Pontcarral
de Albéric Cahuet

critiqué par Kostog, le 28 juillet 2019
( - 51 ans)


La note:  étoiles
Hussard toujours!
Issu d’une famille très modeste, Pierre Pontcarral s’est illustré par sa bravoure dans les armées de Napoléon. Devenu colonel, il est de ceux qui refusent de se rallier à la monarchie. Rebel en 1816, il est pourchassé, proscrit, puis amnistié. En 1821, il revient se réfugier au cœur du Périgord noir, sa terre natale. Placé au ban de la société, traqué, surveillé, il s’enferme dans un hautain isolement.

Puis le hasard fait entrer dans son existence la jeune Sibylle et sa sœur, l'intransigeante Mme de. Blessanges, définitivement marquée par le passé des nobles émigrés et par un amour contrarié. À travers eux, deux mondes s’affrontent, les irréductibles partisans du Premier empire, d'une part, la noblesse de la Restauration, de l'autre.

Albéric Cahuet, journaliste renommé et auteur de nombreux romans et pièces de théâtre est l'un des oubliés des lettres françaises. Son roman Pontcarral paru en 1937 eut, paraît-il, passablement de succès et fut réédité à de multiples reprises. A juste titre, il vaut, en effet, bien des prix Goncours et mérite le détour. La maîtrise et la fluidité des dialogues montrent notamment tout le savoir faire de Cahuet en tant qu’écrivain de pièces de théâtre.

Pontcarral est un roman où l’orgueil et l’amour blessé conduisent à des destins meurtris. Il est également celui où les apparences de la passion trompent les coeurs simples, Garlone de. Blessanges n’étant au fond qu’une coquette, qui ne connaît que le badinage. Le récit est simplement mené, mais avec aisance et efficacité, la stature du terrible cavalier, formant comme un roc de droiture face aux tourmentes politiques et amoureuses.

Un roman rafraîchissant avec des héroïnes émouvantes dont je ne peux que recommander la lecture.

Extrait:
« Sans doute ne s’est-il jamais rendu compte de cette âpre grandeur qui venait de lui et qui l’empêcha de vivre normalement la vie des hommes... Sur le désert lui-même passe les ailes du printemps. Et l’on a vu des fleurs sortir du coeur des pierres. »
Nostalgie napoléonienne 7 étoiles

Le colonel Pontcarral, ancien officier de la Grande Armée, est assigné à résidence pendant la Restauration dans son pauvre domaine de Fondaumier, dans le Périgord, près de Sarlat. Il vit comme un ermite, ne désirant voir personne. Le hasard va lui faire rencontrer la famille du marquis de Ransac, et en particulier ses filles, la fraîche Sibylle, et son aînée, Madame de Blessanges.

Belle découverte encore une fois que ce Pontcarral, déniché en "bibliothèque verte" par ma moitié dans une boîte à livre, malgré un auteur et un titre absolument inconnu au bataillon pour moi en tout cas. C'était sans doute aussi le reflet d'une d'une époque où Hachette, aux jeunes lecteurs, n’hésitait pas à proposer, ou des classiques, ou bien des écrivains "secondaires" mais d'excellente facture, comme ici avec Albéric Cahuet.

C'est en effet le style de l'auteur qui retient l'attention, un style fin, enlevé, poétique, ça sonne bien quoi, "il y a du niveau" comme dirait ma fille. Qu'on en juge simplement dans la préface de l'auteur qui parle de ce personnage de Pontcarral dont il a fait un roman: "Ce fantôme insolent a hanté ma jeunesse. Je l'ai, je crois, aimé autant qu'il fut, en ces lieux, redouté. Bien des fois, parmi les tertres abrupts interdits aux voitures, dans les mauvais sentiers de pierres où butait mon cheval, j'ai cru voir se dresser devant moi son âpre silhouette".

Le personnage du colonel Pontcarral, dur, âpre, bercé par la gloire défunte de l'Empire, est au cœur du livre. Pontcarral est d'ailleurs très clairement un hommage aux années napoléoniennes et décrit avec beaucoup de tendresse la "vieille garde" qui a tant donné pour l'Empereur. L'ambiance du roman quant à elle, est à la fois badine, romantique, mais aussi marquée par la nostalgie et l'amertume. Celle de Pontcarral bien sûr, mais aussi celle de sa femme, Garlone (surnom de Madame de Blessanges) qui ne trouvera pas finalement le bonheur auprès de lui. C'est d'ailleurs un des points faibles du roman me semble-t-il: je n'ai pas compris ce qui pousse la jeune femme à demander la main du colonel - un ancien "ennemi" qui plus est - alors que la suite montre qu'elle n'a pas d'affection ni d'attirance pour lui, provoquant la déliquescence de leur union.

Malgré ce petit bémol, ce fut une excellent lecture, qui m'a permis de faire connaissance avec un écrivain sans doute un peu oublié.

Fanou03 - * - 48 ans - 13 septembre 2022