Charles V le Sage: Dauphin, duc et régent (1338-1358)
de François Sarindar-Fontaine

critiqué par Francois Sarindar, le 24 mai 2019
( - 66 ans)


La note:  étoiles
Dépoussiérage
Il y a longtemps que je n'ai pas livré de commentaire sur Critiques libres et je reviens ici pour vous faire connaître un livre sorti de mes mains et de mes réflexions.
C'est un vrai travail d'historien. Entendons-nous bien : je ne suis pas un historien sorti du sérail, mais enfin je travaille comme les historiens professionnels sans en être un moi-même. C'est mon troisième ouvrage, et ce n'est pas le moindre. Je ne vis pas de ma plume, et je ne pense pas être inférieur aux historiens dont c'est le métier.
J'ai remarqué que lorsque l'on aborde le personnage de Charles V le Sage (1338-1380), on voit immédiatement se présenter à nous l'image d'un roi qui a mieux fait que son père, Jean II le Bon, vaincu et fait prisonnier par les Anglais à Poitiers en 1356 et qui s'est mieux tiré d'affaire que son fils, Charles VI dit le Bien-Aimé puis le Fou et qui, au cours d'un long règne calamiteux, aurait eu, outre sa démence, à subir le déchirement familial au travers de la querelle des Armagnacs et des Bourguignons et dont l'armée aurait eu à connaître un désastre militaire pire que les précédents, celui d'Azincourt en 1415.
Ayant dit cela, on félicite unanimement Charles V le Sage d'avoir su, le plus possible éviter les batailles rangées où les Français n'avaient que des coups à prendre, et pratiqué la guerre défensive derrière les remparts des villes tout en grignotant les positions anglaises à l'aide de l'homme dont il fera son connétable, Bertrand du Guesclin. Fort belle image apparemment, mais la réalité est plus complexe et le bilan plus mitigé.
Voici le premier volet de mon travail sur Charles V le Sage : j'y évoque ici le Dauphin, le duc, le Lieutenant du roi et le régent qu'il fut pendant la captivité de son père Jean le Bon, retenu prisonnier à Bordeaux, puis en Angleterre après le désastre de Poitiers en 1356.
Charles rentra à Paris après la défaite et eut affaire aux revendications de la bourgeoisie qui réclamait des réformes sur le plan fiscal et une plus grande stabilité monétaire après des séries de dévaluations qui avaient permis au roi de remplir ses caisses par le moyen du monnayage.
Des deux hommes aux prises dans l'affaire, Charles et Étienne Marcel, je dresse un portrait qui, par petites touches, modifie l'image que l'on se faisait d'eux jusqu'à présent : je montre la logique qui animait Marcel, Prévôt des marchands de Paris, qui, voulant rassembler les forces vives de la bourgeoisie et de la partie la plus progressiste de la noblesse et du clergé à la faveur des États de langue d'oïl, finit par échouer devant l'impossibilité pour l'aristocratie de s'entendre durablement avec lui, au risque de céder une trop grande place aux bourgeois, ce que cependant Marcel fut incapable d'obtenir, ne serait-ce qu'au sein du Conseil qui entourait le Dauphin, duc de Normandie et Régent. Étienne Marcel ne cherchait nullement à substituer le roi de Navarre au Dauphin, du moins pas avant l'été 1358. Il voulait forcer le Dauphin à entériner les décisions prises par les États, mais celui-ci cherchait à se soustraire à ces obligations inscrites dans les ordonnances qu'on s'évertuait à lui faire adopter. La stratégie de Charles résidait dans l'art de pratiquer l'esquive et de s'enfuir quand l'occasion se présentait de partir. Le meurtre de deux de ses conseillers, maréchaux de Champagne et de Normandie, en 1358, permit à Charles de prétexter la nécessité d'assisrer à la réunion d'un groupe de nobles hors de Paris pour prendre la clé des champs. Et c'est alors qu'il organisa la résistance contre Étienne Marcel. On pensait avoir tout dit à ce sujet. Vous verrez en lisant cet ouvrage qu'il manquait quelque cohérence dans les explications données par les uns et les autres : Roland Delachenal, Raymond Cazelles et Françoise Autrand. Il fallait donc approfondir le sujet et analyser autrement les mobiles des protagonistes. Je n'en dirai pas plus à ce sujet. Mieux vaut lire le livre.
J'ajoute qu'à mieux connaître les goûts artistiques et littéraires de Jean le Bon, de son épouse Bonne de Luxembourg et de sa mère, Jeanne de Bourgogne, dite la Boîteuse, on peut raisonnablement penser que l'intérêt du jeune prince pour les livres - et surtout les beaux livres - a dû se manifester plus tôt qu'on ne le pensait jusqu'ici.
Après cet ouvrage où il est question des vingt premières années de la vie de Charles V le Sage (1338-1358), il me restera à traiter des vingt-deux suivantes et dernières - et ce sera principalement du règne de Charles dont je parlerai dans le deuxième ouvrage que je vais consacrer à ce personnage (1358-1380). C'est surtout dans ce second volume que je serai amené à me démarquer de mes devanciers.

François Sarindar