La maison pâle de Luke McCallin

La maison pâle de Luke McCallin
(Pale house)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Pieronnelle, le 18 août 2018 (Dans le nord et le sud...Belgique/France, Inscrite le 7 mai 2010, 76 ans)
La note : 10 étoiles
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Crépusculaire...

Après" L'homme de Berlin" on retrouve Reinhardt, dans ce second tome «La maison pâle», après qu’il ait été interrogé et torturé par la Gestapo suite à sa première enquête mettant en cause un général de l’armée, revenu en Bosnie croate après deux années de combats sur le front de l’est et en plein délabrement de l’armée allemande.
A Sarajevo il va trouver une situation quasi crépusculaire ; la fin approche, plus exactement la défaite allemande, et les diverses factions de l’armée ainsi que ses alliés croates en place, vont essayer de tirer leur épingle du jeu .
Soutenu par un haut gradé, qui fait partie d’une organisation de résistance allemande, il a été muté dans Le Feldjägerkorps, la police militaire de l’armée, qui n’accepte que les anciens combattants décorés et qui ne doit rendre compte qu’au Haut commandement des forces armées. Ces officiers disposent de pleins pouvoirs pour maintenir la discipline dans les bases arrières de l’armée. De par ses antécédents d’agent de renseignements et ses anciennes activités de commissaire dans la Kripa de Berlin on l’affecte donc à des fonctions de police mais au sein de l’armée . Malgré ses réticences Reinhardt est contraint de s’exécuter.
Dès son arrivée il va se trouver face aux morts mystérieuses de 3 soldats de la Felgendarmerie ainsi qu’à un massacre de civils dans les bois ; cette division de la Felgendarmerie est très particulière et son commandement encore plus ; il s’agit en fait d’un bataillon disciplinaire qui s’accorde des droits à la limite de la légalité et surtout qui ne permet à personne d’aller mettre son nez dans son fonctionnement ; elle porte de nom de «Chiens de chaîne» et Reinhardt va se heurter à un mur de silence et d’agressivité. Il n’est pas le bienvenu malgré son titre de Feldjäger qui en principe devrait lui ouvrir toutes les portes et il sent bien que non seulement on va lui cacher tous les renseignements nécessaires à son enquête mais qu’on va lui mettre des bâtons dans les roues.
Mais surtout il va découvrir un lieu de tous les dangers «La maison pâle» où les oustachis fascistes oeuvrent de concert avec les SS dans des conditions mystérieuses. Ce qui s’y passe ne doit pas sortir et même Reinhardt ne pourra pas y accéder bien qu’il soit persuadé que la solution concernant les responsables des morts se trouve au sein de cette division disciplinaire et de la Maison pâle.
De nouveau il va enquêter au coeur de Sarajevo, en pleine disette, complètement désorganisée et pillée par les oustachis ; il y rencontrera entre autres Suzana Vukic, la mère de la jeune femme sympathisante oustachi qui avait été assassinée lors de son premier séjour (cf.L’Homme de Berlin) et découvrira rapidement qu’elle agit au sein de la résistance multiethnique de Tito ; il pourra contacter les chefs de la résistance et cette rencontre sera importante aussi bien pour ses recherches que sur le plan personnel ; elle lui permettra de redécouvrir en lui une capacité à aimer qu’il avait perdue après la mort de sa femme.

Tout est très bien documenté dans les livres de MacCallin, il y a énormément de détails et Reinhardt est tout sauf un héros invincible . Malgré sa fonction dans l’armée il y en lui une fragilité que, en dehors de Suzana, il ne permettra de laisser voir à quiconque. C’est un personnage attachant et tourmenté.
Comme la dernière fois il réussira à résoudre son enquête car il est tenace, et ses convictions profondes, malgré sa désespérance, lui permettront d’aller jusqu’au bout surmontant les dangers provenant de responsables allemands corrompus et des oustachis totalement incontrôlables.

«La voiture ralentit, laissant à Reinhardt le loisir de découvrir ce qui retenait les gens. Des corps. Des dizaines de corps, se balançant lentement au bout de cordes. Pendus à des arbres, à des lampadaires et à des panneaux, certains accrochés à des fenêtres. Des hommes, pour la plupart, mais aussi des femmes. Les braseros et les lampes peignaient des cadavres d’une horrible lumière orange et noire qui donnaient à leurs visages des airs de masques grimaçants, lesquels semblaient se moquer des spectateurs comme s’ils avaient quelque chose que seuls les morts pouvaient comprendre. Des oustachis entouraient le périmètre, et la tension de la foule était palpable, femmes et enfants pleurant ceux qui, il y a peu, étaient encore des maris et des pères.»

Sa sympathie avec la résistance croate lui posera le cas de conscience d’une éventuelle trahison ; mais Reinhardt est un patriote et il ne sera jamais un traître et, même s’il comprend la haine que les partisans éprouvent envers les fascistes oustachis qui massacrent le peuple, il ne peut s’associer à ces représailles car ce n’est pas son combat.
Alors que l’armée allemande commence à s’enfuir avec une grande partie de la population qui ne sait pas ce qui va lui arriver soit par les alliés soit par la résistance de Tito, au sein de l’exode de la population s’infiltreront des oustachis et des SS qui veulent quitter le navire craignant les représailles.
On sait de par l’Histoire que ces représailles auront lieu et que l’infiltration lâche de ces fascistes dans la population causera des milliers de morts civiles.
Pas beaucoup d’espoir non plus dans ce tome, le crépuscule allemand annonce déjà les terribles conséquences de la défaite sur l’Allemagne et les allemands.
Dans le troisième tome «Les cendres de Berlin», on retrouvera Reinhardt revenu dans un Berlin occupé et partagé par les alliés, où, rétrogradé de sa fonction de commissaire à celle de simple enquêteur de police , il évoluera sur des monceaux de ruines dans une ville détruite .

Je soulignerai encore l’écriture presqu’envoûtante (belle traduction) qui dépeint cette ambiance crépusculaire et le tempérament de Reinhardt ainsi que la situation désastreuse au sein de la ville de Sarajevo .
Et toujours une postface extrêmement intéressante sur le point historique.

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Les éditions

  • La maison pâle [Texte imprimé], roman Luke McCallin traduit de l'anglais par Nicolas Zeimet
    de McCallin, Luke Zeimet, Nicolas (Traducteur)
    Éd. du Toucan / Suspense (Éd. du Toucan)
    ISBN : 9782810007257 ; EUR 11,99 ; 26/10/2016 ; 475 p. ; Format Kindle
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