La plupart du temps je m'appelle Gabrielle
de Stefani Meunier

critiqué par Libris québécis, le 4 mai 2019
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Aimer malgré tout
La foi transporte les montagnes. L’amour aussi. Mais c’est affolant quand Cupidon lance sa flèche dans un nid de guêpes. C’est le cas de Jasmine et de Gabrielle, la mère et l’enseignante, qui font face à des jumeaux dont la santé mentale est lourdement hypothéquée. Elles se dévouent sans compter pour ces deux garçons, Jean et Lougan. Ce dernier présente un symptôme très grave d’opposition. Et le premier, par contre, est un autiste. Cette maladie renferme plutôt sa victime dans un cocon. C’est toute une tâche que de percer la carapace de l’un et de piloter l’autre pour qu’il garde le cap. Heureusement, ce sont des enfants brillants, mais il reste qu’ils sont rétifs comme des poulains que l’on voudrait harnacher.

Les deux femmes s’épauleront pour cette mission impossible d’éduquer des êtres prisonniers d’un esprit retors. Pour y parvenir, si jamais elles y parviennent, elles devront elles-mêmes remonter vers leur amont pour se sentir plus fortes afin d’atteindre leur objectif. Chacun traîne le boulet de son existence.

Gabrielle ne l’a pas eu facile. Née d’un couple qui s’aime sans se poser de question, elle a dû subir tout de même le malaise dissociatif de sa mère, qui double sa personnalité de celle de son fantôme. Est-elle Maria ou Suzan ? Elle est la première dans ses périodes de crise et son double dans ses moments d’accalmie. Cette dissociation fait fuir les jardins de roses. Le dénouement de cette maladie est plutôt infernal. Le mari garde le phare. Heureusement pour Gabrielle qui apprend à ses côtés l’art d’aimer.

Jasmine est une femme qui envisageait de mener une vie de rêve dans une île idyllique. Un coup de foudre lui a apporté de beaux jumeaux d’un géniteur anonyme. La situation est loin de produire le fruit béni de ses entrailles, comme dirait l’archange Gabriel.

Avec sa trame, Stéfani Meunier tente de prouver la force de l’amour. Aimer envers et contre tous est l’aphorisme qui résumerait le mieux ce roman. La démonstration est convaincante. L’œuvre apparaît dans toute sa richesse quand elle émerge du préambule nébuleux. Et l’auteure a su éviter le piège de la pitié. Elle claironne plutôt son amitié envers ceux qui vivent dans l’affliction.