Une drôle de fille
de Armel Job

critiqué par Nathavh, le 23 février 2019
( - 59 ans)


La note:  étoiles
Une drôle de fille
Direction Martfort, une petite ville de province dans les années 50. Nous sommes à la campagne et la famille Borj - Ruben et Gilda et leurs enfants Astrid et Rémi - famille sans histoire tient une boulangerie florissante.

Imaginez-vous, par l'odeur du pain chaud et des croissants, poussant la porte de la boulangerie pour y chercher une douceur le dimanche, une "gosette" aux pommes, un "éclair au chocolat" ou tout simplement "les pistolets" du dimanche matin.

Nous sommes le 13 septembre 1958, l'expo universelle bat son plein, Léopoldine Vandelamalle pousse la porte de la boulangerie, elle est responsable de l'oeuvre nationale des orphelins de guerre. Elle n'est pas ici comme cliente mais veut parler avec Ruben et Gilda .

Elle leur parle de Josée Piron, une jeune fille née en 42 tout comme leur fille Astrid, une adolescente de 16 ans orpheline de guerre qui a vu toute sa famille disparaître sous un bombardement à Houffalize. Josée a été traumatisée à l'époque et en a gardé quelques séquelles, elle est dirons-nous un peu "simplette", elle ne lit pas mais compte sans problème et est aimable. Madame Vandelamalle aimerait lui donner une chance dans la vie et souhaiterait que les Borj l'engagent comme apprentie vendeuse. Elle est travailleuse et souriante, une occasion pour Gilda de souffler un peu, elle l'aidera à la boulangerie et dans le ménage et tiendra compagnie à Astrid.

Sceptique au premier abord, la famille accepte. Josée débarque et Gilda se souvient et revit grâce à elle son adolescence, son arrivée dans la famille au même âge. Elle éprouve une certaine tendresse pour Gilda, une nostalgie en remettant au goût du jour ses vêtements remisés dans une malle au grenier. Josée utilisera la mansarde comme elle le fit par le passé. Cela réveille les souvenirs de Gilda.

Ruben quand à lui est un peu émoustillé, attiré vers Josée, il l'observe. Mais pourquoi ?

Une boîte de nuit ouvre ses portes dans le patelin d'à côté le 11 octobre 58, le Wigwam, c'est un événement à ne pas rater. Astrid convainc ses parents d'y aller, la condition est d'être accompagnée de Josée. Josée sera fascinée par la prestation live d'Henri Breyre qui reprend la chanson "Diana" en français, chanson que Josée chantera sans cesse... mais un incident survient lors de cette soirée, ce sera le début de rumeurs qui attiseront la curiosité des locaux.

La belle voix de Josée causera d'autres incidents et lui permettra aussi d'être repérée pour la chorale dirigée par le fils de la mère Michaux.

Nous sommes dans une petite ville de campagne, tout le monde passera à la boulangerie pour voir Josée, très vite elle sera l'objet d'une rumeur qui se répandra comme de la poudre, enflera , se déformera et changera à tout jamais le destin de la famille Borj. Je ne peux vous en dire plus si ce n'est que la maîtrise de ce thriller psychologique est parfaite.

Armel Job est au sommet de son art, il explore comme toujours l'âme humaine en profondeur. On vit avec lui cette période d'après guerre qui a encore beaucoup de secrets à dévoiler. Les descriptions des personnages, de l'époque, des intérieurs, de l'ambiance sont superbement rendues, c'est comme si vous y étiez. La langue d'Armel Job est savoureuse comme les pâtisseries des Borj, elle décrit à merveille et non sans humour les sentiments et les secrets des protagonistes.

Un roman qu'on ne lâche pas avant de l'avoir terminé, qui fait ressurgir les souvenirs du passé de Gilda. C'est du grand art comme à chaque fois, je pense que ce n'est pas pour rien que la page la plus lue de mon blog est un autre article sur un livre du même auteur "Loin des mosquées".

Magistral ! A lire sans tarder.

Merci Armel Job pour l'envoi de ce livre et votre confiance.

Ma note : Immense coup de coeur

Les jolies phrases

Les moments de grand bonheur sont si rares dans la vie qu'on les compterait sur les doigts d'une main. Après, lorsqu'on en recherche le souvenir, le plus souvent, ils se dérobent, ils n'en rétrocèdent que le regret. Pour qu'ils reprennent vie vraiment, il faut une coïncidence miraculeuse ou la puissance de certains rêves. Alors, parfois, on peut retrouver jusque dans sa chair les émotions enivrantes éprouvées dans ces jours heureux.

Le puzzle la détend, c'est ce qu'elle prétend. Quand elle cherche à emboîter les morceaux, elle ne pense plus à rien : le bonheur parfait pour la plupart des humains.

Un rockeur, Ruben et Gilda avaient vu ce que c'était : un énergumène qui se tortille comme si une souris s'était introduite dans sa braguette, au milieu de filles à moitié nues.

Lorsqu'une rumeur se répand, les personnes qui sont le moins au courant ce sont le plus souvent les personnes concernées. Déjà, Gilda était tombée des nues quand Saintvith lui avait appris qu'on jasait en ville à propos de Josée. Puis elle s'était imaginé que sa visite mettait un terme à l'affaire, qu'on n'en parlerait plus. Puisqu'il avait rétabli la vérité chez elle, elle était rétablie partout.

La seule faille de la rumeur, c'est que ses propagateurs, la plupart du temps, taillent un costume à des gens qui ne sont ni plus ni moins fautifs que bien d'autres. A force, il pourrait même leur venir des scrupules. Il s'agit de les étouffer. Rien de tel, à cette fin, que de se retrancher derrière la cause supérieure d'un innocent.

Les décisions des adultes obstruent son existence comme cette façade sa vue, c'est ce qu'elle doit penser.

L'ennui, c'est que la fin de l'amitié chez les filles n'est pas le retour à l'indifférence, mais le début de la haine.
Une époque, un village et des secrets de famille 9 étoiles

Comme dans son ouvrage précédent « Une femme que j’aimais » l’auteur remonte à la fois le temps et nous plonge dans une histoire de famille qui est annoncée dès le début du roman comme ayant une issue dramatique.

Armel Job utilise comme à son habitude un style très prenant et d’une grande fluidité pour nous raconter l’histoire de Josée, jeune fille orpheline qui est placée en apprentissage chez Ruben et Gilda, qui tiennent la Maison Borj, boulangerie d’un gros village ardennais imaginaire. On est en 1958, année de l'Expo de Bruxelles.

Le talent de l’écrivain belge n’est plus à démontrer et sa faculté d’emmener le lecteur au travers les chapitres est une véritable délectation. Alors qu’on s’attendrait à un récit cousu de fil blanc, les rebondissements viennent toujours à propos et régalent le lecteur.

Doit-on y trouver un bémol ? Peut-être la répétition d’un même trame dans ses derniers romans. Il apporte tout de même une variation dans les époques et les contextes tantôt ruraux, tantôt plus urbains mais toujours teintés d’une belgitude très marquée.

Longue vie à Armel Job ; qu’il puisse encore nous écrire d’autres belles histoires comme cette drôle de fille !

Pacmann - Tamise - 59 ans - 31 décembre 2019


Du Armel Job classique 8 étoiles

Il suffit parfois d’un seul petit élément pour faire chavirer tout un équilibre établi.
Dans la famille Borj, Ruben est boulanger, sa femme Gilda tient la boutique et ils ont deux enfants, Astrid et Rémi. Un jour, Josée, une orpheline de guerre est placée chez eux en apprentissage. Cet événement va faire ressurgir des secrets bien enfouis et déchaîner les bas instincts de plusieurs membres de la famille. Ruben est troublé par la jeune fille ; Astrid est jalouse de son talent de chanteuse qui attire tous les regards, puis les faveurs de la reine.
Encore une fois, Armel Job décrit un petit monde rural clos où la rumeur et l’apparence règnent en maître. Il démonte la mécanique des travers humains et les pousse à leur apogée pour déclencher des cataclysmes.
La couverture annonce un thriller psychologique, mais je ne suis pas d’accord avec cette description : aucun thriller ici. L’auteur reprend ses thèmes favoris : la guerre, l’ambiance de village en Ardennes. Je me prends à rêver qu’il puisse parfois changer un peu de registre…

Pascale Ew. - - 56 ans - 10 décembre 2019


Classé dans le top 3 de mes chouchoux 9 étoiles

L’histoire se déroule à Marfort (lieu fictif) , un gros village situé dans l’Ardenne belge, en 1958 jusqu’au premier janvier 1959. Josée est la seule rescapée de sa famille suite aux bombardements qui ont eu lieu à Houffalize en janvier 1945. Elle a 18 ans, est assez jolie mais, dirons-nous, un peu limitée intellectuellement (notez qu’elle calcule avec une dextérité certaine, au moins jusqu’à cent, ce qui, ici, est nécessaire et suffisant). Comme elle est orpheline, une organisation sociale est parvenue à la placer comme apprentie serveuse à la boulangerie Borj, tenue par Ruben et Gilda qui ont deux enfants : Rémi et Astrid. Il s’avère très vite que Josée possède une voix qui sort de l’ordinaire : sa prestation, lors de la messe de Noël à l’église du village, a fait des étincelles. Elle et deux autres membres de la chorale des Libellules sont invitées chez la reine Elisabeth au palais de Laeken.
Tous les principaux personnages sont sur scène. Place maintenant au Passé qui va faire des ravages …

Que de fois, ces pages déclenchèrent chez moi des éclats de rires tonitruants, entremêlés, au fur et à mesure qu’avançait le récit, par des flots d’émotion…
Des vingt livres d’Armel Job que j’ai lus jusqu’à présent, cette « drôle de fille » figure dans le top 3 de ceux que j’ai le plus aimés.

Extraits :

- Il faut qu’il lâche du lest, sinon elle va basculer sur le côté du lit et il passera la nuit à l’hôtel du cul tourné.

- ( à propos de la chanson « Diana ») Une mère de famille lui avait transmis le texte de sa chanson dans lequel Breyre se demandait comment Diana, à dix-sept ans, pouvait être encore être seule dans son lit !

- Un rockeur, Ruben et Gilda avaient vu ce que c’était : un énergumène qui se tortille comme si une souris s’était introduite dans sa braguette, au milieu de filles à moitié nues.

- Le grand boutonneux est occupé à se savonner les bras et les mains. Il est en slip kangourou et T-shirt Marlon Brando.

- Elle lui lance l’oeillade narquoise des gens qui savent des choses sur nous que nous ne savons pas.

- L’ennui, c’est que la fin de l’amitié chez les filles n’est pas le retour à l’indifférence, mais le début de la haine.

- Dites-le à un cheval de bois, il vous décochera une ruade.

- Les femmes doivent se défendre, Josée. Ne l’oublie jamais. Il n’y a pas le moindre lieu sûr pour nous. Nulle part.

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En bonus « Diana » de Henri Breyre :
https://www.youtube.com/watch?v=i_Zih5S7CJ8

Catinus - Liège - 72 ans - 31 mars 2019


Pépite 10 étoiles

Bonjour les lecteurs ...

Voici le petit dernier d' Armel Job et ... attention ... pépite !!

Comme à son habitude, Monsieur Job nous plonge dans nos Ardennes belges.

Nous sommes à la fin des années 1950, la famille Borj est une famille des plus ordinaire. Le père est boulanger, la mère s'occupe de sa famille et de la boutique, deux enfants ados.
Bref une vie simple, presque banale.
Et ceci jusqu'au jour où ils prennent une jeune fille en apprentissage, Josée.
Celle-ci est orpheline de guerre et un peu " simplette" diront certains.
Josée révèle cependant très vite un don pour le calcul (qui lui attire les bonnes grâces de " la patronne" ) et surtout un don pour le chant qui va chambouler la vie de cette petite famille..

Et c'est là que la machine " Job " se met en place pour nous livrer un thriller psychologique dont il a le secret.
On sait, on sent que cela va mal tourner .. mais où ?, comment ?et quand?

Au travers des pages, ON retrouve l'amour maternel, la jalousie, les ragots, la méchanceté.
C'est une histoire d'une fille "simple" qui n'en est peut-être pas une, une histoire de père, une histoire de bouc émissaire

Et oui, tout cela dans un peu plus de 270 pages !

L'écriture est addictive simple et fluide, le vocabulaire chantant.

Bref.. Cette cuvée est un grand cru ..
Les pages défilent ( beaucoup trop vite à mon goût), l'auteur est au sommet de son art.

Si vous ne connaissez pas cet auteur belge, hâtez vous de pallier cette lacune, vous ne sortirez pas déçu de cette lecture, bien au contraire, vous en redemanderez.
Si comme moi, vous êtes fan... procurez-vous vite ce dernier bijou et savourez-le en attendant le suivant.

Ne passez pas à côté !

BRAVO MONSIEUR Job et vivement l'année prochaine

Faby de Caparica - - 62 ans - 8 mars 2019