L'aurore
de Selahattin Demirtas

critiqué par CHALOT, le 5 décembre 2019
(Vaux le Pénil - 76 ans)


La note:  étoiles
des nouvelles passionnantes
« L'aurore »
livre de Selahattin Demirtaş
Editions Emmanuelle Collas
125 pages

12 nouvelles de prison


Même la dictature qui règne en Turquie n'arrive pas à empêcher que des talents puissent éclore .
Ce livre étonnant qui montre qu' « en prison son rêve est devenu littérature » est une œuvre féministe, progressiste et humaniste où l'espoir est à tout jamais présent.
Chaque nouvelle est différente, évoquant ici un drame, celui de la traversée tragique en bateau et là une leçon de vie écrite sous l'anonymat par un père à sa fille.
La vie mérite d'être vécue et la recherche du bonheur ne peut se résumer à une course vers une réussite matérielle qui fait oublier la vraie vie :
« ce rythme de travail frénétique et cet appétit d'argent insatiable finissaient faire de nous des robots.... »
Si les douze nouvelles m'ont touché, la deuxième m'a particulièrement ému, c'est celle qui raconte la vie très courte et dramatique de Seher qui, enlevée et violée par des monstres, est exécutée par son père, ses oncles et son frère pour des questions « d'honneur » :
« Le mal est fait, dit le père, il arrivera ce qui doit arriver.... »
L'honneur est à géométrie variable, il ne concerne ni le père ni son grand fils qui se sont retrouvés « par hasard » au bordel du coin, la veille même de cet assassinat.
Tout n'est pas tristesse dans ce livre, malgré le contexte , des femmes affirment leur féminité et surtout veulent disposer de leur liberté.

Cet auteur, militant kurde des droits de l'homme encourt une peine de 183 années de prison dans ce grand pays où les libertés fondamentales sont confisquées par un tyran .

Jean-François Chalot