Quatre-vingt-dix secondes
de Daniel Picouly

critiqué par Monocle, le 7 avril 2019
(tournai - 64 ans)


La note:  étoiles
Du grand art
Le narrateur est un volcan, il parle de lui au féminin donc c'est une dame... la montagne Pelée qui domine Saint-Pierre dans le nord de la Martinique.
Elle observe son ciel, sa vallée, son peuple. Elle regarde les mesquineries des hommes, leur impudence. Depuis quelques décennies les esclaves naissent libres mais la ville est cloisonnée. Nous sommes en 1902, le territoire est français mais anglais et américains lorgnent du coin de l’œil ce coin de paradis.
Au jardin Botanique, où les amants viennent roucouler le soir, où les mères promènent leurs poupons la journée à l'ombre de ces grands arbres aux douces senteurs, il y a souvent à l'aube un tout autre spectacle. Les honneurs bafoués y viennent avec leurs témoins. La Pelée voit tout, elle ouvre les courriers pour lire les lettres, elle entend les pensées... elle se prend d'affection aussi pour certains, mais en règle générale elle trouve l'homme veule, lâche, mesquin. Saint-Pierre, la ville catin sera-t-elle lapidée à mort par un nuage noir ?

Finit de rire, il est sept heures et cinquante deux minutes, nous sommes le huit mai, la Pelée ne se contient plus !

Qu'en penser ?
Faire parler un volcan est en soi une idée géniale, bravo à l'auteur, il fallait y penser mais bien le faire parler n'est pas à la portée du premier venu. J'ai savouré ce livre car c'est du tout grand art, une littérature riche qui part dans tous les sens. Quelle puissance, quelle richesse !
Merci Monsieur Picouly.