Dostoïevski
de Virgil Tanase

critiqué par Incertitudes, le 21 mars 2020
( - 39 ans)


La note:  étoiles
Loin d'être un idiot
Dostoïevski pourrait être le héros d'un de ses romans ou même d'un film. Cette biographie n'est pas à la gloire de Dostoïevski. Virgil Tanase en brosse un portrait complet. Avec ses zones d'ombre et de lumière.

A la base, il se destine plutôt à une carrière de militaire et d'ingénieur. Son père ne voit pas d'un très bon œil ses ambitions littéraires. Sa participation à des salons littéraires (le fameux cercle de Petrachevski) où il cause autant d'art que de littérature ou de politique le conduira tout droit au bagne en Sibérie en raison de ses idées.

Ce séjour le marquera tellement qu'il en tirera Les Souvenirs de la maison des morts. Ce sont les années d'errance. Après son emprisonnement, il voyage à travers l'Europe, choppe le démon du jeu, perd tout ce qu'il a. Son aversion pour l'Europe, la France, l'Allemagne, ne se démentira jamais. Comme il y perd un enfant, ça n'aide pas.

Durant toute sa vie, Dostoïevski connaîtra une santé précaire, des problèmes d'argent, un caractère ombrageux. Ça ira mieux quand il se mariera avec sa sténo Anna Grigorievna. Cette femme l'aura sauvé de l'addiction du jeu. Elle sera son ange gardien. C'est celle qui tiendra les cordons de la bourse. Elle ira même jusqu'à vendre elle-même les livres de son mari.

Vers la fin de sa vie, il deviendra de plus en plus croyant et conservateur. Alternant son métier d'écrivain et celui de rédacteur en chef, il se croit investi d'une mission : celle de donner son avis sur les sujets de société florissant dans les quotidiens russes qu'il lit minutieusement. C'est là où l'auteur parlera parfois de discours creux où limite Dostoïeveski s'écouterait parler. Après, il avait l'air d'avoir la cote auprès des jeunes. Il parlait souvent avec eux et cela nourrissait ses romans. On est loin de l'image de l'écrivain enfermé dans son bureau, entouré par ses livres, déconnecté de la réalité.

C'était tout ça Dostoïevski. Un écrivain extrêmement complexe. Fragile, jaloux, froid, prétentieux, ne sachant pas gérer son argent. Mais aimant profondément sa femme, ses enfants, son pays. Intelligent, cultivé, persuadé d'être un génie de la littérature. En même temps, encensé comme il l'a été dès son premier roman (Les Pauvres Gens), la tête peut vite tourner.