Féerie pour une autre fois
de Louis-Ferdinand Céline

critiqué par Jules, le 24 février 2001
(Bruxelles - 79 ans)


La note:  étoiles
Louis-Ferdinand en prison au Danemark
Nous sommes en 44 et Paris n’est pas encore libéré. Ferdinand sent déjà le vent du boulet, la corde des pendus.
Tout le quartier lui en veut et il y a quatre millions de gaullistes tout neufs, tout propres, qui n'attendent que la disparition du risque pour le brancher !. Il aurait vendu les plans de la ligne Maginot, fait arrêter des gens par wagons, fait torturer des résistants à la pelle !. Le diable en personne qu'il est le Ferdinand ! Il a l’habitude, il connaît !. « Le toboggan c’est une force qu'une fois aspiré par l'abîme vous prenez chaque volte des horions, de ces ruées de coups plein la gueule, et plus en plus bas, que vous êtes plus que bouillies et larmes. Réfléchissez ! la centrifugation des haines ! Y a l'abandon, le dernier soupir… Sûr ! certainement ! Vous rotez votre âme et Salut ! Au vent mignonne ! » Alors Ferdinand préfère tout laisser derrière lui, à cette foule vengeresse et patriote des dernières heures !… Bien connu !… Toute la France haïssait Pétain et adorait de Gaulle !… Ca saute aux yeux !. Il se carapate en Germanie à la suite du Maréchal, à Baden-Baden et Sigmaringen, puis vers le Danemark, à travers une Allemagne écroulée sous les bombes. Le Danemark, ce sera la forteresse, un cachot septième sous-sol, à s'y geler les billes, avec un fou hurleur dans la cellule d'à côté, tous au quartier des condamnés à mort !. La pellagre qu'il va y attraper et ses rhumatismes vont pas s’améliorer !… L'eczéma !… Et avec ça qu'on interroge encore Lulu à Paris !… Tout pour le rendre encore plus coupable !… Le Puy de Dôme, la Rade de Toulon, c’est lui, encore lui !… Avorteur, violeur, pédéraste, souteneur !. Et des seringues, cocaïne, morphine !… Qu’elle avoue et elle aura la paix !… Mais voilà : « Heureusement Arlette, raison même ! Pas divagante, pas hystérique, jamais !… La nature tout harmonie, la danseuse en l'âme et au corps, noblesse toute ! Vingt fois qu'elle aimerait mieux mourir que son sentiment fasse un pli. C'est une classique. elle a l'héroïsme comme elle danse et l’élégance et gentillesse… La tenue suprême… Jamais à trouver maladroite hésitante au son de son coeur… Ils ont été pour leurs frais, brutes ! » Il souffre tant qu'il en peut plus, mais ils l'auront pas !… Il va pas leur faire ce cadeau, Louis-Ferdinand. Il s'accroche tant et plus !. Le hurleur d'à côté a fini par se péter le crâne contre un mur de sa cellule, un autre s’est pendu, un Russe s’est ouvert les veines avec sa fourchette ! Mais lui, il en pense ceci : « Je veux pas que la mort me vienne des hommes, ils mentent trop ! Ils me donneraient pas l’Infini ! »
Alors, il résiste !… Il ne rentre en France qu'en 1951, s’installe à Meudon et écrit « Féerie pour une autre fois », « D’un château l'autre », « Nord » et « Rigodon ».
Pour célinophiles avertis 10 étoiles

Mais comment peut-on écrire après Céline ?

Ils l'ont pas lu nos goncourisés, c'est pas possible ? ou alors juste le Voyage, parce qu'on leur dit que le reste c'est pas lisible, ça se fait pas, sinon ils iraient pro-poser leur prose à la collection rose.

Céline c'est pas 5 étoiles, c'est la féerie dans ton esprit et tout de suite !

Bifidus - - 60 ans - 28 janvier 2012


Superbe critique de Jules! 0 étoiles

Superbe critique de Jules ! Je repense à ce micro-trottoir après la mort de Trenet, une vieille dame : « On dira ce qu’on veut, c'était un pédophile et un sale collabo ! » Comme Brasillach ou d'autres, Celine aurait peut-être été condamné à mort et exécuté à la Libération. Brasillach, à mon sens, méritait bien au moins le procès populaire. Trenet est passé dans la tourmente sans trop d’éclaboussures. Celine a d’abord choisi l'exil, avant de retourner en France et d'opter pour l’affrontement. Qu'il ait affiché sans vergogne un antisémitisme quasi maladif ne fait aucun doute. Celine demeure un auteur brûlant, suspect souvent - ses textes antisémites sentent l'ordure, la vinasse et la sénilité précoce - mais désespérément pertinent. Dans une interview donnée peu de temps avant sa mort, il n’avait qu'un seul mot pour qualifier ses contemporains : la lourdeur.

Mauro - Bruxelles - 61 ans - 26 février 2001