Les Châtiments
de Victor Hugo

critiqué par Lolita, le 8 juillet 2004
(Bormes les mimosas - 38 ans)


La note:  étoiles
Pour ne pas oublier
Victor Hugo a écrit Les châtiments pour combattre Napoléon "le petit" comme il le surnommait. La poésie n'est-elle pas en effet le meilleur moyen de combattre? Toute sa fureur, ses espérances et son désespoir sont retranscrits dans chacun des poèmes pour qu'on n'oublie pas les horreurs de cette époque. Certains sont vraiment émouvants comme Pauline Roland qui relate le combat d'une femme puis sa mort dans la douleur. Ou encore le poème qui raconte la mort d'un jeune enfant tué par les soldats. Chaque poésie a son charme. Certaines sont plus faciles à comprendre. Je dois avouer que j'ai quand même eu quelques difficultés. D'abord parce que Hugo s'insurge contre des personnalités réelles que nous ne connaissons pas toujours. Heureusement certaines éditions présentent un index et un historique. Ensuite, cette période de l'histoire est peu exploitée dans la littérature et peu connue. Mieux vaut avoir de véritables références avant de s'engager dans la lecture de ce livre pour vraiment l'apprécier.
Attention, lecture dangereuse 8 étoiles

Que dire? En fait je me rends compte que j'ai beaucoup de mal à parler de ce livre, tant le sentiment que j'en éprouve est confus.

Commençons par le commencement, ça m'aidera peut-être. Comme vous le savez, cet ouvrage est une diatribe en vers, écrite à Jersey de la main du plus célebre des écrivains et politiciens français, dans les années 1850, pour protester contre le coup d'état sanglant de Louis Napoléon Bonaparte, et surtout contre l'avènement de l'Empire, assassin de la République.

Il est découpé en sept chapitres, chacun étant composé de dix à vingt poèmes.

Qu'en retenir?

Premier avertissement: c'est hardcore. Dans le choix des mots, dans les images, dans les accusations nominatives qui y sont scandées. J'ai enfin compris en m'immergeant dans son discours, pourquoi Victor Hugo a cette réputation sulfureuse de poète militant jusqu'à la moëlle. Comme il balance le gazier, à côté de lui Zemmour et Naulleau le samedi soir chez Ruquier sont des danseuses en tutu.

Deuxième avertissement: si l'on a pas pris le soin de s'imprégner un tout petit peu du contexte historique, la première lecture peut sembler très (trop) indigeste. En effet, l'accumulation de noms propres, dont la majorité est inconnue des non-initiés, provoque irrémédiablement la noyade. Alors tant qu'il est question de Napoléon III en personne, ça va on s'y retrouve (il vaut mieux dans la mesure où une bonne dizaine de poèmes lui sont exclusivement dédiés), mais quand il commence à éplucher un à un les membres de son gouvernement, ça devient tendu. Heureusement, ce bémol ne pèse plus très lourd dans la balance une fois considéré le troisième avertissement présenté ci-dessous.

Troisième avertissement: on ne peut je pense tirer profit d'une lecture partielle des Châtiments, par exemple en choisissant au pif l'un des poèmes (à une ou deux exceptions près), tout simplement parce qu'en dépit de son chapitrage clair et précis, ce bouquin est un tout indivisible, qui n'a de sens profond que dans sa globalité. C'est précisément de l'impression de violence, de bordel et d'intensité condensés qu'émane la force poétique écrasante de ce chef d'oeuvre.

Ces trois éléments gardés en tête, on peut alors se délecter de morceaux d'esthétisme, de punchlines de malades à ressortir à vos pires ennemis , tenez, comme celle-ci qui est une de mes préférées:

"Dieu prédestine aux dents des chevreaux les brins d'herbes
La mer aux coups de vent, les donjons aux boulets
Aux rayons du soleil les parthénons superbes
Vos faces aux larges soufflets"

(Il s'adresse aux sbires de l'Empire, évidemment).

Alors comme je le disais, quelques poèmes se suffisent malgré tout à eux-mêmes, je pense par exemple à Pauline Roland, ou à Lux (qui conclut le recueil). Dans deux styles totalement différents, l'un évoquant le destin tragique d'une femme militante et l'autre la solarité du nouveau monde qui fera suite à l'Empire défunt, le poète nous emporte loin, très loin.

Voilà, comme je vous l'avais dit, sentiment très confus. Ce fut une lecture difficile, mais que je ne regrette absolument pas tant l'écrivain suscite l'admiration. Par son engagement, son abnégation...et son talent littéraire ni plus ni moins. Si vous disposez de l'édition Poche, je vous invite très vivement à lire les 50 pages de commentaires qui font suite au recueil, qui éclairent assez bien sur la compréhension du combat de Hugo et du contexte de l'époque.

Enfin, et surtout, ne manquez pas (toujours dans cette édition Poche) les extraits de discours du Victor Hugo Politicien à la Tribune. Un véritable cours de rhétorique!

Bon, bref. Les Châtiments, c'est une vraie performance d'auteur, qui vaut vingt fois le détour, aussi complexe en soit la lecture.

Megamousse - - 41 ans - 11 août 2009


Excellent 10 étoiles

Pas son meilleur recueil de poèmes (je pense que "La Légende Des Siècles" écrase tout), mais il regorge de grandes pages, et si on aime Hugo, c'est à lire ! Après, certes, c'est souvent nébuleux (références vieillottes à des personnages et évènements trop ancrés dans l'époque hugolienne), mais le style et la rage communicative font tout.

Bookivore - MENUCOURT - 41 ans - 5 mars 2009