Tercets du dimanche
de Thierry Radière

critiqué par Débézed, le 5 décembre 2019
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
La fête éphémère
Les courtes poésies en vers libres exprimant souvent la vie quotidienne, les rites familiaux, la campagne de son enfance, la douceur familiale, la vie lente et paisible contrastant avec l’agitation citadine, sont vraiment le domaine de prédilection de Thierry Radière, il y excelle particulièrement. Après « Les samedis sont au marché », il évoque ici les dimanches paisibles qu’il passait, enfant, dans sa campagne ardennaise. Et brusquement, après la lecture de quelques tercets seulement, des tercets comme des images, ja’i été immergé dans ma propre enfance passée elle aussi dans une autre campagne sur les plateaux jurassiens. Et j’ai revu mon père tellement heureux de partager la sacro-sainte partie de carte du dimanche après-midi avec ses enfants et des voisins.

« Le jeu de carte après le café
sur la nappe à fleurs
claquait les poings "

C’est une image très forte, elle fait partie des dernières que j’ai partagées avec mon père, comme les balades dans la campagne que nous avons prolongées quand nous sommes devenus nous-mêmes parents.

« le chemin derrière la maison
dès qu’il n’y a plus rien à faire
nous invite à retrouver les pas de notre enfance ».

Ce recueil ce sont tous les souvenirs que Thierry a mis en mots harmonieux, en couleurs, en saveurs et en odeurs, tout ce qui a construit notre mémoire familiale, celle que nous avons partagée avec nos parents et que nous avons transmis à nos enfants et petits-enfants. Ces fameux dimanche où il fallait sortir « les habits du dimanche »

« C’est le jour du tergal
au pantalon lors de la messe
des sourires d’anges démangent »

Ces dimanches rythmés par les programmes de la télévision quand il n’y avait que deux ou trois chaînes, selon les époques, et que tout le village vivait au même rythme, celui de la télévision.

« Quand à la télé
à l’heure du goûter
les cow-boys mouraient subitement »

C’est aussi le repas du dimanche élaboré avec les produits de la ferme, un festin comme on n’en mange plus, les produits de nos cultures et de nos élevages n’existent plus. On ne savait pas ce qu’était la diététique mais on connaissait bien la gourmandise.

« La cuisine est un musée
du dimanche olfactif
elle a laissé des traces dans les rides. »

Le dimanche c’est le jour après le samedi qui souvent laissait les stigmates de la fête dans les têtes embrouillées et le jour avant le lundi générateur du spleen du dimanche soir qui sonnait comme un air de fête qui se termine.

« Et la grasse matinée
dans ses habits du dimanche
sait bien que ce n’est qu’une répétition »

« Et enfin le dimanche arriva
dans ses habits du soir
avant même que la journée ne débute »

Ce jour tellement attendu, si vite passé, achevé dans une ambiance empreinte d’une pointe d‘amertume. Je laisserai la conclusion à Thierry avec la question qu’il nous adresse et à laquelle je ne sais pas répondre.

« A-t-on inventé ce jour
Pour donner une pointe d’espoir à la vie
Des travailleurs jamais tranquilles ? »