Théories de la dégénérescence: D'un mythe psychiatrique au déclinisme contemporain
de Jacques Hochmann

critiqué par Colen8, le 13 février 2020
( - 82 ans)


La note:  étoiles
Au cœur de la pensée réactionnaire
Existerait chez les plus virulents détracteurs de l’islam en France un désir inavoué de conversion à cette religion pour son image de virilité, reflet d’une antique société patriarcale niant de facto l’émancipation féminine toujours fragile si récemment acquise. Telle est l’audacieuse conclusion du psychiatre-psychanalyste au terme de sa recension des auteurs anti-Lumières, ceux qui ne cessent de dénoncer la décadence morale, la dégénérescence physique, la fin de la civilisation européenne, et ce depuis la Révolution.
La référence biblique à la faute qui fit bannir Adam et Eve du Jardin légitime selon Saint Paul la rédemption par le Christ, et devient avec Saint Augustin influencé par les philosophes grecs le péché originel, véritable dogme transmis dans l’acte sexuel à tous les descendants. L’idée novatrice du bonheur terrestre véhiculée par les artisans des Lumières s’en remettant à la raison déclenche une forte opposition toujours présente dans les milieux catholiques et généralement conservateurs qui semblent rejoindre sur ce plan les intégristes islamistes.
Des médecins du XIXe siècle et du suivant précédant les avancées de la biogénétique et des neurosciences se sont fait fort de rattacher troubles mentaux, troubles du comportement, handicaps physiques, économiques et sociaux à une hérédité déterministe et incurable dans certains cas, offrant peu de chances d’en sortir pour les autres. Un peu plus tard une interprétation biaisée de l’évolution darwinienne a conduit certains polémistes à théoriser en guise de solution le racisme et son corollaire l’eugénisme, dont on n’a pas fini de mesurer les ravages.
Les adversaires de la pensée progressiste sont souvent ceux de la démocratie. Rejoignant l’idéologie d’extrême gauche, faisant peu de cas de l’éthique, ils reprennent encore et toujours les mêmes arguments sous une sémantique différente conduisant à rejeter la mondialisation, le métissage ethnique, l’immigration des pays du Sud, les études de genre, à dénoncer l’éclatement de la famille, l’alignement par le bas des valeurs dites traditionnelles, à craindre la perte d’une identité nationale, à chercher à défaut d’un impossible retour arrière une sortie au travers de l’homme augmenté par le transhumanisme.
Sont ainsi articulées successivement les thèses moralisatrices de dizaines de philosophes, romanciers, médecins psychiatres, psychanalystes, journalistes, historiens, qui donnent matière à réfléchir.