pages plus loin. Cela se présentait comme un récit à deux mains. Un des flics racontait une partie de l’histoire à la première personne, l’autre enchaînait. Les dialogues étaient sibyllins. Souvent en référence à des données que l’on n’avait pas. Il arrivait même que je ne comprenne pas avec certitude qui disait quoi. Je relisais, mais non, on ne pouvait pas être sûr. Et puis, j’étais larguée par des ellipses un peu trop radicales pour moi. Quand, par exemple, le personnage qui parle saute plusieurs heures et un évènement déterminant entre le début et la fin de sa phrase! On comprend, un peu plus loin seulement, ce qu’il a voulu dire… Il y a de quoi être complètement déboussolé.
Si bien qu’après 120 pages, j’ai conclu que je n’y comprenais rien et que je ne pouvais pas continuer comme cela et, au lieu de balancer le bouquin à travers la pièce, comme je suis zen, j’ai décidé de tout reprendre depuis le début. Mais cette fois, je savais comment cela marchait. J’avais appris à me méfier. J’avais compris que je devrais chercher ce que je voulais savoir et, donnée de base majeure, que le bouquin était monté à l’envers. (Procédé qui se ralentit plus loin, pour reprendre de plus belle au final, pour les 60 dernières pages.)
Au deuxième démarrage, ça s’est mieux passé. J’ai même pu admirer l’astuce et la finesse du montage, maintenant que je le voyais et que je savais où il me menait.
Ce roman est une histoire policière dans la mesure où c’est l’histoire de deux flics qui cherchent à découvrir un meurtrier, mais c’est aussi, et tout autant, tout autre chose. Ce sont des histoires d’amour compliquées (elles le sont souvent, je sais, mais avec Nathan, plus encore). Ce sont les récits de vies. Dans un roman policier, l’intrigue est au centre du livre, la personnalité des personnages soutient l’énigme. La vie privée des enquêteurs, si elle apparaît parfois en arrière-plan, ne sert justement que d’arrière plan, de décor. C’est pour étoffer la crédibilité. Ici, tout au contraire, la vie privée de nos deux flics a autant d’importance que leur enquête, chacune se mêlant d’ailleurs largement à l’autre. Et ce n’est plus un roman policier, c’est un roman de vie privée – Si. Cette expression existe puisque vous l’avez comprise- et l’enquête en est le décor. La vie privée de ces deux enquêteurs en est le centre. L’un des héros, Nathan, se débat à l’entrée de sa vie d’adulte. Il est temps pour lui de choisir une voie et il a peur de se tromper. Djian nous donne à voir les différents plans sur lesquels évoluent, pensent et réagissent les personnages. Les différentes facettes de leur vie rendent bien compte de la multiplicité et de la complexité des vies humaines. Comme nous avons les deux angles de vue des deux personnages, comme deux caméras sur les lieux, nous constatons comme ils peuvent se méprendre sur l’autre alors même qu’ils font de leur mieux pour le comprendre. Forcément, on se dit que cela doit nous arriver à nous aussi.
Il faut que je m’arrête, mon commentaire devient trop long, je crois que je pourrais parler de ce livre pendant des heures . Tout cela sans déflorer l’histoire. De toute façon quand j’aurai dit qu’il faut le lire, j’aurai tout dit.
Pourquoi ça s’intitule « Ca c’est un baiser » ?
Ca, je n’en ai pas la moindre idée.
Un faux polar, un vrai Djian 8 étoiles

Nathan et Marie-Jo, deux flics amis/amants, se retrouvent embarqués dans une affaire de meurtre, la victime étant la fille d'un potentat industriel.
N’attendez pas de ce polar une enquête minutieuse ou des rebondissements spectaculaires, vous serez déçus. Là n’est pas l’intérêt principal de ce roman, du moins est-ce mon point de vue.
Comme à chaque fois avec Djian, le style fait la différence, l'histoire au fond n'étant qu'un prétexte pour nous raconter la vie d’êtres noyés dans le quotidien d’une grande ville. Les personnages, parlons-en, sont une fois de plus le point fort d'une lecture agréable et prenante. Les dialogues eux aussi amènent une touche supplémentaire à un ensemble qui tient la route.
Djian est vraiment un auteur à part, un excellent romancier, bref ma valeur sûre.

Sundernono - Nice - 40 ans - 6 janvier 2023


Du Djian comme nous l'aimons 8 étoiles

Je lis tous les Djians (à l'exception de la série Doggy bag, j'ai dû arrêter au premier livre). Ca, c'est un baiser est du Djian pur: source sûre et désespéramment agréable.

Boudinet33 - - 45 ans - 29 novembre 2013


ça, c'est quoi ? 4 étoiles

Mr Djian, je suis déçu. Disons le tout de suite : L'attaque du livre n'est pas à la hauteur. Le lecteur est amené, intelligemment certes, dans un dédale habilement construit mais qui désarçonne voire qui ennuie le lecteur. Ce roman est long à démarrer. Mais un fois passé ces pages, on entre dans un bouquin intéressant qui nous conduit malheureusement à une fin prévisible.

Ceci étant dit, personne ne peut enlever à Philippe Djian son extraordinaire écriture. Son style immédiatement reconnaissable est accrochant. Nous sommes en présence d'un très grand auteur, nous en sommes certain.

Mais, là, je suis désolé mais non, Djian n'a pas fait un bon livre. C'est un roman qui se lit facilement mais qui s'oublie aussi très vite.

une erreur de parcours Heureusement......

Tchico2 - Labenne - 48 ans - 13 janvier 2006


ça, c'est un bémol ! 6 étoiles

J’ai eu l’occasion de lire beaucoup de Djian quand j’avais 20-25 ans, Bleu comme l’enfer, 37,2 le matin, Maudit manège, Zone érogène, Echine, etc… bref j’ai dû en lire une bonne dizaine. J’avais envie de retrouver ce plaisir indéniable que j’éprouvais alors ! Déception ! Déception froide et glacée de parcourir ces pages qui sont dénuées du style, de la verve, de la profondeur et de la hargne qui avaient fait de Djian le rebelle français des années 80.

Par contre, l’idée de cette écriture à deux mains, où le narrateur change et où donc les perceptions des événements changent est assez intéressante et ajoute quand même un peu de plaisir à la lecture.

Dans ce pseudo roman policier, rien de bien grave ne se passe, je ne dis pas non plus que c’est une vie banale que celle de Nathan et de Marie-Jo… mais bon, ce n’est pas l’ancien Djian noir et pessimiste. On suit les personnages qui eux-mêmes suivent leur vie, une vie faite de hauts et de bas, mais sans sauts ou soubresauts !

Bref… bof ! Loin, très loin d’être son meilleur !

Pendragon - Liernu - 53 ans - 12 septembre 2004


Baiser, quel baiser? 8 étoiles

Peut être pas le meilleur DJIAN mais ça reste DJIAN, avec son écriture fluide et vivante, ses histoires alambiquées et pourtant dans la limite du plausible, ses études de caractères de déjantés (ou limite) aussi fines. CA C EST UN BAISER, pourquoi le titre? Oui pourquoi, on ne sait pas.
Ca n'empêche qu'on le recommendera quand même. Tendance polar-études psychologiques, et surtout djianesque.

Tistou - - 67 ans - 19 août 2004